André (Alphonse Louis) Antheaume
Provins (Seine-et-Marne) 13 avril 1867 / Le Vésinet (Seine-et-Oise) 9 août 1927
Neuro-psychiatre. Médecin honoraire de la Maison de Charenton. Médecin du Sanatorium de la Malmaison (Rueil).
Officier d’Académie 1898. Officier de l’Instruction Publique 1903. Officier du Nichan Iftikar 1912. Chevalier (1920) puis Officier (1926) de la Légion d'Honneur.
Fils de Charles Alexandre Antheaume, pharmacien à Provins, et d'Amélie Sougère, André fait ses études de médecine à Paris, où il est reçu externe des hôpitaux (1890) puis interne des asiles de la Seine (1893).
C'est à l'Asile clinique (Sainte-Anne), dans le service de Valentin Magnan, et surtout à la Clinique des maladies mentales dirigée par le professeur Alix Joffroy qu'il trouve matière à sa thèse de médecine sur la toxicité des divers alcools (1897), et sa mesure par la méthode de Joffroy et Serveaux.
En 1899, il devient chef de clinique de la Faculté, puis en 1901, médecin-inspecteur adjoint des asiles d'aliénés.
Trois ans plus tard, André Antheaume est nommé médecin suppléant de la Maison nationale de Charenton, et, à dater du 1er janvier 1905, remplace comme médecin titulaire le docteur Jules Christian 1840-1907, admis sur sa demande à faire valoir ses droits à la retraite.
Le Dr Antheaume restera peu de temps médecin en chef de la Maison Nationale, puisqu'il démissionne le 5 février 1907 pour fonder une maison de santé à Rueil.
Il dirigera ce Sanatorium neuro-psychiatrique jusqu'à sa mort, en association avec le docteur Louis Bour 1876-1944. La propriété, entretemps abandonnée, est depuis 1946 propriété de l'Institut Français du Pétrole.
Travaux - De la Toxicité des alcools (prophylaxie de l'alcoolisme). Paris, Félix Alcan, 1897 ; 174 p. (Thèse de doctorat en médecine, Paris, soutenue sous le titre : Contribution à l'étude de la toxicité des alcools et de la prophylaxie de l'alcoolisme)- (avec Raoul Leroy) Un cas de dipsomanie morphinique (morphino-dipsomanie ou morphinomanie vraie). Clermont (Oise), Daix frères, 1900 - (avec Léon Antheaume) Les bouilleurs de cru. Privilège, fraude, alcoolisation. Paris, C. Naud, 1902 ; III-291 p. - Les psychoses périodiques. Genève, Société générale d'imprimerie, 1907; 112-XIV p. - (avec G. Dromard) Poésie et Folie. Essai de psychologie et de critique. Paris, O. Doin, 1908 ; XII-639 p. - (avec Roger Mignot) Les Maladies mentales dans l'armée française. Paris, H. Delarue, 1909 ; 253-XV p., tabl. - Le Roman d'une épidémie parisienne. La Kleptomanie ? Paris, G. Doin, 1925 |
LE DOCTEUR ANTHEAUME
Les obsèques du docteur Antheaume ont eu lieu le vendredi 12 août au cimetière de Passy. Dans son discours, le professeur Claude a passé en revue l'existence de notre ami disparu : elle se résume dans une activité sans répit. D'autres que moi diront son œuvre de clinicien, de médecin légiste, d'administrateur et ce qu'il fit pour l'assistance des aliénés et comme fondateur d'une maison de santé modèle, mais je dois dans ce journal où si souvent, et avec quelle ardeur, il prit la défense de nos intérêts corporatifs, évoquer ce qu'il fut comme collègue. La carrière du docteur Antheaume dans les asiles a été courte; après quelques années d'internat en province et dans la Seine et après son clinicat avec le professeur Joffroy, il devint, à la suite d'un concours sur titres, médecin en chef de Charenton. Il n'y resta que trois ans; son activité, son besoin d'aboutir rapidement l'empêchait de s'adapter aux méthodes administratives faites d'hésitation, de lenteur et d'ajournement. Il aurait voulu organiser Charenton d'une façon moderne, mais c'était entrer en conflit avec des habitudes séculaires. Voyant qu'il ne pouvait aboutir rapidement à une transformation,' il offrit sa démission et ses services furent officiellement reconnus par l'honorariat. Il résolut alors de mettre en pratique, dans une maison de santé qu'il allait créer, les moyens et les méthodes qu'il avait préconisés. Le succès qu'il a obtenu démontre qu'il ne s'était pas trompé dans sa conception de l'assistance des psychopathes de la classe aisée. A partir de 1907, le docteur Antheaume ne faisait donc plus partie du cadre des médecins des asiles; il était engagé dans une nouvelle carrière dont les points de vue et les intérêts sont pour le moins divergents de ceux qui nous préoccupent; indépendant et libre de toute attache officielle, il aurait pu, d'accord avec la morale du siècle, oublier le milieu d'où il était parti et considérer d'un œil indifférent les desiderata de ses anciens collègues. Il ne l'a pas voulu et vingt ans après son départ de Charenton, surchargé d'occupations de toutes sortes, déjà touché par une maladie dont il n'ignorait pas le pronostic, il se considérait toujours comme solidaire avec nous; il faisait siennes nos revendications, se réjouissait des avantages obtenus, s'impatientait des retards. Combien de fois l'ont vu les bureaux des ministères, les cabinets des ministres ! Certains esprits chagrins, toujours portés à rechercher de bas motifs aux actions humaines, regardaient avec une certaine impatience son intervention dans nos affaires corporatives. Il le savait, en riait et n'en avait cure; la majorité d'entre nous lui faisait confiance, le succès est la meilleure des répliques et il réussissait tout ce qu'il entreprenait. Sans ménager son temps et ses pas, il s'accrochait aux bureaux et aux personnages influents et savait dire et faire ce qui convient en pareil cas; privé de talent oratoire, il avait le don plus efficace de convaincre; avant d'entreprendre, il savait écouter et se renseigner et il s'intéressait seulement aux causes justes. Sans crainte de démenti, je peux dire que nous lui devons ce décret de 1910, successivement amendé, qui constitue le statut administratif des médecins des asiles et que la plupart des fonctionnaires peuvent nous envier. Le docteur Antheaume n'avait, certes, pas peur des obstacles et, entrainé par son désir d'aboutir, il se créait des ennemis. Mais il était sans haine et bien souvent il a tendu le premier la main à ceux qui l'avaient combattu avec acharnement. Notre ami n'avait pas seulement le souci des intérêts généraux de notre corporation, il se préoccupait des intérêts particuliers de tous les collègues qui s'adressaient à lui. Combien ont franchi la porte de la rue Scheffer pour demander un conseil, une démarche, un appui! Combien lui doivent de n'avoir pas été victimes de la basse politique, des influences locales, d'erreurs, de brimades ou d'injustices! Nul n'en connait le nombre, car il était sûr et discret. Si tous les visiteurs étaient accueillis cordialement, tous ne remportaient pas l'assurance de son intervention; il savait refuser, mais quand il s'était fait l'avocat d'un collègue, il dépensait une telle activité à le soutenir que bientôt il semblait être lui-même en cause. A le voir se passionner ainsi pour les affaires d'autrui, j'ai pensé souvent qu'il avait reporté sur nous tous une part de son affection. Les grandes amitiés sont toujours quelque peu jalouses, le docteur Antheaume souffrait quand notre Association amicale semblait vouloir agir en dehors de lui. A une époque où l'esprit social et le sentiment de la solidarité résident davantage dans la forme des institutions que dans le comportement des individus, les personnalités comme celle du docteur Antheaume ne sont-elles pas dignes d'admiration ? Je suis assurément l'interprète du plus grand nombre de nos collègues des asiles en exprimant ici à sa mémoire notre reconnaissance et en affirmant qu'il vivra toujours dans notre souvenir. |
Michel Caire, 2013 |