L'hôpital de Saint-Jean de Dieu (Rhône)
et ses médecins

Médecins de l'asile privé des Frères de Saint-Jean de Dieu à Lyon
ensuite hôpital psychiatrique privé faisant fonction d'hôpital public de Saint-Jean-de-Dieu

Jean Raymond de Montrouge, médecin de la Maison de 1824 à 1826
Adéodat Faivre, médecin-chef de 1826 à 1829
Alexandre Laboré, médecin-chef de 1829 à 1832
Jean-Baptiste Carrier, médecin-chef de 1832 à 1872
Albert Carrier, fils de Jean-Baptiste, médecin-chef de 1872 à 1908
Georges Carrier, fils d'Albert, médecin-chef de 1908 à 1918
Francis Devay, médecin-adjoint de 1897 à 1900, puis médecin-chef (poste créé) jusqu'en 1939
Henri Carrier, fils d'Albert, médecin-chef de 1918 à 1930
Édouard Larrivé, médecin-chef de 1930 à 1970
André Mestrallet, gendre de Georges, médecin-chef (poste créé) de 1930 à 1972
René Mathon, médecin-chef de 1939 à 1942
Jean Carrier, fils d'Henri, médecin-chef de 1942 à 1977
Christiane Péchiné née Pelotat, médecin-chef de 1969 à
Jean-Pierre Vignat, médecin-chef de 1970 à

[ainsi que Jean-Claude Escolier, Catherine Graber, Suzanne Parizot, Henny Beÿer-Zilliox, &c, &c]


Paul de Magallon, restaurateur en 1819 de l'ordre de Saint Jean de Dieu en France -il avait été dissous à la Révolution- est à l'origine de la création en avril 1824 de la Maison des frères de Saint-Jean de Dieu, initialement Maison de Saint-Pierre et Saint-Paul, installée à la Guillotière, dans le château de Champagneux et les terrains alentours.

A partir de la loi de 1838, la maison de santé privée, propriété de l'ordre, fera fonction d'asile public, recevant des hommes placés d'office [P.O.] ou en placement volontaire [P.V.]. Elle est restée habilitée à recevoir des malades en hospitalisation sous contrainte [H.O. et H.D.T.], en soins sans consentement [S.D.R.E. et S.D.T.].

Certains malades paient une pension, mais après 1838, les séjours relèvent pour la plupart d'un prix de journée règlé par le département. Il est par ailleurs intéressant de remarquer la présence d'enfants dans la population des malades internés dès les premières années de la maison : entre 1824 et 1840, Élisa Vial en comptabilise dix-huit de moins de quinze ans, dont le plus jeune n'a que sept ans [Accueillir et soigner les aliénés..., 2019, p.67].

Jusqu'en 1980, la gestion de l'hôpital est assurée par les frères de l'Ordre hospitalier Saint-Jean de Dieu. Elle est depuis confiée à l'Association du Rhône pour l'hygiène mentale, devenue la Fondation ARHM.

Le Centre Hospitalier Saint Jean de Dieu est aujourd'hui un établissement privé d'intérêt collectif affilié à la FEHAP, toujours spécialisé en psychiatrie et chargé des missions de la sectorisation dans le sud du département du Rhône et le 7ème arrondissement de Lyon.

Il est utile de préciser que les médecins qui font l'objet de ces courtes notices sont tous des laïcs [ces médecins ont pu dans les premières années de l'existence de la maison être assistés d'un frère instruit et présenté comme médecin, comme en 1827 le frère Paulin, de son nom civil Louis Dénion, mais il est tout à fait improbable que ce frère ait été docteur en médecine : voir E. Vial, pp.93-94]. Selon Jacques Fleury, à la fin des années 1820 et au début des années 1830, « quelques frères étudiaient la médecine et la chirurgie sous la direction du médecin et du chirurgien de l'établissement. Ceux-ci ne séjournaient pas à l'hospice : ils s'y rendaient alternativement environ trois fois par semaine. »

Parmi ces médecins laïcs, plusieurs font partie de ce que l'on a appelé la dynastie Carrier, l'une de celles que Hervé Guillemin recense dans son ouvrage de 2006, avec Adam à Bourg, Hospital à Clermont, Longy à La Cellette, Rougé à Limoux, mais nulle n'est plus nombreuse que celle de Lyon, surtout si l'on y ajoute les Carrier de la Maison de Saint-Vincent-de-Paul.

Quelques références bibliographiques

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Jean Raymond Chirat de Montrouge [1797-1828]

Né à Montbrison [Loire] le « troisième brumaire an six de la République française une et indivisible », c'est-à-dire le 24 octobre 1797, Jean Raymond est le fils de Jean-Marie Demontrouge, tel qu'indiqué sur son acte de naissance : Jean-Marie Chirat de Montrouge, qui préfère en l'an VI dissimuler sa particule, était quelques années auparavant président du tribunal criminel du département de la Loire, son frère avait été reçu en 1785 Chevalier de Malte, et leur père Jean Raymond 1731-1798 fut lieutenant criminel au Présidial de Montbrison.

On sait peu de chose du premier médecin de la maison, si ce n'est qu'il a soutenu une thèse de médecine à Paris le 2 août 1825 portant comme titre De l'hépatite aiguë, et qu'il meurt le 19 septembre 1828, deux ans après en avoir cédé la direction médicale au docteur Faivre.

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Adéodat Faivre [1795-1838]

Antoine Joseph Adéodat, né à Besançon le 17 mars 1795, est le fils de Louise Gabrielle Françoise Bellamy [1776-1849] et d'Antoine Faivre [1768-1844], monarchiste condamné par le Tribunal révolutionnaire, incarcéré à Paris dans l'attente de son exécution, sauvé par la chute de Robespierre. Il émigre ensuite à Fribourg d'où il rentre en 1805 pour s'installer à Lyon où il poursuit ses travaux de publiciste, de traducteur et d'auteur, restant fidèle aux Bourbons sous Napoléon. Le grand-père paternel d'Adéodat, Pierre Antoine Faivre, seigneur d'Arcier [1713-1771], né à Pontarlier et mort à Besançon, était négociant et marchand quincaillier à Besançon.

« Ant. Jos. Adéodat Faivre », chirurgien interne de l'Hôtel-Dieu de Lyon, soutient sa thèse de docteur en médecine le 28 octobre 1817 à Strasbourg, De l'opération de l'empyème [qui est une infection de la plèvre]

En 1822, il est nommé médecin assermenté près les tribunaux de Lyon, et succède à de Montrouge comme médecin de la maison de santé de 1826 à 1829. En janvier de l'année suivante, il succède à René Pasquier comme médecin de l'Antiquaille (Lyon) où il est chargé du service des aliénés [voir Lyon médical, 6 janvier 1884, p.428]. Cependant, le 21 octobre 1830, il refuse de prêter le serment de fidélité au Roi et démissionne (il sera aussitôt remplacé par Bottex).

Le docteur Adéodat Faivre fonde alors et dirige jusqu'à son décès un asile privé ou maison de santé, en sa demeure de Saint-Julien, au Faubourg de Saint-Clair à Caluire (Rhône).

On a de lui :
Défense de M. Faivre, présentée par lui aux Assises du Rhône, le 23 août 1832 (au sujet de la distribution d'écrits séditieux)

Plaidoyer pour le sieur Faivre, Appelant; contre M. le Procureur Général, Intimé. Cour royale de Lyon, 4me Chambre (Signé : M. Chantelauze, Avocat Général, Me Journel, avocat, Me Corant, Avoué)

Notice sur la maison de santé de Saint-Julien, administrée par le docteur Faivre. Lyon, 1838

Examen du projet de loi sur la séquestration des aliénés. Par Adéodat Faivre, docteur en médecine, directeur de la Maison de santé de Saint-Julien, ex-médecin de l'hospice de l'Antiquaille et de l'Etablissement des Frères de Saint-Jean-de-Dieu. Lyon, Maire frères, 1838
Cet examen critique du projet de loi est un Mémoire lu à la séance du 22 janvier 1838 de la Société de médecine de Lyon, où l'auteur mentionne trois cas cliniques vus dans la maison de santé (pp.33-38). Notons que la Loi sur les aliénés du 30 juin 1838 diffère en plusieurs points de ce projet (voir sur ce même site : Loi de 1838, élaboration)

Le 17 juillet 1838, moins de trois semaines après la promulgation de cette fameuse loi, Adéodat meurt à Lyon, à l'âge de 43 ans.

Voir la notice de Frédéric-Zénon Collombet consacrée à Antoine et Adéodat Faivre, dans le Revue du Lyonnais, 1845, Vol. 21, pp.168-186

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Alexandre Laboré [1789-1874]

Alexandre, qui succède à Adéodat Faivre en 1829, est né à Lyon le 22 septembre 1789, où il s'installe après avoir soutenu à Strasbourg une thèse de médecine intitulée Dissertation sur le Délivrance.

Son nom apparait dans les lettres de Lamartine, qui avait été son condisciple chez les Pères de la Foi à Belley : « Le souvenir de ces années de collège ne s’effaça jamais de son esprit et, jusqu’à l’âge le plus avancé, il aimait à redire quelle cordiale amitié l’avait uni à Lamartine et aussi quelle reconnaissance affectueuse il gardait à ses premiers maitres. »

Nous ignorons les raisons de son départ de Saint-Jean-de-Dieu en 1832 après seulement trois ans d'exercice, et ce qu'il fit ensuite, sinon qu'il est « pieusement décédé » à Lyon le 11 octobre 1874 « après avoir fourni dans la médecine une longue et heureuse carrière, durant laquelle il demeura toujours fidèle aux enseignement de sa jeunesse. » [Marius Dejey, Le séjour de Lamartine à Belley, 1901].

De ses quatre enfants, deux entreront dans les ordres, l'aîné, le R.P. Francisque Laboré dans la Compagnie de Jésus [Jésuites], un autre, le R.P. Amb. Laboré, fut provincial des Frères Prêcheurs à Lyon [Dominicains].

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Jean-Baptiste Carrier [1800-1872]

Jean-Baptiste naît le 13 novembre 1800 au Grand-Abergement (Ain) et décède le 20 octobre 1872 à Lyon (3e arrondissement). De son mariage le 24 juin 1829 avec Fleurie Lallemand 1808-1875 est issue une extraordinaire dynastie médicale lyonnaise aujourd'hui encore en exercice.

Il est le médecin de la maison pendant une quarantaine d'années, de 1832 à 1872.

Son collaborateur d'août 1835 à janvier 1842, Joseph Arthaud [1813-1883] a été nommé à l'âge de 22 ans au poste de suppléant de l'asile privé aussitôt après avoir soutenu sa thèse de médecine à Paris. Arthaud, grande figure de la psychiatrie lyonnaise du XIXème siècle, exerce ces fonctions de médecin adjoint semble-t-il jusqu'à sa nomination en janvier 1842 comme médecin adjoint du service des aliénés de l'Antiquaille alors dirigé par Alexandre Botte [1795-1849] [voir : Frédéric Scheider, Arthaud de Lyon. Aliéniste missionnaire, Glyphe éd., 2009].

En 1847, Jean-Baptiste Carrier, qui considérait qu'un asile unisexué est toujours préférable à un asile mixte même conçu dans une stricte séparation des sexes [Etudes statistiques..., 1841, p.6], fonde un asile privé pour femmes dans le même quartier du Moulin-à-Vent, et réserve la Maison des frères aux malades de sexe masculin : l’acquisition des terrains a lieu en avril 1847, et la maison, servie par les sœurs hospitalières de Saint-Vincent-de-Paul, accueille ses premières malades en 1848.

Cette Maison de Santé Saint-Vincent de Paul, que Jean-Baptiste Carrier dirigera jusqu'à sa mort, a été ensuite tenue par des médecins membres de sa famille -en premier lieu son fils Édouard, qui était déjà attaché à l'établissement [Annales médico-psychologiques 1865, II, p.530] -, d'où son autre dénomination de Maison de Santé des Docteurs Carrier. Elle est devenue la Clinique Saint-Vincent de Paul, qui a déménagé dans de nouveaux locaux en juillet 2019 dans des bâtiments appelés "Les Terrasses" sur le site de l'hôpital du Vinatier,et elle est toujours réservée exclusivement aux femmes.

Quant à la maison ou asile des Frères de Saint-Jean-de-Dieu, c'est Albert, son autre fils, qui lui succédera en 1872 comme médecin en chef.

Jean-Baptiste Carrier, qui a consacré sa vie au traitement médical des malades de ses deux maisons, a peu écrit.
On lui doit cependant des Études statistiques sur les aliénés traités dans l’asile de St-Jean-de-Dieu, près Lyon, pendant les années 1838, 1839 et 1840. Lyon, Savy Jeune éd., Paris, Baillière, 1841, où l'auteur apporte de précieux renseignements sur le fonctionnement de l'asile privé, et le partage des rôles entre le médecin et les frères hospitaliers : ce sont bien eux qui « s'appliquent à diriger avec soin le traitement moral et physique » des aliénés [Voir Guillemin, 2006, p.34], mais Carrier ajoute qu'il est « prescrit par le médecin » [p.9].

Sur la maison fondée en 1847, voir : Établissement de St-Vincent-de-Paule. Maison de santé spécialement consacrée aux femmes aliénées. Lyon, Dumoulin et Romet impr., vers 1848-1852.

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Albert Carrier [1841-1908]

Jean-Baptiste Albert, fils de Jean-Baptiste, naît à Lyon le 20 mai 1841, et y meurt le 12 novembre 1908. Il épouse Marcelle Pourcelot 1844-1924 le 24 août 1868. Deux de leurs fils, Georges et Henri, docteurs en médecine, exerceront dans la maison de santé.

Le 8 février 1872, Albert fut reçu au concours de médecin des hôpitaux de Lyon, et « lorsqu'il rentra chez lui après la dernière épreuve du concours pour les hôpitaux, il trouve son premier né » [Quelques mots à l'Assemblée générale du 26 juin 1909 de l'Association des médecins du Rhône [Lyon médical, 1909, pp.162-163], prénommé Georges et qui lui succède en 1908.

Quelques mois après avoir été nommé sur concours médecin des hôpitaux de Lyon le 8 février 1872, Albert voit disparaître son père, ce qui l'amène à devenir médecin chef de l’asile des Frères de Saint-Jean de Dieu (Hommes) à Lyon.

Interne des hôpitaux de Lyon, concours 1864, Albert poursuit des études à Paris où il est élève de Paul Broca [1824-1880], qui inspire sa thèse de doctorat soutenue en 1867, Etude sur la localisation dans le cerveau de la faculté du langage articulé.
Retour à Lyon, Albert apprend la médecine mentale sous la direction de son père.

En 1878, il est nommé médecin titulaire de l'hôpital de la Croix-Rousse [Lyon médical, 24 novembre 1878, p.460]. Début 1883, « M. Albert Carrier, en congé depuis un an, prend possession à l'hospice de l'Antiquaille du service des épileptiques et des maladies du système nerveux, que quitte M. le docteur Lacour, attaché à cet hospice depuis plus de 25 ans » [Lyon médical, 7 janvier 1883]. Ce service, qui était autrefois rattaché au quartier des aliénés et ne l'était plus depuis son transfert à l'asile de Bron, avait été maintenu comme service spécial des maladies nerveuses.

Il avait été professeur agrégé à la Faculté de médecine de Lyon -lors de sa création en 1877, suppléant du professeur Arthaud à l’asile de Bron. A l'Antiquaille, après Bottex, Arthaud, Lacour, il obéit « à la tradition du vieil hospice » et donne des conférences ayant pour objet l'étude clinique des maladies nerveuses, qui sont publiées. Mais il avait été décidé lors de sa création que ce service des maladies nerveuses entrait dans le roulement des services de médecine, et, en 1897, Albert Carrier, « arrivé au terme de ses fonctions » dut en abandonner la chefferie à Lannois [Lyon médical, 29 août 1897], ainsi que son enseignement. C'est cette année-là qu'il devint Chevalier de la Légion d'honneur.

Il est permis de penser que, dès lors, Albert Carrier recentra son activité sur son établissement, dont on sait qu'il s'agrandit de plusieurs unités d'hospitalisation en 1899.

Parmi ses publications :
Traduction avec ses propres notes de l'ouvrage de Gowers, De l'épilepsie et autres maladies convulsives chroniques

Leçons cliniques sur l'épilepsie et les troubles intellectuels qui l'accompagnent, faites à l'hospice de l'Antiquaille. Lyon, Mougin-Rusand, 1883

Communications aux Congrès des médecins aliénistes et neurologistes de France et des pays de langue française, Lyon 1891, Blois 1892, Toulouse 1897

Rapport au Congrès de Limoges, août 1901 (avec la collaboration de son fils Georges et du docteur Etienne Martin, médecins de la maison de santé de Saint-Jean-de-Dieu à Lyon) : Du délire aigu au point de vue Clinique, Anatomo-Pathologique et Bactériologique. Comptes Rendus, Paris, 1901, pp.249-311

Voir : « Funérailles du docteur Albert Carrier ». Lyon médical, 22 novembre 1908; 889-891
Voir également l'article nécrologique des Annales médico-psychologiques 1909, I, pp.156-158

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Georges Carrier [1872-1918]

Jean Joseph Georges, fils d'Albert Carrier, naît à Lyon, 2e arrondissement le 2 février 1872 et décède en son domicile du 192bis route de Vienne le 10 août 1918. Il a épousé le 6 février 1901 Jeanne Marie Louise Borne [1881-1969].

Externe puis interne provisoire des hôpitaux de Lyon, Georges Carrier est reçu au concours de 1897 interne en médecine des asiles de la Seine, et travaille deux annnées dans le service de Marcel Briand [1853-1927], alors à l'asile de Villejuif puis dans celui de Valentin Magnan [1835-1916], médecin en chef du bureau d'admission à l'asile Sainte-Anne, qui inspire son travail de thèse.

Dans cette thèse soutenue à Paris en 1899 et intitulée Contribution à l'étude des obsessions et des impulsions à l'homicide et au suicide chez les dégénérés au point de vue médico-légal, le docteur Carrier remercie ses maîtres lyonnais, le professeur Raymond Tripier [1838-1916] et le docteur Léon Bouveret [1850-1929], de l'Hôtel-Dieu, et tout naturellement Briand et Magnan.

Après avoir été plusieurs années « médecin adjoint à l'hospice de Saint-Jean-de-Dieu » [Lyon médical 1901, p.892], Georges succède à son père comme médecin en chef en 1908.

Il meurt en 1918, à l'âge de 46 ans [Lyon médical, janvier 1919, p.71-74] : mobilisé dès le début des hostilités, il sert trois ans sur le front et dans les ambulances de première ligne, puis à Grenoble et enfin à Lyon où il dirige les services des hôpitaux 197bis et 11bis. Il fut emporté par une maladie contagieuse, et en hommage posthume, le ministre de la Guerre lui remit la médaille de vermeil des épidémies... [Annales médico-psychologiques 1918, II, p.223]

C'est lui qui a donné son nom à la rue du docteur Carrier, à Lyon, qui donne Route de Vienne..

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Francis Devay [1865-]

Stanislas Francis, fils de Jean-Baptiste Devay, docteur médecin et de Marie Amélie Poulin est né à Chaponost, lieu de la Côte de l'Air (Rhône) le 1er juillet 1865. Il merd son père à l'âge de vingt ans, et s'engage dans des études de médecine.

Interne provisoire des Hôpitaux de Lyon, il est nommé interne titulaire en médecine de l’asile de Bron au concours du 1er décembre 1890, et choisit le service du Pr Pierret.

Il est reçu docteur le 27 juillet 1892, avec une thèse portant le titre de Contribution à l'étude de la dilatation de l'estomac et des troubles psychiques qu'elle provoque. Etude de pathologie nerveuse et mentale. Il y remercie le professeur Auguste Pierret [1845-1920], François Brun [1854-] et ses collègues internes à Bron André Viallon [1867-1921] et Louis Paret [-1892], ainsi qu'Hippolyte Royet [-1923], ancien interne de Bron et chef de clinique des maladies mentales. Quatre mois plus tard, en novembre, il est nommé au concours Chef de clinique des maladies mentales à la Faculté de médecine de Lyon.

En 1897, il devient Médecin chef adjoint de la Maison de Santé des Frères de Saint-Jean-de-Dieu, et en 1901 l'un de ses médecins en chef [Lyon médical 1901, p.892], Georges Carrier étant médecin adjoint.

En 1900, tandis que Devay a pris la direction de l’Echo médical de Lyon, il est victime d'une violente agression : frappé dans l’abdomen d’un tire-point par un malade travailleur de l’atelier de menuiserie qu’il venait de vacciner contre la variole, Devay est sauvé par le docteur Mathieu Jaboulay [1860-1913], chirurgien de l'Hôtel-Dieu de Lyon et grand spécialiste de la chirurgie digestive.


Médecin aliéniste grièvement blessé par un de ses malades

« Un médecin aliéniste vient encore de payer de son sang et, bien peu s’en est fallu, de sa vie, son dévouement à ses malades.
Le Dr Francis Devay, médecin-adjoint à l’asile des Frères de Saint- Jean-de-Dieu a Lyon, charge du service pendant une absence du médecin en chef, M. le Carrier, a été mortellement frappé par un de ses malades, au moment même où il cherchait à le protéger. En raison de l’épidémie de variole qui régnait à Lyon il y a quelques semaines, il avait dû procéder à la vaccination de tout l’établissement et, le 22 janvier dernier, il venait de vacciner un persécuté nomme Claude J..., âgé de cinquante-deux ans, originaire de la Loire, département pour lequel l’asile Saint-Jean-de-Dieu fait office d’asile public, lorsque ce malade, qui s’était laisse opérer sans mot dire, se précipita sur lui et lui porta au ventre un violent coup de tire-point en criant : « Voilà pour toi ! »

Le Dr Devay eut l’énergie et le sang-froid de se rendre a l'infirmerie, de prendre toutes les mesures nécessaires pour prévenir avec ménagement sa jeune femme, car il est marié et père d’un tout jeune enfant, et fit appeler en toute hâte le Dr Jaboulay, chirurgien des hôpitaux, qui accourut aussitôt.

Le tire-point, sorte de lime triangulaire à pointe effilée, avait pénétré à travers les vêtements, avec la force d’une baïonnette, et perforé la paroi abdominale un peu en dehors et a gauche de la ligne blanche, et à 4 centimètres environ au-dessous de l’ombilic, atteignant l’intestin grêle. Une hémorragie assez forte avait fait tumeur dans la fosse iliaque gauche. Le Dr Jaboulay fit transporter notre malheureux confrère à l'Hôtel-Dieu et, à deux heures de l’après-midi, il pratiquait une laparotomie d’urgence, intervention limitée par l’état de shoc extrême du blessé, arrêtait l’hémorragie et plaçait deux drains dans la plaie. Pendant cinq jours, notre confrère a été entre la vie et la mort. Mais, grâce aux soins dévoués du Dr Jaboulay, à ceux de sa femme, qui ne l’a quitté ni jour ni nuit, de ses amis et de ses parents qui se sont relayés à son chevet pour lui éviter tout mouvement dangereux, grâce aussi à sa vigoureuse constitution, la péritonite ne s’est pas généralisée ; il s’est établi des adhérences et une fistule qui tend aujourd’hui à l’oblitération.

Le fou assassin était un persécuté, assez tranquille jusque-là, et qu’on avait cru pouvoir employer dans un atelier de menuiserie, ce qui explique qu’il ait eu en sa possession la lime dont il s’est servi. Une enquête a demontré sa complète irresponsabilité.

Le Dr Devay, ancien interne de l’asile de Bron, ancien chef de clinique des maladies mentales à la Faculté de médecine de Lyon, directeur de l'Echo médical de Lyon, est médecin-adjoint de Saint-Jean-de-Dieu depuis plusieurs années.
Actuellement âgé de trente-quatre ans, il ne compte à Lyon que des amis et est bien connu du monde médical aliéniste, car il a été secrétaire au Congrès de Clermont-Ferrand et a publié à ce titre le volume des travaux de ce Congrès. Nous sommes heureux de lui adresser nos vives félicitations pour avoir échappé de cette façon à une mort imminente et lui présentons nos vœux de prompt et entier rétablissement. — Th. Taty. »
[Annales médico-psychologiques 1900, n°11, pp.336-337].

En 1914, un service sanitaire militaire est installé dans l'établissement, sous le nom d'Hôpital n°111, dont Devay est le médecin chef : « HÔPITAL N° 111. — Missions africaines, établissement des Sauterelles. Rue Ernest-Renan, à Vénissieux (Rhône). Annexe Albert Carrier, 144, route de Vienne. Administrateur : M. Fayolle de Mans ; directrice : Sœur Rogatien ; médecin en chef : M. Devay ; médecins : MM. Balvay, Carrier. Nombre de lits : 100. » [Lyon médical 1914 p.346]

En 1939, atteint par la limite d'âge, il est remplacé par Mathon. Cependant, du fait de la mobilisation de son successeur, il est maintenu en activité.

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Henri Carrier [1875-1930]

Marie Auguste Henri, fils d'Albert Carrier, est né le 15 novembre 1875 à Lyon (2e), et décédé le 22 mai 1930 à Lyon (7e)


Interne des hôpitaux de Lyon et Préparateur Adjoint d'anatomie pathologique à la Faculté, il y soutient sa thèse en 1904, La cellule nerveuse normale et pathologique. Altérations histologiques des centres nerveux dans les délires toxi-infectieux des alcooliques, le delirium tremens et le délire aigu, et devient médecin directeur de la maison de santé de Saint-Vincent de Paul fondée par son grand-père Jean-Baptiste.


Il succède à son frère Georges en 1918 comme médecin-chef de l'asile privé d'aliénés de Saint-Jean-de-Dieu à Lyon, où il exerce jusqu'à son décès [Lyon médical, 1er juin 1930; p.744].

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Édouard Larrivé [1900-1992]

Édouard Félix Armantaire, fils de Félix Armantaire Larrivé, docteur en médecine et de Marie Victorine Gailly, est né à Meyzieu le 20 juin 1900, et décédé le 17 février 1992. Il a épousé Paulette Devay [1903-1992] le 26 février 1927 à Lyon (7e), que nous supposons être la fille de Francis Devay.

Édouard est reçu docteur en médecine à Lyon en 1928, avec une thèse intitulée Contribution à l'étude des confusions mentales récidivantes.

Après son Clinicat à Lyon, il est nommé médecin du cadre au concours de 1929, et devient l’année suivante Médecin-chef de la maison de santé Saint-Jean-de-Dieu en remplacement d’Henri Carrier. Il y exerce jusqu'à sa retraite en 1970.


Le père d'Édouard, prénommé Félix, ancien interne de l'asile d'Albigny (Rhône), avait été reçu docteur à Lyon avec une thèse intitulée Des accidents nerveux consécutifs aux traumatismes, leur nature et leurs conséquences au point de vue médico-légal. Il était le beau-frère d'Antoine Courjon, de la Clinique du même nom, et son associé en 1897 dans la Société Etablissement médical Courjon et Larrivé. Fin 1914 est installé à Meyzieu un centre de santé militaire dit « HÔPITAL N° 109. — Établissement Courjon. A Meyzieu (Isère). Directrice : Mme Larrivé ; médecin en chef : M. Larrivé ; médecin : M. Nicolas. Nombre de lits : 20. » [Lyon médical 1914 p.346].

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André Mestrallet [1902-1992]

André Georges Barthélémy, fils de François-Joseph Mestrallet 1868-1922 et de Jeanne Honorine Minot Ballet 1877-1961, est né à Lyon (2e) le 24 mars 1902, et décédé à Lyon (6e) le 8 octobre 1992.

Il épouse le 4 août 1926 Marcelle Carrier, fille de Georges, née à Lyon le 12 janvier 1905, décédée à Saint-Cyr-au-Mont-d’Or le 4 septembre 1995 : Mestrallet est donc membre par alliance de la dynastie Carrier.

Docteur en 1929, reçu 7e au concours du médicat 1930, le docteur Mestrallet est donc lui aussi médecin du cadre des asiles. Nommé le 20 juin 1930 médecin-chef à Saint-Jean-de-Dieu (3e poste créé), il restera quarante-deux ans en fonctions dans le même établissement, prenant sa retraite en 1972.


Entre autres publications, Mestrallet est l'auteur de :
(avec Louis Bériel) Les compressions médullaires. Cliniques de l'Hôpital St Pothin, vol.I. Paris, Baillière, 1929, 193 p. [Saint-Pothin est le nom ancien de l'hospice de l'Antiquaille]
(avec Maurice Péhu) « Essai nosologique sur la Pseudo-paralysie de Parrot ». La Presse médiclae n°51, 26 juin 1929
- « Contribution à l'étude du traitement du délire aigu par les injections intra-veineuses d'électrago »l. Société nationale de Médecine et des Sciences médicales, séance du 17 juin 1931. Lyon médical, 22 novembre 1931, n°46; 611-614 et (suite, pas en 1931)
- (avec E. Larrivé) « Essai de traitement des accès maniaques par l'hyposulfite de magnésium ». Lyon médical, 6 mars 1932, 149, 10 ; 287-288 (ou 281- ?)
- (avec E. Larrivé) « La pyrétothérapie dans le traitement des maladies mentales, paralysie générale exceptée ». Lyon Médical, CLIII, n°16, 22 avril 1934 [résumé in La Presse médicale 1934, 202-203]
- (avec E. Larrivé) « De l'utilité du repérage ventriculaire dans certains troubles psychiques ». Congrès des médecins aliénistes et neurologistes ... Lyon, 1934, pp.289-292
- (avec E. Larrivé) « Psychose coli-bacillaire avec pyélonéphrite évoluant depuis plusieurs semaines. Guérison par la sérothérapie ». Congrès des médecins aliénistes et neurologistes ... Lyon, 1934, pp.467-470
- (avec A. Arthus, R. Biot, L. Corman, A. Peyeux, J. Froment, R.P. Jacquet, A. Jouve, G. Mouriquand, M. Péhu) Médecine et éducation. Problèmes médico-psychologiques, par le Groupe lyonnais d'études médicales, philosophiques et biologiques. Paris, Ed. Spes, 1947 [Collection Convergences, n°2]

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René Mathon [1909-1942]

Né à Privas (Ardèche), René Mathon fait ses études de médecine à Lyon et trouve matière à sa thèse à la Clinique neurologique et psychiatrique du Professeur Lépine, et la soutient à Lyon en 1935, sous le titre : Contribution à l'étude des formes mentales des tumeurs cérébrales.

Reçu 11ème au concours du médicat en juin 1939, il est nommé par arrêté du 23 août 1939 en remplacement du docteur Devay, atteint par la limite d'âge.

Cependant, peu après, Mathon est mobilisé comme médecin-lieutenant, et assure le service médical de la Compagnie de l'Air 122-105 [L'Aliéniste français 1940, p.212], à l'aérodrome de Lézignan-Corbières,et Devay est naturellement amené à prolonger ses activités.

Décédé fin 1942, il est remplacé dans ses fonctions de médecin-chef de la maison par Jean Carrier.

On a de lui :
- (avec Henry-Ed. Christy et Paul Balvet, de Lyon) « Localisations viscérales tuberculeuses et guérisons psychopathiques ». Congrès des médecins aliénistes et neurologistes de France et des pays de langue française, Lyon 1934, pp.320-323

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Jean Carrier [1912-1984]

Jean Charles Georges, fils d'Henri et de Marie Pauline Audry, est né à Lyon (3e) le 1er avril 1912, et meurt à Lyon (8e) le 1er octobre 1984. Il épouse à Lyon le 20 novembre 1939 Paulette Simonne Maria Brunet [1912-2001].

En 1938, il est reçu 4e au concours de l'internat des Hôpitaux Psychiatriques de la Seine (promotion de Sven Follin, Henri Duchêne, Léon Fouks, Lucien Bonnafé, etc.], puis dès l'année suivante, en juin 1939, reçu 8e au concours du médicat.

Et, « par arrêté en date du 9 décembre 1942, M. le docteur Carrier est nommé médecin chef de service à l'asile privé de Saint-Jean-de-Dieu (Rhône), en remplacement de M. le docteur Mathon décédé » [J.O. du 19 décembre 1942, p.4160]

Il exercera les fonctions de médecin-chef de l'hôpital psychiatrique privé jusqu'en 1977, année où il prend sa retraite.

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Christiane Péchiné [1941]

Christiane Pelotat, épouse Péchiné, est née le 2 février 1941.

En 1968, elle soutient sa thèse de médecine à Dijon, Le facteur Ethnique dans les Névroses Traumatiques [Lyon, Bosc Frères impr., 1968], puis est reçue au médicat, concours 1968 (retardé à 1969). A partir de 1969, elle exerce comme médecin-chef d'un service de pédopsychiatrie.

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Jean-Pierre Vignat [1940]

Jean-Pierre Vignat est né le 9 février 1940.

Reçu au concours du médicat en 1968 (retardé à 1969), le docteur Vignat est nommé médecin-chef de l'établissement en 1970.

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Quelques références bibliographiques
sur l'Ordre de Saint-Jean de Dieu, ses établissements hospitaliers, ses médecins

Mohamed Attia, « Prendre soin par la culture. La fresque de Saint-Jean-de-Dieu ». Vie Sociale et Traitements 2005/4, n°88, pp.54-57

Joseph Barou, « Epidémie chez les frères de Saint-Jean-de-Dieu de Savigneux ». Village de Forez, octobre 2003, n°95-96, pp.18-23 [épidémie meurtrière de typhus en 1825]

Henri Bonnet, Histoire de la psychiatrie à Lyon. De l'Antiquité à nos jours. Meyzieu, Césure éd., 1988

Jacques Fleury, Les établissements de bienfaisance lyonnais entre 1827 et 1832. Mémoire de Diplôme d'Études Supérieures d'Histoire, Lyon, 1950, 312 p. dactyl.

Hervé Guillemin, Diriger les consciences, guérir les âmes. Une histoire comparée des pratiques thérapeutiques et religieuses (1830-1939). Paris, La Découverte, coll. L'espace de l'histoire, 2006 [L'auteur a exploité notamment les archives de l'ordre de Saint-Jean-de-Dieu, conservées à Paris]

Hervé Guillemain, « Médecine et religion au XIXe siècle. Le traitement moral de la folie dans les asiles de l'ordre de Saint-Jean de Dieu ». Le Mouvement Social 2006/2, n°215, pp.35-49

Anne Marescaux, Vie et mort dans les hôpitaux psychiatriques pendant la Seconde Guerre mondiale : l'exemple de Saint-Jean-de-Dieu. Mémoire de maîtrise d'histoire, Lyon 2, 2001

Marc Masson, Soins et assistance prodigués aux aliénés par les frères de Saint Jean de Dieu dans la France du XVIIIe siècle. Pour une contribution à la réflexion sur la place de l'humanisme dans la pratique psychiatrique. Thèse de doctorat en médecine, Bordeaux II, 1999

Élisa Vial, Accueillir et soigner les aliénés avant la loi de 1838. L’exemple de la Maison de santé Saint-Pierre et Saint-Paul à Lyon 1824-1840. Lyon, Université Jean Moulin (Lyon 2), 2019, sous la dir. d'Isabelle von Bueltzingsloewen. Mémoire soutenu le 19 juin 2019

Site de l'Ordre hospitalier de Saint-Jean-de-Dieu

Site généalogique d'Alexandre Bouffier [pour les renseignements concernant la famille Carrier)

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Michel Caire, 2023
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