Projets
et discussions préparatoires à la loi du 30 juin 1838
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Enquête
du 25 juin 1836. Questions relatives aux aliénés |
Ière
SÉRIE 1° Quel est le
nombre des aliénés secourus dans des établissements
spéciaux ? IIe SÉRIE 1° Quelle est la
nature de chaque établissement ? est-il spécial ou mixte,
c'est-à-dire exclusivement consacré, ou non, aux aliénés
? IIIe SÉRIE 1° Un médecin
est-il spécialement attaché à l'établissement
? Y loge-t-il ? |
Projet de loi déposé par le Gouvernement (6 janvier 1837) |
ARTICLE PREMIER Nul individu atteint d'imbécillité, de démence ou de fureur, dont l'interdiction n'aura pas été prononcée, ne pourra, sous les peines portées par l'article 120 du Code pénal, être placé ou retenu dans aucun hospice ou autre établissement public ou privé affecté au traitement de l'aliénation mentale, qu'en vertu d'une autorisation ou d'un ordre du préfet. ARTICLE 2 L'autorisation sera délivrée sur la demande des parents
ou de l'époux. ARTICLE 3 En cas de danger imminent, attesté par le certificat d'un médecin ou par la notoriété publique, le maire pourra ordonner, à l'égard des individus désignés dans l'article 1er, les mesures provisoires qui seraient nécessaires, sauf à en référer dans les vingt-quatre heures au préfet, qui statuera sans délai dans les formes indiquées par l'article précédent. ARTICLE 4 Tout individu placé en vertu des articles précédents
dans les établissements qui y sont désignés n'y sera
plus retenu dès que les causes du placement auront cessé. ARTICLE 5 Toute autorisation ou ordre délivrés en vertu des articles
1er et 2 sont, dans les trois jours, notifiés administrativement
par le préfet : ARTICLE 6 Indépendamment des cas prévus par l'article 491 du Code
civil, le procureur du roi, sur la demande du préfet, provoquera
l'interdiction de tout individu placé, en vertu d'un ordre délivré
d'office, dans un hospice ou établissement d'aliénés,
comme atteint d'imbécillité, de démence ou de fureur. ARTICLE 7 Tous les établissements publics et privés où sont reçus les aliénés, sont placés sous la surveillance de l'autorité administrative ; les préfets, les procureurs du roi et ceux des membres de la commission instituée par l'article 2 de la présente loi qui seraient délégués par les préfets, doivent être admis à les inspecter toutes les fois qu'ils s'y présentent. ARTICLE 8 Aucun établissement destiné au traitement de l'aliénation mentale ne pourra se former sans l'autorisation du Gouvernement. Aucun établissement consacré au traitement des diverses malades ne pourra recevoir des individus atteints d'imbécillité, de démence ou de fureur, s'il n'a été préalablement autorisé par le Gouvernement à traiter cette espèce de maladie. ARTICLE 9 Les hospices et autres établissements publics désignés en l'article 1er sont tenus de recevoir les individus qui leur sont adressés, en vertu d'un ordre de placement délivré conformément aux articles 1er, 2 et 3 de la présente loi. ARTICLE 10 Il sera tenu, dans chacun des établissements désignés par la présente loi, un registre spécial indiquant les noms et domiciles des individus placés en vertu de la présente loi, l'ordre d'admission, l'époque de l'entrée et celle de la sortie. ARTICLE 11 Des règlements d'administration publique détermineront les conditions auxquelles seront accordées les autorisations énoncées dans l'article 9, les cas où elles pourront être retirées, et les obligations auxquelles seront soumis les établissements autorisés. ARTICLE 12 Les contraventions aux dispositions des articles 8 et 10 de la présente
loi et aux règlements rendus en vertu de l'article précédent
seront punies d'un emprisonnement d'un an et d'une amende de 50 à
3 000 F. ARTICLE 13 La dépense de l'entretien, du séjour et du traitement des
individus placés en vertu de l'article 9 de la présente
loi, dans les établissements désignés par cet article,
leur sera personnelles ; à défaut, à la charge de
ceux auxquels il peut être demandée des aliments, aux termes
des articles 205 et suivants du Code civil. ARTICLE 14 A défaut ou en cas d'insuffisance des ressources énoncées dans l'article précédent, il sera pourvu à cette dépense sur les centimes variables du département, sans préjudice du concours de la commune du domicile des aliénés et des hospices, d'après les bases proposées par le conseil général sur l'avis des préfets, et approuvées par le Gouvernement. |
Projet de loi amendé par la Commission de la Chambre des Députés (1) |
TITRE PREMIER (Art. 7 du Gouvernement) - Les établissements publics consacrés aux aliénés sont placés sous l'autorité du Gouvernement. § 2 - Des établissements privés (Art. 7 du Gouvernement) - Les établissements publics consacrés
aux aliénés sont placés sous l'autorité du Gouvernement. ARTICLE 3 (Art. 8 du Gouvernement) - Nul ne pourra diriger ni former aucun établissement
privé, consacré aux aliénés, sans l'autorisation
du Gouvernement. ARTICLE 4 (Art. 11 du Gouvernement) - Des règlements d'administration publique détermineront les conditions auxquelles seront accordées les autorisations énoncées en l'article précédent, les cas où elles pourront être retirées, et les obligations auxquelles seront soumis les établissements autorisés. TITRE II (Art. 1 et 2 du Gouvernement) - Les chefs, directeurs ou préposés
responsables des établissements désignes dans les articles
1 et 2, lorsqu'ils recevront une personne atteinte d'aliénation mentale,
se feront remettre : 1° Une demande d'admission, écrite et signée
par la personne qui fera effectuer le placement, et, si cette personne ne
sait écrire, reçue par le maire ou le commissaire de police,
chargé d'en donner acte ; 2° Un certificat de médecin
constatant l'état mental, de la personne à placer, et indiquant
les particularités de sa maladie et ses causes, si elles sont connues.
Ce certificat devra avoir été délivré quinze
jours au plus avant sa remise ; 3° L'acte de naissance, le passeport
ou toute autre pièce propre à constater l'individualité
de cette personne ; 4° S'il existe un jugement d'interdiction, un extrait
de ce jugement. ARTICLE 6 Dans les trois jours de la réception du bulletin, le préfet chargera un ou plusieurs hommes de l'art de visiter la personne désignée dans ce bulletin, à l'effet de constater son état mental et d'en faire rapport sur-le-champ. ARTICLE 7 (Art. 5 du Gouvernement) - Dans le même délai, le préfet notifiera administrativement les noms, profession et domicile de la personne placée et les causes du placement : 1° Au procureur du Roi de l'arrondissement de la situation de l'établissement. ARTICLE 8 (Art. 4 du Gouvernement) - Sauf l'exception portée par l'article 14, toute personne placée dans un établissement d'aliénés cessera d'y être retenue aussitôt que les médecins estimeront que la guérison est obtenue, ou que sa famille demandera qu'elle lui soit rendue. ARTICLE 9 Dans les vingt-quatre heures de la sortie, les chefs, directeurs ou préposés responsables de l'établissement en donneront avis aux autorités désignées dans le dernier paragraphe de l'article 5. ARTICLE 10 Le préfet pourra toujours ordonner la sortie immédiate des personnes placées dans les établissements d'aliénés. § 2 - Des placements ordonnés par l'autorité publique
(Art. 1 et 2 du Gouvernement) - Le préfet de police à Paris, et dans les départements les préfets, pourront ordonner d'office le placement dans un établissement public d'aliénés de toute personne, interdite ou non interdite, dont l'état d'aliénation compromettrait la sûreté publique. ARTICLE 12 (Art. 3 du Gouvernement) - En cas de danger imminent, attesté par le certificat d'un médecin ou par la notoriété publique, les commissaires de police de Paris et les maires dans les départements pourront ordonner, à l'égard des personnes atteintes d'aliénation mentale, toutes les mesures provisoires nécessaires, à la charge d'en référer dans les vingt-quatre heures au préfet, qui statuera sans délai. ARTICLE 13 (Art. 4 du Gouvernement, dernier paragraphe) - Aucun ordre de placement
ne pourra avoir d'effet pour plus de six mois. ARTICLE 14 Le préfet pourra décerner, à l'égard des personnes
placées dans des établissements d'aliénés, conformément
à l'article 5, et dont l'état mental pourrait compromettre
la sûreté publique, un ordre spécial à l'effet
d'empêcher qu'elles ne sortent de l'établissement sans son
autorisation, si ce n'est pour être placées dans un autre établissement. ARTICLE 15 (Art. 5 du Gouvernement) Les procureurs du Roi seront informés
de tous les ordres donnés en vertu des articles précédents,
dans les formes et délais énoncés en l'article 7. ARTICLE 16 (Art. 9 du Gouvernement) Les établissements publics d'aliénés
sont tenus de recevoir les personnes qui leur sont adressées en vertu
d'un ordre de placement donné par le préfet. ARTICLE 17 (Art. 4 du Gouvernement, 2e paragraphe) Aussitôt que les médecins estimeront que la sortie peut être ordonnée, il en sera référé au préfet, qui statuera sans délai. ARTICLE 18 (Art. 13 du Gouvernement) La dépense du transport, de l'entretien,
du séjour et du traitement des personnes placées dans les
hospices ou les établissements publics d'aliénés, en
vertu d'un ordre du préfet, sera à la charge de ces personnes
; à défaut, à la charge de ceux auxquels il peut être
demandé des aliments, aux termes des articles 205 et suivants du
Code civil. ARTICLE 19 (Art. 14 du Gouvernement) A défaut ou en cas d'insuffisance
des ressources énoncées en l'article précédent,
il sera pourvu à cette dépense sur les centimes variables
du département, sans préjudice du concours de la commune du
domicile de l'aliéné, d'après les bases proposées
par le conseil général, sur l'avis du préfet, et approuvées
par le Gouvernement. § 3 - Dispositions communes à toutes les personnes placées
dans les établissements publics (Art. 4 du Gouvernement) Les chefs, directeurs ou préposés
responsables ne pourront, sous les peines portées par l'article 120
du Code pénal, retenir une personne placée dans un établissement
d'aliénés, dès que les causes du placement auront cessé
d'exister. ARTICLE 21 Les commissions administratives des hospices ou établissements d'aliénés
exerceront, à l'égard des personnes non interdites qui y seront
placées, les fonctions de tutelle établies à l'égard
des enfants admis dans les hospices par l'article 1er de la loi du 15 pluviôse
an XIII : cette tutelle sera gratuite, et garantie conformément à
l'article 5 de la même loi. ARTICLE 22 Sur la demande des parents, de l'époux ou de l'épouse, ou sur la provocation d'office du procureur du Roi, le président du tribunal civil pourra nommer un administrateur provisoire aux biens de toute personne non interdite placée dans un établissement privé, ou dans un établissement public, non dirigés par une commission administrative. ARTICLE 23 Le président, à la requête de la partie la plus diligente, commettra un notaire pour représenter les personnes énoncées en l'article précédent, dans les inventaires, comptes, partages et liquidations dans lesquelles elles seraient intéressées. ARTICLE 24 Les pouvoirs conférés en exécution des articles précédents cesseront de plein droit dès que la personne placée dans un établissement d'aliénés cessera d'y être retenue. ARTICLE 25 Si la personne décède dans l'établissement sans que son interdiction ait été prononcée ni provoquée, les actes qu'elle aura faits pendant qu'elle y était retenue pourront être attaqués pour cause de démence, nonobstant la disposition de l'article 504 du Code civil. TITRE III (Art. 12 du Gouvernement) - Les contraventions aux dispositions des articles
3, 5 et 14 de la présente loi, et aux règlements rendus en
vertu de l'article 4, seront punies d'un emprisonnement de 5 jours à
un an, et d'une amende de 50 fr. à 3 000 fr., ou de l'une ou de l'autre
de ces peines. |
Projet de loi amendé par la Commission de la Chambre des Pairs (1) |
TITRE
PREMIER Chaque département sera tenu d'avoir un établissement public
destiné à recevoir les aliénés, ou de traiter
avec un établissement public ou privé, qui s'engagera à
les recevoir. ARTICLE 2 Les établissements publics consacrés aux aliénés sont placés sous l'autorité du Gouvernement. ARTICLE 3 Les établissements privés consacrés aux aliénés sont placés sous la surveillance de l'autorité administrative. ARTICLE 4 Le préfet et les personnes par lui spécialement déléguées
à cet effet, le président du tribunal, le procureur du Roi,
le juge de paix, et le maire de la commune, sont chargés de visiter
les établissements consacrés aux aliénés,
de recevoir les réclamations des personnes qui y sont placées,
et de prendre à leur égard tous les renseignements propres
à éclairer leur religion. Ils doivent être admis toutes
les fois qu'ils se présentent. ARTICLE 5 Nul ne pourra diriger ni former aucun établissement privé,
consacré aux aliénés, sans l'autorisation du Gouvernement. ARTICLE 6 Des règlements d'administration publique détermineront les conditions auxquelles seront accordées les autorisations énoncées en l'article précédent, les cas où elles pourront être retirées, et les obligations auxquelles seront soumis les établissements autorisés. TITRE II DES PLACEMENTS FAITS DANS LES ÉTABLISSEMENTS D'ALIÉNÉS Les chefs, directeurs ou préposés responsables des établissements
désignés dans les articles 2 et 3, lorsqu'ils recevront
une personne atteinte d'aliénation mentale, se feront remettre
: 1° Une demande d'admission écrite et signée par la
personne qui fera effectuer le placement, et visée par le maire
ou le commissaire de police. Si cette personne ne sait écrire,
sa demande sera reçue par le maire ou le commissaire de police,
chargé d'en donner acte. ARTICLE 8 En cas de placement dans un établissement privé, et dans les trois jours de la réception du bulletin, le préfet chargera un ou plusieurs hommes de visiter la personne désignée dans ce bulletin, à l'effet de constater son état mental et d'en faire un rapport sur-le-champ. Il pourra leur adjoindre telle autre personne qu'il désignera. ARTICLE 9 Dans le même délai, le préfet notifiera administrativement les noms, profession et domicile de la personne placée et les causes du placement : 1° Au procureur du Roi de l'arrondissement du domicile de cette personne ; 2° Au procureur du Roi ; 3° Au juge de paix et au maire du lieu de la situation de l'établissement, s'il s'agit d'un placement effectué dans un établissement privé. ARTICLE 10 Quinze jours après le placement d'une personne dans un établissement public ou privé, il sera adressé au préfet, conformément au dernier paragraphe de l'article 7, un nouveau certificat du médecin de l'établissement, dans lequel celui-ci constatera de nouveau, et rectifiera, s'il y a lieu, les observations contenues dans le premier certificat qu'il aura délivré, en indiquant la cause de la maladie, si elle est connue, le retour plus ou moins fréquent des accès et constatant les actes de démence commis par l'aliéné. ARTICLE 11 Il y aura dans chaque établissement un registre coté et
paraphé par le juge de paix et le maire, sur lequel seront immédiatement
inscrits les noms, profession, domicile des personnes placées dans
les établissements, la date de leur placement, l'ordre de l'autorité
qui l'aura requis, ou les noms, profession, qualité et demeure
de la personne parente ou non parente qui l'aura demandé. ARTICLE 12 Toute personne placée dans un établissement d'aliénés
cessera d'y être retenue aussitôt que les médecins
de l'établissement estimeront que la guérison est obtenue,
ou que sa sortie sera requise, soit par sa famille, soit par la personne
qui aura signé la demande d'admission. ARTICLE 13 Dans les vingt-quatre heures de la sortie, les chefs, directeurs ou préposés
responsables de l'établissement en donneront avis aux fonctionnaires
désignés dans le dernier paragraphe de l'article 7. ARTICLE 14 Le préfet pourra toujours ordonner la sortie immédiate des personnes placées dans les établissements d'aliénés. SECTION 2 Le préfet de police, à Paris, et dans les départements,
les préfets ordonneront d'office le placement dans un établissement
d'aliénés, de toute personne interdite ou non interdite,
dont l'état d'aliénation compromettrait la sûreté
publique. ARTICLE 16 En cas de danger imminent, attesté par le certificat d'un médecin ou par la notoriété publique, les commissaires de police à Paris, et les maires dans les départements, ordonneront, à l'égard des personnes atteintes d'aliénation mentale, toutes les mesures provisoires nécessaires, à la charge d'en référer dans les vingt-quatre heures au préfet, qui statuera sans délai. ARTICLE 17 Les chefs et directeurs responsables des établissements seront
tenus d'adresser aux préfets, dans le premier mois de chaque semestre,
un rapport, rédigé par le médecin de l'établissement,
sur l'état de chaque personne qui y sera retenue, sur la nature
de la maladie et sur les résultats du traitement. ARTICLE 18 Le préfet pourra décerner, à l'égard des personnes
placées dans les établissements d'aliénés,
conformément à l'article 7, et dont l'état mental
pourrait compromettre la sûreté publique, un ordre spécial
à l'effet d'empêcher qu'elles ne sortent de l'établissement
sans son autorisation, si ce n'est pour être placées dans
un autre établissement. ARTICLE 19 Les procureurs du Roi seront informés de tous les ordres donnés
en vertu des articles précédents, dans les formes et délais
énoncés en l'article 9. ARTICLE 20 Aussitôt que les médecins estimeront que la sortie peut être ordonnée, les chefs ou préposés responsables des établissements seront tenus, sous peine d'être poursuivis, conformément à l'article 23 ci-après, d'en référer aussitôt au préfet, qui statuera sans délai. ARTICLE 21 Les hospices et hôpitaux civils sont tenus de recevoir provisoirement
les personnes qui leur sont adressées, en vertu des articles 13
et 14, jusqu'à ce qu'elles soient dirigées sur l'établissement
spécial destiné à les recevoir, aux termes de l'article
1er, ou pendant le trajet qu'elles font pour s'y rendre. ARTICLE 22 La dépense du transport, de l'entretien, du séjour et du
traitement des personnes placées dans les hospices ou les établissements
publics d'aliénés, sera réglée d'après
un tarif arrêté par le préfet. ARTICLE 23 A défaut, ou en cas d'insuffisance des ressources énoncées
en l'article précédent, il sera pourvu à cette dépense
sur les centimes variables du département auquel l'aliéné
appartient, sans préjudice du concours de la commune du domicile
de l'aliéné, d'après les bases proposées par
le conseil général, sur l'avis du préfet, et approuvées
par le Gouvernement. ARTICLE 24 Des règlements d'administration publique détermineront, en se référant aux règles prescrites par la présente loi, les conditions auxquelles les aliénés indigents qui ne compromettraient point la sûreté publique devront être admis dans les établissements, où ils seront traités aux frais des départements et des communes. SECTION 3 Toute personne placée ou retenue dans un établissement d'aliénés,
tout parent de cette personne, au degré successible ; son curateur,
s'il lui en a été nommé un, conformément à
l'article 28 ci-après ; à défaut, tout ami, peuvent,
à quelque époque que ce soit, se pourvoir devant le tribunal
qui, après les vérifications nécessaires, ordonne,
s'il y a lieu, la sortie immédiate. ARTICLE 26 Les chefs, directeurs ou préposés responsables ne pourront, sous les peines portées par l'article 120 du Code pénal, retenir une personne placée dans un établissement d'aliénés, dès que sa sortie aura été ordonnée par le préfet, aux termes de l'article 14, ou par le tribunal, aux termes de l'article 25, ou que cette personne se trouvera dans les cas énoncés en l'article 10. ARTICLE 27 Les commissions administratives ou de surveillance des hospices ou établissements
d'aliénés exerceront, à l'égard des personnes
non interdites qui y seront placées, les fonctions d'administrateurs
provisoires, conformément à l'article 497 du Code civil.
Elles désigneront un de leurs membres pour les remplir. L'administrateur
ainsi désigné fera le recouvrement des sommes dues à
l'aliéné, paiera les dettes, passera les baux, s'il y a
lieu ; il pourra même, en vertu d'une autorisation spéciale
accordée par le président du tribunal civil, faire vendre
le mobilier appartenant à l'aliéné. ARTICLE 28 Sur la demande des parents, de l'époux ou de l'épouse, ou
sur la provocation d'office du procureur du Roi, le président du
tribunal civil pourra nommer un administrateur provisoire aux biens de
toute personne non interdite placée dans un établissement
privé ou dans un établissement public, non dirigé
par une commission administrative ou de surveillance. Cet administrateur
exercera tous les pouvoirs énoncés à l'article 24. ARTICLE 29 Les significations à faire à une personne placée dans un établissement d'aliénés devront, à peine de nullité, être faites au domicile de l'administrateur provisoire, ou, à défaut d'administrateur provisoire, à la personne du chef, directeur ou préposé responsable qui visera l'original. ARTICLE 30 A défaut d'administrateur provisoire, le président, à la requête de la partie la plus diligente, commettra un notaire pour représenter les personnes énoncées en l'article 28, dans les inventaires, comptes, partages et liquidations dans lesquelles elles seraient intéressées. ARTICLE 31 Les pouvoirs conférés en exécution des articles précédents cesseront de plein droit dès que la personne placée dans un établissement d'aliénés cessera d'y être retenue. ARTICLE 32 Le président pourra, le cas échéant, désigner
non-seulement un administrateur provisoire, mais un curateur à
la personne de tout individu non interdit, placé dans un établissement
d'aliénés, lequel devra veiller : 1° à ce que
ses revenus soient employés à adoucir son sort et à
accélérer sa guérison ; 2° à ce que ledit
individu soit rendu à la liberté et à l'exercice
de ses droits aussitôt que sa situation le permettra. ARTICLE 33 Les actes faits par une personne placée dans un établissement
d'aliénés pendant le temps qu'elle y aura été
détenue sans que son interdiction ait été prononcée,
ni provoquée, pourront être attaqués pour cause de
démence. ARTICLE 34 Le ministère public sera entendu dans toutes les affaires qui intéresseront les personnes placées dans un établissement d'aliénés. TITRE III Les contraventions aux dispositions des articles 5, 7, 10, 11, 17, 18
et 25 de la présente loi, et aux règlements rendus en vertu
de l'article 6, seront punies d'un emprisonnement de cinq jours à
un an, et d'une amende de 50 fr. à 3 000 fr., ou de l'une ou de
l'autre de ces peines. |
Explication du nouveau projet de loi par le ministre de l'Intérieur devant la Chambre des Pairs (15 janvier 1838) |
La loi
se compose de trois titres : le premier trace les conditions générales
de l'établissement des maisons d'aliénés ; le second
pose les règles des placements dans ces maisons ; le troisième
établit la pénalité. |
Projet de loi amendé par la Commission de la Chambre des Pairs (2) |
TITRE
PREMIER Chaque département est tenu d'avoir un établissement public
spécialement destiné à recevoir et soigner les aliénés,
ou de traiter, à cet effet, avec un établissement public
ou privé. ARTICLE 2 Ibid. art. 2 texte 4. ARTICLE 3 Les établissements privés consacrés aux aliénés sont placés sous la surveillance de l'autorité publique. ARTICLE 4 Le préfet et les personnes qu'il aura spécialement déléguées
à cet effet, le président du tribunal, le procureur du Roi,
le juge de paix, le maire de la commune, sont chargés de visiter
les établissements publics ou privés consacrés aux
aliénés. ARTICLE 5 Nul ne pourra diriger ni former un établissement privé,
consacré aux aliénés, sans l'autorisation du Gouvernement. ARTICLE 6 Des règlements d'administration publique détermineront les
conditions auxquelles seront accordées les autorisations énoncées
en l'article précédent, les cas où elles pourront
être retirées et les obligations auxquelles seront soumis
les établissements autorisés. TITRE II Les chefs, directeurs ou préposés responsables des établissements
publics et privés consacrés aux aliénés, ne
pourront recevoir une personne atteinte d'aliénation mentale, s'il
ne leur est remis : 1° Une demande d'admission écrite et signée
par la personne qui fera effectuer le placement, et visée par le
maire ou le commissaire de police. Si cette personne ne sait écrire,
sa demande sera reçue par le maire ou le commissaire de police,
chargé d'en donner acte. ARTICLE 8 Si le placement est fait dans un établissement privé, le préfet, dans les trois jours de la réception du bulletin, chargera un ou plusieurs hommes de l'art de visiter la personne désignée dans ce bulletin, à l'effet de constater son état mental et d'en faire rapport sur-le-champ. Il pourra leur adjoindre telle autre personne qu'il désignera. ARTICLE 9 Dans le même délai, le préfet notifiera administrativement les noms, profession et domicile de la personne placée et les causes du placement : 1° Au procureur du Roi de l'arrondissement du domicile de cette personne ; 2° Au procureur du Roi de l'arrondissement de la situation de l'établissement. ARTICLE 10 Quinze jours après le placement d'une personne dans un établissement public ou privé, il sera adressé au préfet, conformément au dernier paragraphe de l'article 7, un nouveau certificat du médecin de l'établissement ; ce certificat constatera et rectifiera, s'il y a lieu, les observations contenues dans le premier certificat qu'il aura délivré, en indiquant la cause de la maladie, si elle est connue, et le retour plus ou moins fréquent des accès ou des actes de démence commis par l'aliéné. ARTICLE 11 Il y aura, dans chaque établissement, un registre coté et
paraphé par le maire, sur lequel seront immédiatement inscrits
les noms, profession et domicile des personnes placées dans les
établissements, la date de leur placement, les noms, profession,
qualités et demeure de la personne, parente ou non parente, qui
l'aura demandé. Seront également transcrits sur ce registre
: 1° Le certificat du médecin joint à la demande d'admission
; 2° Ceux que le médecin de l'établissement devra adresser
à l'autorité, conformément aux articles 7 et 10. ARTICLE 12 Toute personne placée dans un établissement d'aliénés
cessera d'y être retenue aussitôt que la guérison sera
obtenue, ou dès que sa sortie sera requise par sa famille ou par
la personne qui aura signé la demande d'admission. ARTICLE 13 Dans les 24 heures de la sortie, les chefs, directeurs ou préposés responsables de l'établissement en donneront avis aux fonctionnaires désignés dans le dernier paragraphe de l'article 7, et leur feront connaître les personnes qui auront retiré le malade et, autant que possible, le lieu où il aura été conduit. ARTICLE 14 Le préfet pourra toujours ordonner la sortie immédiate des personnes placées volontairement dans les établissements d'aliénés.
A Paris, le préfet de police, et, dans les départements,
les préfets, ordonneront d'office le placement dans un établissement
d'aliénés de toute personne, interdite ou non interdite,
dont l'état d'aliénation compromettrait l'ordre public ou
la sûreté des personnes. ARTICLE 16 En cas de danger imminent, attesté par le certificat d'un médecin ou par notoriété publique, les commissaires de police à Paris, et les maires dans les autres communes, ordonneront, à l'égard des personnes atteintes d'aliénation mentale, toutes les mesures provisoires nécessaires, à la charge d'en référer, dans les vingt-quatre heures, au préfet, qui statuera sans délai. ARTICLE 17 Les chefs, directeurs ou préposés responsables des établissements
seront tenus d'adresser aux préfets, dans le premier mois de chaque
semestre, un rapport rédigé par le médecin de l'établissement
sur l'état de chaque personne qui y sera retenue, sur la nature
de la maladie et les résultats du traitement. ARTICLE 18 A l'égard des personnes dont le placement aura été
volontaire et dans le cas où leur état mental pourrait compromettre
l'ordre public ou la sûreté des personnes, le préfet
pourra décerner un ordre spécial, à l'effet d'empêcher
qu'elles ne sortent de l'établissement sans son autorisation, si
ce n'est pour être placées dans un autre établissement. ARTICLE 19 Les procureurs du Roi seront informés de tous les ordres donnés
en vertu des articles 15, 16, 17 et 18. ARTICLE 20 Si, dans le cours du délai de trois mois fixé par l'article 17, les médecins estiment que la sortie peut être ordonnée, les chefs, directeurs ou préposés responsables des établissements seront tenus, sous peine d'être poursuivis, conformément à l'article 26 ci-après, d'en référer aussitôt au préfet, qui statuera sans délai. ARTICLE 21 Les hospices et hôpitaux civils seront tenus de recevoir provisoirement les personnes qui leur seront adressées en vertu des articles 15 et 16, jusqu'à ce qu'elles soient dirigées sur l'établissement spécial destiné à les recevoir, aux termes de l'article 1er, ou pendant le trajet qu'elles feront pour s'y rendre. Elles ne pourront être conduites avec les condamnés ou les prévenus. Dans toutes les communes où il existe des hospices ou hôpitaux, les aliénés ne pourront être déposés ni dans les prisons ni dans aucun autre lieu que ces hospices ou hôpitaux. Dans les lieux où il n'en existe pas, les maires devront pourvoir à leur logement. Dans aucun cas, ils ne pourront être déposés dans une prison. Ces dispositions sont applicables aux aliénés indigents placés par l'autorité publique. ARTICLE 22 La dépense du transport, de l'entretien, du séjour et du
traitement des personnes placées dans les hospices ou les établissements
publics d'aliénés, sera réglée d'après
un tarif arrêté par le préfet. ARTICLE 23 A défaut, ou en cas d'insuffisance des ressources énoncées
en l'article précédent, il sera pourvu à cette dépense
sur les centimes variables du département auquel l'aliéné
appartient, sans préjudice du concours de la commune de son domicile,
d'après les bases proposées par le conseil général,
sur l'avis du préfet, et approuvées par le Gouvernement. ARTICLE 24 Des règlements d'administration publique détermineront, en se référant aux règles prescrites par la présente loi, les conditions auxquelles les aliénés indigents qui ne compromettent point la sûreté publique devront être admis dans les établissements, où ils seront traités aux frais des départements et des communes. SECTION 4 Toute personne placée ou retenue dans un établissement d'aliénés,
tout parent de cette personne au degré successible, son curateur,
s'il lui en a été nommé un, conformément à
l'article 32 ci-après, et, à défaut de parents et
du curateur, tout ami, pourront, à quelque époque que ce
soit, se pourvoir devant le tribunal qui, après les vérifications
nécessaires, ordonnera, s'il y a lieu, la sortie immédiate. ARTICLE 26 Les chefs, directeurs ou préposés responsables ne pourront, sous les peines portées par l'article 120 du Code pénal, retenir une personne placée dans un établissement d'aliénés dès que sa sortie aura été ordonnée par le préfet, aux termes des articles 14 et 17, ou par le tribunal, aux termes de l'article 25, ni lorsque cette personne se trouvera dans les cas énoncés en l'article 12. ARTICLE 27 Les commissions administratives ou de surveillance des hospices ou établissements
d'aliénés exerceront, à l'égard des personnes
non interdites qui y seront placées, les fonctions d'administrateurs
provisoires, conformément à l'article 497 du Code civil. ARTICLE 28 Sur la demande des parents, de l'époux ou de l'épouse, ou
sur la provocation d'office du procureur du Roi, le président du
tribunal civil pourra nommer un administrateur provisoire aux biens de
toute personne, non interdite, placée dans un établissement
public non dirigé par une commission administrative ou de surveillance.
Cet administrateur exercera tous les pouvoirs énoncés à
l'article 27. ARTICLE 29 Ibid. art. 29 texte 4. ARTICLE 30 A défaut d'administrateur provisoire, le président, à la requête de la partie la plus diligente, commettra un notaire pour représenter les personnes non interdites placées dans les établissements d'aliénés, dans les inventaires, comptes, partages et liquidations dans lesquels elles seraient intéressées. ARTICLE 31 Ibid. art. 31 texte 4. ARTICLE 32 Le président pourra, le cas échéant, désigner
non seulement un administrateur provisoire, mais un curateur à
la personne de tout individu non interdit placé dans un établissement
d'aliénés, lequel devra veiller : 1° A ce que ses revenus
soient employés à adoucir son sort et à accélérer
sa guérison ; 2° A ce que ledit individu soit rendu au libre
exercice de ses droits aussitôt que sa situation le permettra. ARTICLE 33 Les actes faits par une personne placée dans un établissement
d'aliénés pendant le temps qu'elle y aura été
retenue, sans que son interdiction ait été prononcée
ni provoquée, pourront être attaqués pour cause de
démence. ARTICLE 34 Le ministère public sera entendu dans toute les affaires qui intéresseront les personnes placées dans un établissement d'aliénés, lors même qu'elles ne seraient pas interdites. TITRE III Les contraventions aux dispositions des articles 5, 7, 10, 11, 17, 18
et du dernier paragraphe de l'article 25 de la présente loi, et
aux règlements rendus en vertu de l'article 6, seront punies d'un
emprisonnement de cinq jours à un an, et d'une amende de 50 F à
3 000 F, ou de l'une ou l'autre de ces peines. |
Projet de loi amendé par la Commission de la Chambre des Députés (2) |
TITRE
PREMIER Chaque département est tenu d'avoir un établissement public,
spécialement destiné à recevoir et soigner les aliénés,
ou de traiter, à cet effet, avec un établissement public
ou privé, soit de ce département, soit d'un autre département. ARTICLE 2 Les établissements publics consacrés aux aliénés sont placés sous la direction de l'autorité publique. ARTICLE 3 Ibid. art 3 texte 6. ARTICLE 4 Le préfet et les personnes spécialement déléguées
à cet effet par lui ou par le ministre de l'Intérieur, le
président du tribunal, le procureur du Roi, le juge de paix, le
maire de la commune, sont chargés de visiter les établissements
publics ou privés consacrés aux aliénés. ARTICLE 5 Nul ne pourra diriger ni former un établissement privé,
consacré aux aliénés, sans l'autorisation du Gouvernement. ARTICLE 6 Des règlements d'administration publique détermineront les conditions auxquelles seront accordées les autorisations énoncées en l'article précédent, les cas où elles pourront être retirées, et les obligations auxquelles seront soumis les établissements autorisés. ARTICLE 7 Les règlements intérieurs des établissements publics consacrés, en tout ou en partie, au service des aliénés, seront, dans les dispositions relatives à ce service, soumis à l'approbation du ministre de l'Intérieur.
Les chefs ou préposés responsables des établissements
publics, et les directeurs des établissements privés consacrés
aux aliénés, ne pourront recevoir une personne atteinte
d'aliénation mentale, s'il ne leur est remis : ARTICLE 9 Si le placement est fait dans un établissement privé, le préfet, dans les trois jours de la réception du bulletin, chargera un ou plusieurs hommes de l'art de visiter la personne désignée dans ce bulletin, à l'effet de constater son état mental, et d'en faire rapport-sur-le-champ. Il pourra leur adjoindre telle autre personne qu'il désignera. ARTICLE 10 Dans le même délai, le préfet notifiera administrativement les noms, profession et domicile, tant de la personne placée que de celle qui aura demandé le placement et les causes du placement : 1° Au procureur du Roi de l'arrondissement du domicile de cette personne ; 2° Au procureur du Roi de l'arrondissement de la situation de l'établissement ; ces dispositions sont communes aux établissements publics et privés. ARTICLE 11 Quinze jours après le placement d'un personne dans un établissement public ou privé, il sera adressé au préfet, conformément au dernier paragraphe de l'article 7, un nouveau certificat du médecin de l'établissement ; ce certificat confirmera ou rectifiera, s'il y a lieu, les observations contenues dans le premier certificat qu'il aura délivré, en indiquant le retour plus au moins fréquent des accès ou des actes de démence. ARTICLE 12 Il y aura, dans chaque établissement, un registre coté et
paraphé par le maire, sur lequel seront immédiatement inscrits
les noms, profession et domicile des personnes placées dans les
établissements, la date de leur placement, les noms, profession
et demeure de la personne, parenté ou non parenté, qui l'aura
demandé. Seront également transcrits sur ce registre : 1°
Le certificat du médecin, joint à la demande d'admission
; 2° Ceux que le médecin de l'établissement devra adresser
à l'autorité, conformément aux articles 7 et 10. ARTICLE 13 Toute personne placée dans un établissement d'aliénés
cessera d'y être retenue aussitôt que les médecins
de l'établissement auront déclaré, sur le registre
énoncé en l'article précédent, que la guérison
est obtenue. ARTICLE 14 Avant même que les médecins aient déclaré la
guérison, toute personne placée dans un établissement
d'aliénés cessera également d'y être retenue,
dès que la sortie sera requise par son curateur nommé en
exécution de l'article 36 de la présente loi, par son époux
ou son épouse, un de ses ascendants ou descendants, ou de ses frères
ou surs, et à défaut de parents de ce degré,
par toute autre personne à ce autorisée par le conseil de
famille. ARTICLE 15 Dans les vingt-quatre heures de la sortie, les chefs, préposés ou directeurs en donneront avis aux fonctionnaires désignés dans le dernier paragraphe de l'article 7, et leur feront connaître les personnes qui auront retiré le malade, et, autant que possible, leur résidence et le lieu où le malade aura été conduit. ARTICLE 16 Le préfet pourra toujours ordonner la sortie immédiate des personnes placées volontairement dans les établissements d'aliénés.
A Paris, le préfet de police, et dans les départements,
les préfets, ordonneront d'office le placement, dans un établissement,
de toute personne interdite ou non interdite, dont l'état d'aliénation
compromettrait l'ordre public ou la sûreté des personnes. ARTICLE 18 En cas de danger imminent, attesté par le certificat d'un médecin ou par la notoriété publique, les commissaires de police à Paris, et les maires dans les autres communes, ordonneront, à l'égard des personnes atteintes d'aliénation mentale, toutes les mesures provisoires nécessaires à la charge d'en référer dans les vingt-quatre heures au préfet, qui statuera sans délai. ARTICLE 19 Les chefs, directeurs ou préposés responsables des établissements,
seront tenus d'adresser aux préfets, dans les premiers mois de
chaque semestre, un rapport rédigé par le médecin
de l'établissement sur l'état de chaque personne qui y sera
retenue, sur la nature de sa maladie et les résultats du traitement. ARTICLE 20 A l'égard des personnes dont le placement aura été
volontaire, et dans le cas où leur état mental pourrait
compromettre l'ordre public ou la sûreté des personnes, le
préfet pourra, dans les formes tracées par le deuxième
paragraphe de l'article 17, décerner un ordre spécial à
l'effet d'empêcher qu'elles ne sortent de l'établissement
sans son autorisation, si ce n'est pour être placées dans
un autre établissement. ARTICLE 21 Les procureurs du Roi seront informés de tous les ordres donnés
en vertu des articles 15, 16, 17 et 18. ARTICLE 22 Si, dans l'intervalle qui s'écoulera entre les rapports ordonnés par l'article 19, les médecins déclarent sur le registre tenu en exécution de l'article 12 que la sortie peut être ordonnée, les chefs, directeurs ou préposés responsables des établissements seront tenus, sous peine d'être poursuivis conformément à l'article 26 ci-après, d'en référer aussitôt au préfet qui statuera sans délai. ARTICLE 23 Les hospices et hôpitaux civils seront tenus de recevoir provisoirement
les personnes qui leur seront adressées en vertu des articles 17
et 18, jusqu'à ce qu'elles soient dirigées sur l'établissement
spécial destiné à les recevoir, aux termes de l'article
1er, ou pendant le trajet qu'elles feront pour s'y rendre. SECTION 3 Les aliénés dont le placement aura été ordonné
par le préfet, et dont les familles n'auront pas demandé
l'admission dans un établissement privé, seront conduits
dans l'établissement appartenant au département, ou avec
lequel il aura traité. ARTICLE 25 La dépense du transport des personnes dirigées par l'administration
sur les établissements d'aliénés, sera arrêtée
par le préfet, sur le mémoire des agents préposés
à ce transport. ARTICLE 26 Les dépenses énoncées en l'article précédent
seront à la charge des personnes placées ; à défaut,
à la charge de ceux auxquels il peut être demandé
des aliments, aux termes des articles 205 et suivants du Code civil. ARTICLE 27 Les hospices seront tenus à une indemnité proportionnée
au nombre des aliénés dont le traitement ou l'entretien
était à leur charge, et qui seraient placés dans
un établissement spécial d'aliénés. SECTION 4 Toute personne placée ou retenue dans un établissement d'aliénés,
son tuteur ou curateur, tout parent, tout ami pourront, à quelque
époque que ce soit, se pourvoir devant le tribunal qui, après
les vérifications nécessaires, ordonnera, s'il y a lieu,
la sortie immédiate. ARTICLE 29 Les chefs, directeurs ou préposés responsables ne pourront, sous les peines portées par l'article 120 du Code pénal, retenir une personne placée dans un établissement d'aliénés, dès que sa sortie aura été ordonnée par le préfet, aux termes des articles 14 et 17, ou par le tribunal aux termes de l'article 25, ni lorsque cette personne se trouvera dans les cas énoncés en l'article 12. ARTICLE 30 Les commissions administratives ou de surveillance des hospices ou établissements
publics d'aliénés exerceront, à l'égard des
personnes non interdites qui y seront placées, les fonctions d'administrateurs
provisoires. Elles désigneront un de leurs membres pour les remplir
: l'administrateur, ainsi désigné, procédera au recouvrement
des sommes dues à la personne placée dans l'établissement,
et à l'acquittement de ses dettes, passera des baux qui ne pourront
excéder trois ans, et pourra même, en vertu d'une autorisation
spéciale, accordée par le président du tribunal civil,
faire vendre le mobilier. ARTICLE 31 Sur la demande des parents, de l'époux ou de l'épouse, sur celle de la commission administrative, ou sur la provocation d'office du procureur du Roi, le tribunal civil du lieu du domicile pourra, conformément à l'article 497 du Code civil, nommer, en chambre du conseil, un administrateur provisoire aux biens de toute personne non interdite placée dans un établissement d'aliénés. Cette nomination n'aura lieu qu'après délibération du conseil, et sur les conclusions du procureur du Roi. Elle ne sera pas sujette à l'appel. ARTICLE 32 Le tribunal, sur la demande de l'administrateur provisoire ou à
la diligence du procureur du Roi, désignera un mandataire spécial
à l'effet de représenter en justice tout individu non interdit
et placé ou retenu dans un établissement d'aliénés
qui serait engagé dans une contestation judiciaire au moment du
placement ou contre lequel une action serait intentée postérieurement. ARTICLE 33 Les dispositions du Code civil sur les causes qui dispensent de la tutelle,
sur les incapacités, les exclusions ou les destitutions des tuteurs,
sont applicables aux administrateurs provisoires nommés par le
tribunal. ARTICLE 34 Les significations à faire à une personne placée dans un établissement d'aliénés devront, à peine de nullité, être faites : 1° A son domicile ; 2° A l'administrateur provisoire, ou à défaut d'administrateur provisoire, au chef, préposé responsable ou directeur de l'établissement, qui visera l'original ; 3° Au procureur du Roi, du domicile de la personne placée. ARTICLE 35 Le président, à la requête de la personne la plus diligente, commettra un notaire pour représenter les personnes non interdites placées dans les établissements d'aliénés, dans les inventaires, comptes, partages, liquidations dans lesquels elles seraient intéressées. ARTICLE 36 Les pouvoirs conférés en exécution des articles précédents
cesseront de plein droit, dès qu'une personne placée dans
une maison d'aliénés n'y sera plus retenue. ARTICLE 37 Sur la demande de l'intéressé, de l'un de ses parents, de
l'époux ou de l'épouse, d'un ami, ou sur la provocation
d'office du procureur du Roi, le tribunal pourra nommer, en chambre du
conseil, par jugement non susceptible d'appel, en outre de l'administrateur
provisoire, un curateur à la personne de tout individu non interdit
placé dans un établissement d'aliénés, lequel
devra veiller : 1° A ce que ses revenus soient employés à
adoucir son sort et à accélérer sa guérison
; 2° A ce que ledit individu soit rendu au libre exercice de ses droits
aussitôt que sa position le permettra. ARTICLE 38 Les actes faits par une personne placée dans un établissements
d'aliénés, pendant le temps qu'elle y aurait été
retenue, sans que son interdiction ait été prononcée
ni provoquée, pourront être attaqués pour cause de
démence. ARTICLE 39 Le ministère public sera entendu dans toutes les affaires qui intéresseront les personnes placées dans un établissement d'aliénés, lors même qu'elles ne seraient pas interdites.
Les contraventions aux dispositions des articles 5, 7, 10, 11, 17, 18
et du dernier paragraphe de l'article 25 de la présente loi, et
aux règlements rendus en vertu de l'article 6, qui seront commises
par les chefs, directeurs ou préposés responsables des établissements
d'aliénés et par les médecins employés dans
ces établissements, seront punies d'un emprisonnement de cinq jours
à un an, et d'une amende de 50 F. à 3 000 F., ou de l'une
ou de l'autre de ces peines. |
G. Ferrus. Des aliénés. Extrait du chapitre sur la question du placement des aliénés (1834) |
La
France, qui, sous tant de rapports, donne des leçons aux autres
peuples pour de grandes et belles institutions, restera-t-elle longtemps
en arrière sur un objet qui touche de si près cette partie
de sa population jusqu'à présent si abandonnée ?
Refusera-t-elle de suivre un exemple aussi digne d'être imité
? Non, sans doute, et je conçois, au contraire, l'espérance
que, sous peu d'années, nous verrons, sur tous les points de la
France, réaliser le projet de mon honorable confrère M.
Esquirol, et que des maisons d'aliénés, convenablement réparties
sur toute la surface de la France, et affectées chacune à
deux ou trois départements, offriront enfin un asile assuré
aux aliénés de toutes les parties de ce vaste royaume. Ainsi
reçus et traités à proximité de leurs familles,
on ne les verra plus privés des secours de leurs parents jetés
dans des cachots, ou transportés au loin, dans un état d'abandon
absolu, ce qui diminue infiniment pour eux les chances de guérison.
Aucun établissement public, aucune maison particulière destinés
à recevoir les aliénés, ne pourront être formés
sans autorisations spéciales données par les préfets
dans leurs départements respectifs. ARTICLE 2 La surveillance des établissements et maisons indiqués dans l'art. 1er appartiendra à l'autorité judiciaire, pour ce qui concerne l'état des personnes, et à l'autorité administrative, pour ce qui concerne la police. ARTICLE 3 Tout jugement prononçant une interdiction ou nommant un administrateur provisoire, dans le cas de l'art. 497 du Code civil, pourra, sur la demande, soit de la famille, soit du ministère public ou de l'autorité administrative, ordonner le placement de l'individu, dont l'interdiction sera poursuivie, dans l'un des établissements ou maisons indiqués par l'art. 1er. ARTICLE 4 Aucun individu ne pourra être admis et retenu comme aliéné
dans ces maisons et établissements que sur la remise de l'extrait
authentique d'un jugement portant la disposition prévue par l'article
précédent, ARTICLE 5 Dans chaque établissement et maison, il sera tenu un registre sur
lequel seront inscrits, à l'instant même de l'admission,
les détails portés au jugement qui aura ordonné le
placement, ou dans la réquisition : il sera également fait
mention des personnes qui ont signé la réquisition et des
pièces et documents fournis sur l'individu admis. ARTICLE 6 Le bulletin, aussitôt après sa réception, sera communiqué
par le procureur du roi au président du tribunal, lequel (toutes
les fois que l'admission n'aura pas eu lieu en vertu d'un jugement, conformément
à l'art. 3) se transportera sur les lieux pour constater l'état
du malade et procéder à son interrogatoire, ou commettra
à cet effet, soit un autre juge du tribunal, soit le juge de paix
ou l'un de ses suppléants, le maire ou l'adjoint de la situation
de la maison ou établissement. ARTICLE 7 Si l'admis dont la visite aura été faite a été
précédemment interdit, le tribunal prononcera définitivement
sur la garde de la personne. ARTICLE 8 Lorsque l'interdiction n'a été ni prononcée ni provoquée, le tribunal, dans l'audience même où le rapport lui aura été présenté, pourra prononcer également des mesures provisoires pour la garde de l'individu détenu, en déterminant le temps pendant lequel elles recevront leur effet, et qui ne pourra excéder le terme de six mois. ARTICLE 9 Les mesures provisoires pourront être successivement prorogées
en vertu de nouveaux jugements, mais à la charge de renouveler
préalablement les visites dans la forme prescrite par l'article
6. ARTICLE 10 Lorsque les mesures provisoires autorisées par les articles précédents auront pour objet un individu admis dans un établissement public à la requête du ministère public ou de l'autorité administrative, le tribunal pourra, soit par le premier jugement, soit par un des jugements de prorogation, confier en même temps l'administration provisoire des biens de cet individu aux administrateurs dudit établissement. ARTICLE 11 Deux mois avant l'expiration du terme de dix-huit mois fixé par
l'article 9, si l'interdiction d'un individu appartenant à la classe
mentionnée à l'article précédent n'est pas
provoquée par sa famille, et si l'état d'indigence de cet
individu est reconnu par le tribunal, il pourra, sur la demande du ministère
public ou de l'autorité administrative, décider qu'il n'y
a pas lieu à poursuivre l'interdiction dans les formes ordinaires,
et ordonner que cet individu restera dans l'établissement où
il se trouve, ARTICLE 12 Les actes de procédure pour l'exécution des dispositions autorisées par les articles 8, 9, 10, et 11 pourront être faits collectivement pour plusieurs individus admis dans un même établissement à la requête du ministère public ou de l'autorité administrative, lorsque leur indigence sera justifiée : dans ce cas, le jugement sera également rendu par un seul dispositif. ARTICLE 13 Lorsqu'un individu aura été admis, pour cause d'aliénation
mentale, dans un établissement ou maison hors de l'arrondissement
de son domicile, le tribunal de la situation de cet établissement
ou maison pourra prononcer, la mesure provisoire autorisée par
l'article 8, ou le transport de l'individu au lieu de son domicile. ARTICLE 14 L'avis de tout jugement ordonnant, à l'égard d'un individu non interdit ou dont l'interdiction n'est pas provoquée, soit des mesures provisoires, soit la prorogation de ces mesures, sera de suite, et sans frais, adressé, par les soins du procureur du roi, aux administrateurs ou chefs de l'établissement ou maison où cet individu aura été admis, de manière à ce que cette communication leur parvienne, savoir : pour le premier jugement, rendu d'après l'art. 8, huit jours au plus tard après la visite prescrite par l'art. 6, et les autres avant l'expiration du délai précédemment ordonné. ARTICLE 15 L'état de tous les individus qui, au jour de la promulgation des
présentes, se trouveront placés, pour cause d'aliénation
mentale, dans des établissements publics ou des maisons particulières,
sera inscrit en tête du registre prescrit par l'article 5, dans
le délai d'un mois, à partir de la dite promulgation. Copie
de cet état sera adressée par les administrateurs ou chefs
de ces établissements et maisons, tant aux procureurs du roi près
les tribunaux de leurs arrondissements respectifs qu'au préfet ARTICLE 16 La révocation ou la modification des mesures provisoires ou définitives
ordonnées en vertu des articles précédents pourra,
en tout temps et en tout autre état de cause, être poursuivie
devant le tribunal qui les aura ordonnées ; et, dans le cas de
l'article 13, devant le tribunal du domicile de l'individu détenu. ARTICLE 17 A défaut de réception, dans les délais fixés
par les articles 14 et 15, des significations ou avis officiels mentionnés
dans ces articles, les administrateurs ou chefs des établissements
et maisons indiqués dans l'article 1er, ou autres agents, sont
tenus de remettre immédiatement en liberté les individus
pour lesquels ces délais se trouveront expirés. ARTICLE 18 Toute entrave mise aux visites autorisées par les articles 1 et 6, toute admission faite sans les formalités prescrites par l'article 4 et suivant; tout refus ou même tout retard dans l'exécution des obligations imposées par les articles 5, 15 et 17 seront assimilés à la détention arbitraire et punis de la peine prononcée par l'article 120 du Code pénal. ARTICLE 19 Aucun individu aliéné, détenu en vertu d'un jugement,
ne peut être mis en liberté qu'à l'expiration du délai
fixé par ce jugement, ou en vertu d'un jugement nouveau. ARTICLE 20 L'interdiction pourra être provoquée d'office par le procureur
du roi, ou par l'autorité administrative dans les cas prévus
par l'article 491 du Code civil, et, de plus, contre tout individu déjà
soumis aux mesures provisoires indiquées dans l'article 8 et suivants,
lorsque les parents n'ont pas formé la demande en interdiction
deux mois avant l'expiration du délai de dix-huit mois fixé
par l'article 9. ARTICLE 21 Les jugements mentionnés aux présentes ne pourront jamais
être rendus qu'après que le ministère public aura
été entendu. ARTICLE 22 Dans tous les cas prévus par la présente, toutes les pièces
de procédure et tous les jugements et arrêts relatifs à
des individus dont l'indigence est justifiée seront, sur la réquisition
du procureur du roi, visés pour timbre et enregistrés en
débat : les autres frais seront avancés par la régie
de l'enregistrement ; le tout, sauf recours contre ceux de ces individus
qui, ultérieurement, offriraient des moyens de paiement, et chacun
pour sa part et portion. |
J.-P. Falret, Observations sur le projet de loi relatif aux aliénés (Paris, 1837) |
Le
projet de loi sur les aliénés, que M. le ministre de l'intérieur
a présenté le 6 janvier dernier à la chambre des
députés, tend à réaliser un vu général
dès longtemps exprimé par la médecine, la magistrature
et l'administration. La loi proposée, dont l'objet principal est
de régler le mode d'admission des aliénés dans les
établissements qui leur sont consacrés, accomplit d'ailleurs
une promesse faite dans la précédente législature
par le gouvernement, à la demande expresse de l'honorable M. Auguis,
qui a été l'heureux interprète des sentiments de
tous ceux qu'intéresse la dignité de la nature humaine. ARTICLE PREMIER « Nul individu atteint d'imbécillité, de démence
ou de fureur, dont l'interdiction n'aura pas été prononcée,
ne pourra, sous les peines portées par l'article 120 du Code pénal,
être placé ou retenu dans aucun hospice ou autre établissement
public ou privé, affecté au traitement de l'aliénation
mentale, qu'en vertu d'une autorisation ou d'un ordre du préfet.
» ARTICLE 2 « L'autorisation sera délivrée sur la demande des
parents ou de l'épouse ; elle le sera sur la demande de l'autorité
militaire pour les militaires. ARTICLE 4 « Tout individu placé, en vertu des articles précédents,
dans les établissements qui y sont désignés, n'y
sera plus retenu dès que les causes du placement auront cessé. ARTICLE 5 « Toute autorisation ou ordre délivrés en vertu des
articles I et II sont, dans les trois jours, notifiés administrativement
par le préfet : ARTICLE 7 « Tous les établissements publics et privés où
sont reçus les aliénés sont placés sous la
surveillance de l'autorité administrative. ARTICLE 8 « Aucun établissement destiné au traitement de l'aliénation
mentale ne pourra se former sans l'autorisation du gouvernement. ARTICLE 9 « Les hospices et autres établissements publics désignés
à l'article 1er sont tenus de recevoir les individus qui leur sont
adressés en vertu d'un ordre de placement, délivré
conformément aux articles I, II et III de la présente loi.
» ARTICLE 10 « Il sera tenu, dans chacun des établissements désignés
par la présente loi, un registre spécial indiquant les noms
et domiciles des individus placés en vertu de la présente
loi, l'ordre d'admission, l'époque de l'entrée et celle
de la sortie. » ARTICLE 11 « Des règlements d'administration publique détermineront
les conditions auxquelles seront accordées les autorisations énoncées
en l'article IX, les cas où elles pourront être retirées,
les obligations auxquelles seront soumis les établissements autorisés.
» ARTICLE 13 « La dépense de l'entretien, du séjour et du traitement
des individus placés en vertu de l'article IX de la présente
loi dans les établissements désignés par cet article,
sera à leur charge personnelle ; à défaut, à
la charge de ceux auxquels il peut être demandé des aliments,
aux termes des articles 205 et suivants du Code civil ; cette dépense
sera fixée d'après un tarif réglé par le préfet. ARTICLE 14 « A défaut, ou en cas d'insuffisance des ressources énoncées
en l'article précédent, il sera pourvu à cette dépense
sur les centimes variables du département, sans préjudice
du concours de la commune du domicile des aliénés et des
hospices, d'après les bases proposées par le conseil général
sur l'avis du préfet, et approuvées par le gouvernement.
» |
Esquirol, Examen du projet de loi sur les aliénés (Paris, 1838) |
Jadis
on ne regardait comme fous que les maniaques furieux et les individus
dans un état habituel d'imbécillité ou de démence.
Les lois anciennes ordonnèrent le renfermement des furieux, parce
qu'ils troublent l'ordre public ; elles autorisèrent et prescrivirent
l'interdiction des fous pour la conservation de leur fortune. Elles satisfirent
ainsi aux besoins connus à l'époque où elles furent
rendues. ARTICLE 2 Les établissements publics des aliénés sont placés sous la direction de l'autorité publique. Si par autorité publique, le projet entend le gouvernement, on demande pourquoi ces établissements sont placés sous une autre direction que celle des hôpitaux, pourquoi cette exception sans utilité, qui entretiendra des préjugés funestes. Un établissement créé par une commune, par un département, soutenu de leurs deniers ne sera point dirigé par l'administration locale qui l'a fondé et qui paie ses dépenses ? Il y a là un principe de ruine, un principe qui découragera le zèle et le bon vouloir pour de nouveaux sacrifices ; la surveillance du gouvernement, soit, mais la direction ! Un établissement créé par une commune, par un département, est une propriété collective qui doit être gouvernée par ses créateurs, de même qu'un établissement privé est dirigé par son propriétaire. ARTICLE 4 Bien convaincu que la loi ne saurait rendre trop facile le placement d'un
aliéné dans une maison publique ou privée où
il doit être traité, j'ai appelé plus que tout autre
la surveillance et la responsabilité sur les chefs de ces établissements
; mais le projet de loi n'exagère-t-il point les moyens de surveillance
? En effet, des visites doivent être faites par : ARTICLE 5 Nul ne pourra diriger, ni former un établissement d'aliénés
sans l'autorisation du gouvernement. ARTICLE 8 § I. La demande d'admission sera écrite et signée par
celui qui fera effectuer le placement. ARTICLE 9 Dans les trois jours de la réception du bulletin d'admission d'un
aliéné dans un établissement privé, le préfet
enverra un ou plusieurs hommes de l'art pour visiter la personne désignée
dans le bulletin et pour constater son état mental. Cela se fait
dans le département de la Seine depuis 1809. ARTICLE 10 Le préfet notifiera administrativement les noms, prénoms,
profession, etc., de l'aliéné nouvellement admis : 1°
au procureur du roi du domicile de l'aliéné ; 2° au
procureur du roi de l'arrondissement où est situé l'établissement. ARTICLE 11 § II. Le médecin sera tenu de consigner sur le registre des admissions, une fois au moins tous les mois, les changements survenus dans l'état mental de chaque malade. Quel peut être le but de cette prescription ? Si cette inscription est laconique, elle est inutile ; si elle est détaillée, c'est un long travail imposé au médecin. Cette inscription, ou mieux cette annotation faite aujourd'hui, se trouvera fausse le lendemain. Elle oblige le médecin déjà chargé de tant d'écritures, à un travail mensuel indépendamment de celui qu'il fait tous les jours en recueillant des notes sur chaque malade, pour y recourir dans l'occasion. C'est un devoir de conscience utile au succès de sa pratique. L'inscription mensuelle ne profitera à personne, ni au malade, ni au médecin, ni à l'autorité. Ces notes seront faites par des subalternes. ARTICLE 13 Toute personne placée dans un établissement d'aliénés,
cessera d'y être retenue dès que les médecins de l'établissement
estimeront qu'elle est guérie ; dès que sa sortie sera requise
par sa famille, le curateur, par l'époux ou l'épouse, par
un des ascendants ou descendants, un des frères ou surs,
et à défaut de parents, par toute autre personne à
ce autorisé par le conseil de famille. ARTICLE 16 « Le préfet pourra toujours ordonner la sortie immédiate
des personnes placées volontairement dans des établissements
d'aliénés. » ARTICLE 18 Pourquoi ne pas laisser dans tous les cas au maire du domicile le pouvoir
d'ordonner l'isolement, à la charge par lui d'en référer
aussitôt au préfet. L'intervention du préfet sera
souvent dans les campagnes d'une grande difficulté pour les familles
pauvres et une occasion de dépenses. Un père de famille
obligé de travailler tous les jours, sera forcé de traverser
son département pour aller réclamer du préfet l'ordre
de faire entrer son fils aliéné, dans un établissement.
ARTICLE 21 Les procureurs du roi seront informés de tous les ordres donnés
en vertu des articles XV, XVI, XVII et XVIII. Ce premier paragraphe offre
une omission qui paraît le rendre incomplet. Il ne désigne
pas le lieu qui est soumis à la juridiction des procureurs du roi
auxquels doivent être faites les notifications. ARTICLE 34 « Les significations à faire à une personne placée
dans un établissement d'aliénés devront, à
peine de nullité, être faites : 1e à son domicile.
» Pourquoi cette signification au domicile de l'aliéné
? Ce domicile sera quelquefois abandonné des siens ; on y trouvera
personne pour recevoir cette signification, ou elle sera reçue
par des subalternes, par des portiers qui ne manqueront pas de la communiquer
à tous les voisins : ne suffit-il pas de l'adresser au directeur
de l'établissement, à l'administrateur provisoire et au
procureur du roi. La loi publiée à Genève sur les
aliénés se contente de ces deux dernières significations. CONCLUSION Après avoir pourvu à ce que les établissements fussent
assez nombreux pour recevoir les aliénés dont l'admission
est réclamée ; après avoir défendu de placer
les aliénés dans les prisons ; après avoir assigné
des fonds pour subvenir aux dépenses qu'entraîné l'aliéné
indigent ; après avoir pourvu à l'administration des biens
de l'aliéné sans recourir aux longueurs et à la publicité
de l'interdiction ; la loi eût satisfait aux espérances et
aux vux des hommes qui se sont le plus occupés du sort de
ces malheureux malades ; en généralisant pour tous les établissements
les mesures d'admission et de surveillance ordonnées et mises en
pratique dans le département de la Seine dans le but de prévenir
tout abus relatif à la violation de la liberté individuelle
sous prétexte de folie. |
Adéodat Faivre, Examen critique du projet de loi sur la séquestration des aliénés (Lyon, 1838) |
PROJET
DE LOI Chaque département sera tenu d'avoir un établissement destiné
à recevoir les aliénés, ou de traiter avec un établissement
public ou privé qui s'engagera à les recevoir. ARTICLE 2 Le préfet et les personnes qu'il aura spécialement désignées à cet effet, le président du tribunal, le procureur du roi et le maire de la commune, sont chargés d'inspecter les établissements d'aliénés ; ils seront admis toutes les fois qu'ils se présenteront. ARTICLE 3 Nul ne pourra diriger ni former aucun établissement privé
consacré aux aliénés, sans l'autorisation du Gouvernement. ARTICLE 4 Des règlements d'administration publique détermineront les conditions auxquelles seront accordées les autorisations énoncées en l'article précédent, les cas où elles pourront être retirées, et les obligations auxquelles seront soumis les établissements autorisés.
Les chefs, directeurs ou préposés responsables des établissements
désignés dans les articles 1 et 2, lorsqu'ils recevront
une personne atteinte d'aliénation mentale, se feront remettre,
1° une demande d'admission écrite et signée par la personne
qui fera effectuer le placement, et si cette personne ne sait pas écrire,
reçue par le maire ou le commissaire de police chargé d'en
donner acte. ARTICLE 6 Dans les trois jours de la réception du bulletin, le préfet chargera un ou plusieurs hommes de l'art de visiter la personne désignée dans le bulletin, à l'effet de constater son état mental et d'en faire rapport sur-le-champ. ARTICLE 7 Dans le même délai, le préfet notifiera administrativement les nom, profession et domicile de la personne placée, et les causes de la maladie et du placement, 1° au procureur du roi de l'arrondissement de la situation de l'établissement ; 2° au procureur du roi de l'arrondissement du domicile de la personne. ARTICLE 8 Toute personne placée dans un établissement d'aliénés, cessera d'y être retenue aussitôt que les médecins de l'établissement estimeront que la guérison est obtenue, ou que la famille demandera qu'elle lui soit rendue. ARTICLE 9 Dans les vingt-quatre heures de la sortie, les chefs, directeurs ou les préposés responsables de l'établissement, en donneront avis aux autorités désignées dans le deuxième paragraphe de l'article 5. ARTICLE 10 Le préfet pourra toujours ordonner la sortie immédiate des personnes placées dans les établissements d'aliénés.
Le préfet de police, à Paris, et, dans les départements, les préfets pourront ordonner d'office le placement dans un établissement public d'aliénés de toutes personnes interdites ou non interdites, dont l'état d'aliénation compromettrait la sûreté publique. ARTICLE 12 En cas de danger éminent attesté par le certificat d'un médecin ou par la notoriété publique, les commissaires de police, à Paris, et les maires dans les départements, peuvent ordonner, à l'égard des personnes atteintes d'aliénation mentale, les mesures provisoires nécessaires, à la charge d'en référer dans les vingt-quatre heures, au préfet qui statuera sans délai. ARTICLE 13 Aucun ordre de placement ne pourra avoir d'effet pour plus de six mois ; dans la quinzaine qui précédera l'expiration de ce délai, une nouvelle visite sera ordonnée, conformément à l'article 6, et le préfet décidera si l'ordre doit être renouvelé. En cas d'expiration du délai, sans que l'ordre ait été renouvelé, la personne placée cessera d'être retenue. ARTICLE 14 Le préfet pourra décerner, à l'égard des personnes placées dans un établissement d'aliénés, conformément à l'article 5, et dont l'état mental pourrait compromettre la sûreté publique, un ordre spécial, à l'effet d'empêcher qu'elles ne sortent de l'établissement sans son autorisation, si ce n'est pour être placées dans un autre établissement : les chefs, directeurs ou préposés responsables, seront tenus de se conformer à cet ordre. ARTICLE 15 Les procureurs du roi, seront informés de tous les ordres qui seront
donnés en vertu des articles précédents, dans la
forme et le délai énoncés en l'article 7. ARTICLE 16 Aussitôt que les médecins penseront que la sortie peut être ordonnée, il en sera référé au préfet qui statuera sans délai. ARTICLE 17 Les établissements publics d'aliénés, sont tenus
de recevoir les personnes qui leur sont adressées, en vertu d'un
ordre de placement donné par le préfet. ARTICLE 18 La dépense du transport, de l'entretien, du séjour et du
traitement des personnes placées dans les hospices ou établissements
publics d'aliénés, sera réglée d'après
un tarif arrêté par le préfet. Cette dépense
sera à la charge des personnes placées ; à défaut
à la charge de ceux auxquels il peut être demandé
des aliments, aux termes des articles 205 et suivants du Code civil. ARTICLE 19 Au défaut ou en cas d'insuffisance des ressources énoncées
en l'article précédent, il sera pourvu à cette dépense
sur les centimes variables du département, sans préjudice
du concours de la commune du domicile de l'aliéné, d'après
les bases préposées par le conseil général,
sur l'avis du préfet et approuvé par le Gouvernement. ARTICLE 20 Toute personne placée ou retenue dans un établissement d'aliénés,
et tout parent de cette personne pourront, à quelque époque
que ce soit, se pourvoir devant le tribunal qui, après les vérifications
nécessaires, ordonnera, s'il y a lieu, sa sortie immédiate. ARTICLE 21 Les chefs, directeurs ou préposés responsables, ne pourront, sous les peines portées en l'article 120 du Code pénal, retenir une personne placée dans un établissement d'aliénés, dès que sa sortie aura été ordonnée par le préfet, aux termes de l'article 12, ou par le tribunal, aux termes des articles précédents, ou bien que cette personne se trouvera dans le cas énoncé par l'article 10, ou par le dernier paragraphe de l'article 13. ARTICLE 21 BIS Les commissions administratives des hospices et établissements
d'aliénés, exerçant à l'égard des personnes
non interdites qui y seront placées, les fonctions de tutelle établies
à l'égard des enfants admis dans les hospices par l'article
1er de la loi du 15 pluviôse an 13. Cette tutelle sera gratuite
et garantie conformément à l'article 5 de la même
loi. ARTICLE 22 Sur la demande des parents de l'époux, de l'épouse, ou sur la provocation d'office du procureur du roi, le président du tribunal civil pourra nommer un administrateur provisoire aux biens de toute personne non interdite, placée dans un établissement privé, ou dans un établissement public non dirigé par une commission administrative, ou de surveillance. ARTICLE 23 Les significations à faire à une personne placée dans un établissement d'aliénés, devront, à peine de nullité, être faites au domicile de l'administrateur provisoire, ou, à défaut, à la personne du chef, directeur, ou préposé responsable de l'établissement, qui visera l'original. ARTICLE 24 Le président, à la requête de la partie la plus diligente commettra un notaire pour représenter les personnes énoncées en l'article précédent, dans les inventaires, comptes, partages, liquidations dans lesquels elles seraient intéressées. ARTICLE 25 Les pouvoirs conférés en exécution des articles précédents, cesseront de plein droit, dès que la personne placée dans un établissement d'aliénés cessera d'y être retenue. ARTICLE 26 Si la personne décède dans l'établissement, sans que son interdiction ait été prononcée ni provoquée, les actes qu'elle aura faits pendant qu'elle y était, pourraient être attaqués pour cause de démence.
Les contraventions aux dispositions des articles 3, 5 et 14 de la présente
loi, et au règlement rendu en vertu de l'article 4, seront punies
d'un emprisonnement de cinq jours à un an, et d'une amende de 50
F à 3 000 F, ou de l'une ou l'autre de ces peines.
Un projet de loi sur la séquestration des aliénés
a été voté par MM. les Députés, et
vient d'être présenté à la Chambre des Pairs. PREMIÈRE PARTIE Le savant Esquirol, dans un mémoire lumineux qu'il publia en 1832,
sur l'isolement et l'interdiction des aliénés, disait, avec
raison, que la mesure salutaire par laquelle on les soustrait subitement
à leurs habitudes, à leurs entourages, devait être
libre et dégagée de toute entrave, puisque le sort des malades,
leur avenir dépendent fort souvent de la promptitude et de l'opportunité
de leur séquestration ; il voulait (ce sont ses expressions), qu'il
n'y eût pas plus de difficulté à faire transporter
un aliéné dans un hospice ou dans un établissement
privé, qu'à faire entrer un blessé ou un fiévreux
dans un hôpital. Enfin, il faisait des vux pour que leur honneur
fut ménagé, et pour qu'une catastrophe, souvent passagère,
ne devînt pas la fable de toute une ville par de vaines formalités. ARTICLE 6 Dans les trois jours de la réception des bulletins, le préfet chargera un ou plusieurs hommes de l'art de visiter la personne désignée dans le bulletin, à l'effet de constater son état mental, et d'en faire rapport sur-le-champ. ARTICLE 7 Dans le même délai, le préfet notifiera administrativement
les nom, profession et domicile de la personne placée, et les causes
de la maladie et du placement. ARTICLE 9 Dans les vingt-quatre heures de la sortie, les chefs, directeurs ou les préposés responsables de l'établissement en donneront avis aux autorités désignées dans le deuxième paragraphe de l'article 5. ARTICLE 13 Aucun ordre de placement ne pourra avoir d'effet pour plus de six mois.
Dans la quinzaine qui précédera l'expiration de ce délai,
une nouvelle visite sera ordonnée conformément à
l'article 6, et le préfet décidera si l'ordre doit être
renouvelé. En cas d'expiration du délai, sans que l'ordre
ait été renouvelé, la personne placée cessera
d'être retenue. »
Une jeune femme, atteinte d'une maladie de matrice, présente des
symptômes d'hystérie qui se compliquent d'aliénation
mentale ; elle devient capricieuse, bizarre, emportée, brise ses
vitres, ses meubles ; elle injurie et frappe son mari et ses domestiques,
elle babille sans cesse, s'imagine qu'elle a fait quinze ou vingt enfants,
au nombre desquels elle compte le petit Napoléon ; elle assure,
d'ailleurs, qu'elle va accoucher encore ; elle se met au lit, crie comme
une femme en couche, envoie chercher son médecin et ne souffre
plus que celui-ci la quitte. DEUXIEME OBSERVATION Une dame, âgée de vingt-six ans, mère de deux enfants,
en fait un troisième et prend une fièvre muqueuse à
la suite de sa couche ; elle tombe dans le délire ; la fièvre
muqueuse passe, le délire subsiste ; il est visiblement entretenu
par l'influence funeste qu'exercent sur la malade, et ses entourages et
les secours maladroits dont on la prévient ; son isolement est
décidé, on l'amène dans ma maison de santé
; le changement d'air, l'habitation de la campagne, l'éloignement
des siens, la présence de nouveaux visages suffirent pour opérer
sur elle la diversion la plus heureuse. Au bout d'un mois elle était
guérie, sans autres remèdes que des soins assidus et une
hygiène bien réglée ; deux mois plus tard, elle est
rentrée chez elle et se porte bien aujourd'hui, bien qu'elle ait
fait un quatrième enfant qu'elle a nourri avec succès. TROISIEME OBSERVATION Une dame nerveuse, sanguine, accoutumée à la gestion des
grandes affaires, d'un caractère irascible, a la douleur de voir
périr une fille chérie de la phtisie pulmonaire ; sa tête
ne peut résister à un coup aussi douloureux, elle tombe
dans un état de mélancolie habituel, interrompu de temps
en temps par de violents accès de manie ; la malade, après
deux ans révolus, n'est point incurable, tant s'en faut, la médecine
a encore de bonnes raisons pour espérer une guérison complète
; mais enfin la prolongation de son isolement sera nécessaire pendant
un temps plus ou moins long dont il n'est pas possible d'assigner le terme.
Elle vit dans ma maison de santé, ayant le sentiment intime de
sa position, raisonnant très bien à ce sujet et comprenant
parfaitement qu'il y aurait péril pour elle si elle rentrait trop
tôt au sein de sa famille. SECONDE PARTIE Nous vivons dans un siècle où les hommes sont plus passionnément
que jamais épris de la liberté individuelle. |
Michel Caire 2010 |