(Ernest)
Charles LASÈGUE
Paris 5 septembre 1816 / Paris 20 mars 1883
Neurologiste, aliéniste, premier médecin en chef
de l'Infirmerie spéciale près la Préfecture
de Police (Paris).
Après des études classiques brillantes au lycée Louis-le-Grand
- il est lauréat du concours général - Lasègue obtient
une licence ès lettres en 1838 et un emploi de répétiteur
de philosophie dans ce même lycée (où il a Charles Baudelaire
comme élève).
Ses amis Claude Bernard et Bénédict Morel, alors internes de Jean-Pierre
Falret à la Salpêtrière, l'y invitent et lui font découvrir
la médecine mentale. Dès lors, il décide de s'y consacrer et en 1839, il s'inscrit
à la Faculté de médecine.
Le 25 février 1846, il soutient sa thèse de doctorat (De Stahl
et de sa doctrine médicale) sous la présidence de Trousseau,
dont il devient en 1852 le chef de clinique, l'élève de prédilection
et l'ami.
En 1853, il est agrégé de médecine (sa deuxième
thèse porte sur la Paralysie Générale progressive), et
obtient un poste au Bureau Central en 1854.
Sa carrière de médecin
des hôpitaux se déroule à l'hôpital de Lourcine, puis
à la Salpêtrière en 1859, Saint-Antoine en 1859, Necker
en 1861, la Pitié en 1869.
Parallèlement, il enseigne la médecine,
notamment la clinique des maladies mentales à Necker en 1862, puis devient
professeur de pathologie et thérapeutique générales et
professeur de clinique médicale à la Pitié.
En 1854, il est rédacteur en chef d'une revue de premier plan : les Archives
générales de médecine.
En 1871, Lasègue est décoré de la Légion d'honneur,
et en 1876, il entre à l'Académie de médecine.
Lasègue
aliéniste et neurologiste
En 1848, il visite les asiles d'aliénés en Russie au cours d'un
voyage d'étude sur l'épidémie de choléra, et obtient
à son retour en France le poste d'inspecteur général adjoint
des établissements d'aliénés, sous la direction de Ferrus
et Parchappe.
Ce poste, qu'il occupe jusqu'en 1850, le mènera dans divers
asiles de province. Ainsi, en 1849, il visite successivement Dijon, Bourg, Saint-Alban,
Aurillac, la Cellette, Clermont, Riom, Moulins, La Charité et Bourges.
Sous le Second Empire, il est l'un des médecins chargés de la
visite des aliénés à la préfecture de police. Ainsi,
lorsque le service spécial obtient son autonomie avec la circulaire du
28 février 1872, il est nommé médecin en chef de l'Infirmerie
spéciale en 1873.
Brillant clinicien, il établit la sémiologie des atteintes du
nerf sciatique, et invente le signe aujourd'hui éponyme que tout étudiant
en médecine apprend à rechercher.
Le syndrome de Lasègue, rencontré dans l'hystérie
(de conversion), a eu moins de pérennité que le signe :
le malade y est incapable de faire un mouvement du membre touché sans
le secours de la vue, tandis que les mouvements suggérés peuvent
être accomplis sans l'aide de la vision.
De même, la maladie de Lasègue (délire des persécutions,
1852) a disparu derrière la paranoïa, qui en a les mêmes caractères.
L'une des formes particulières de ce délire de persécution,
le délire à deux, est l'objet d'une publication avec Jules
Falret, "La folie à deux ou folie communiquée".
Par ailleurs, de sa description de l'anorexie hystérique en 1873
sont issus les travaux qui délimiteront le concept d'anorexie mentale.
Lasègue publie en 1881 un important article intitulé Le délire
alcoolique n'est pas un délire mais un rêve, où il oppose
delirium (tremens) et délire (chronique) et insiste
sur sa proximité d'avec le rêve.
D'autres publications portent sur l'exhibitionnisme (1877) ou le vol
aux étalages (1880), des problèmes médico-légaux
dont il avait une bonne connaissance, tant par ses activités à
l'Infirmerie spéciale qu'en tant qu'expert judiciaire.
Lasègue fut un des rares aliénistes de la deuxième moitié
du XIXe siècle à s'opposer à l'organicisme psychiatrique
triomphant. Dans un article paru dans l'Évolution Psychiatrique
en 1979 (T. XLIV, fasc. III, pp. 585-616), Jacques Postel montre d'où
vient pour Lasègue la révélation dès 1846-1847 de
ce qui est en jeu dans la relation médecin - malade, dans le traitement
moral de l'aliéné par l'aliéniste, c'est-à-dire
la cure individuelle, cura singularis : il a l'intuition de la relation
transférentielle, et annonce les principes de ce que l'on appellera plus
tard l'alliance thérapeutique.
Sur Lasèque, lire
notamment
:
Discours
prononcés sur la tombe de M. le Pr Lasègue. Paris, A.
Parent, A Davy, 1883 (Discours de M. le professeur G. Sée, au nom de
la Faculté de médecine; de M. le professeur Potain, au nom de
l'Académie de médecine; de M. Legroux, au nom des élèves;
de M. Fernet, au nom des anciens internes; de M. Motet, au nom de la Société
médico-psychologique.
Antoine Ritti - Eloge
du Pr Ch. Lasègue, lu à la séance publique annuelle
de la Société médico-psychologique du 27 avril 1885.
Paris, O. Doin, 1885
Un médaillon en bronze signé Ch. Desouches 1884 orne sa tombe du cimetière de Châtillon-sous-Bagneux, où il repose auprès de ses parents et de son épouse.
Michel Caire, 2008-2012 |