Cette notice présente les trois bases de données contenant tous les résultats nationaux publiés à propos des personnes reçues dans les établissements psychiatriques français. Elles excluent donc les données par département ou par établissement et les données financières. Au XIXe siècle, plusieurs recensements ont comporté des informations sur les personnes en établissement psychiatrique ou à domicile ; je ne les ai pas reproduits non plus car la méthode de collecte est différente et les chiffres ne concordent donc pas avec les publications annuelles de la SGF. D’ailleurs, il s’agit d’enquêtes décennales, qui ne se prêtent pas bien à l’étude des évolutions.
Les trois bases sont établies selon l’organisme ayant conduit les enquêtes et publié les résultats : SGF-Insee, Inserm et Ministère.
Cette notice n’analyse pas les informations fournies dans ces trois bases, mais en examine la robustesse et la cohérence. La question posée est préliminaire : jusqu’à quel point et à quelles conditions, l’exploitation de ces bases de données peut-elle apporter des informations fiables ?
A – SGF Insee
1 – Les erreurs typographiques
Toutes les erreurs typographiques détectées dans les documents imprimés ont été corrigées.
Il y a des erreurs typographiques occasionnelles portant sur les nombres de personnes. À de rares exceptions près, ces erreurs sont négligeables car elles portent sur le chiffre des unités, des dizaines ou des centaines. Les milliers sont peu touchés, et j’ai vu une seule erreur sur les dizaines de milliers (année 1977, voir ci-dessous). J’ai corrigé les erreurs, et je n’ai signalé que les plus importantes. Elles sont identifiables lorsque les totaux publiés ne correspondent pas aux totaux calculés après la saisie sur Excel ou bien lorsque plusieurs publications donnant les effectifs d’une même année comportent des écarts (le calcul des totaux m’a aussi permis de débusquer mes propres fautes de frappe…). La correction de ces erreurs est possible lorsque leur localisation peut être précisée exactement. Lorsqu’un total publié ne correspond pas à celui calculé par le logiciel, où se trouve l’erreur ; est-ce le total qui est faux ou bien l’un des termes de l’addition ? Il n’y a pas de source plus fiable, pouvant servir pour effectuer des corrections. Le seul argument disponible pour modifier un nombre est celui de la cohérence des données, que ce soit dans un même tableau, ou bien entre sources distinctes. La discussion est aisée quand le tableau présente des totaux à la fois en ligne et en colonne, ce qui permet de localiser précisément la cellule problématique ; la correction est un peu plus complexe dans les autres cas où la confrontation entre plusieurs tableaux ou entre plusieurs calculs devient nécessaire. Voici trois exemples d’erreurs : les deux premières peuvent être corrigées mais pas la troisième.
Dans le tableau de synthèse donnant les répartitions par diagnostics des personnes reçues en 1934, l’effectif publié des femmes existantes au 1er janvier et ayant reçu un diagnostic d’« idiotie, crétinisme, imbécilité » est 5 288. Or, dans le tableau détaillé des diagnostics par catégorie d’établissement (non reproduit dans le classeur) le total des femmes ayant reçu ce diagnostic est de 5 238. L’examen de ce dernier tableau montre que chaque terme de l’addition est cohérent avec les autres données. L’erreur typographique se situe donc dans le tableau de synthèse ; la valeur correcte est 5 238 et non 5 288 ; c’est celle que j’ai fait figurer dans l’onglet 1934.
Dans la publication annuelle pour l’année 1953, le total des femmes admises dans l’année est indiqué en colonne à 21 953, alors que le calcul donne 22 053. C’est le premier nombre et non le second qui est repris dans les tableaux récapitulatifs. Si on accepte le résultat calculé, des corrections en cascade deviennent nécessaires : le décalage se répercute sur l’effectif de femmes restant au 31 décembre, puis sur le total général dans la publication annuelle et dans les tableaux récapitulatifs. Où est l’erreur ? En ligne, le total des femmes soignées dans l’année ayant reçu un diagnostic de délire chronique d’imagination est indiqué de 883, alors qu’on attendrait 983 (763 existantes au 1er janvier + 220 admises dans l’année). Le croisement des informations obtenues en ligne et en colonne conduit à l’hypothèse d’une erreur typographique portant sur l’effectif de femmes admises dans l’année avec ce même diagnostic, effectif qui serait ainsi de 120 et non de 220. Une fois cette rectification effectuée, tous les résultats sont cohérents. Les corrections en cascade ne sont pas justifiées.
Pour l’année 1946, le tableau récapitulatif publié en 1956 donne 66 468 restants au 31 décembre, alors que celui publié en 1958 donne 66 183. C’est ce dernier effectif qui figure dans la publication annuelle. Faute d’autre source d’information, il est impossible d’aller au-delà de ce constat.
L’année 1977 pose plusieurs problèmes examinés plus loin.
2 – Les données de 1835 à 1841
Il est tentant de placer ces données dans la continuité de celles des asiles. C’est ce que font Meslé et Vallin [Meslé F., Vallin J. La population des établissements psychiatriques : évolution de la morbidité ou changement de stratégie médicale? Population, 1981, Vol.6, p. 1035-1068]. C’est une erreur.
Il s'agit ici des hôpitaux et des hospices non des asiles pour aliénés, qui n'existent en tout état de cause qu'après 1838. Hôpitaux et hospices ont synonymes à l'époque. Il est important de noter l'imprécision des dénominations. Le volume parle des "hôpitaux et autres asiles publics" ce qui n'implique aucune allusion à la loi du 30 juin 1838, laquelle ne contient d'ailleurs pas le mot "asile". Ces établissements ne reçoivent que des indigents domiciliés dans la commune de rattachement. Lorsque de rares personnes étrangères à ces communes y sont reçues, leur prix de journée est très supérieur à celui appliqué aux personnes domiciliées dans la commune. Les hôpitaux et hospices n’ont aucune obligation de recevoir quiconque. Ces établissements peuvent refuser une admission ou la retarder (jusqu’à plusieurs mois), principalement faute de place.
Les asiles d’aliénés reçoivent des indigents sans condition de domicile, ce qui augmente considérablement le territoire de recrutement par rapport aux hôpitaux et hospices. De plus, les asiles sont tenus d’admettre sans délai. Ces dispositions feraient attendre dans les asiles d’aliénés une population très supérieure en nombre à ce qu’elle était dans des établissements liés par une condition de domicile et autorisés à différer les admissions. Or, ce n’est pas le cas.
La seule explication possible à ce phénomène est que, après la création des asiles, des personnes précédemment qualifiées d'aliénées continuent à être reçues dans les hôpitaux et les hospices, mais cessent d'y être dénombrées séparément. En particulier, elles cessent d’être qualifiées comme « aliénées » : elles sont considérées comme des malades (sans autre précision), ou comme des incurables. Dans leur rapport sur la situation des asiles en 1874, les trois inspecteurs généraux des asiles notent que « En dehors des aliénés internés dans les asiles légalement autorisés, il en est d’autres qui sont maintenus soit dans les dépôts, soit dans les hospices » [Constans A., Lunier J., Dumesnil O. Rapport général à M. Le Ministre de l’Intérieur sur le service des aliénés en 1874. Paris, Imprimerie Nationale, 1878, page 266].
3 – Le rapport de Constans, Lunier et Dumesnil
Le rapport de Constans, Lunier et Dumesnil fournit de nombreuses données statistiques, auxquelles tout un chapitre est consacré. En particulier, des résultats portent sur les années 1865 à 1875, et une description détaillée est présentée à propos de l’année 1874, alors qu’aucune publication de la SGF ne paraît pendant la période 1861-1874.
Le rapport est établi par les trois inspecteurs généraux des asiles, ce qui lui confère une autorité officielle. Même s’ils n’appartiennent pas à la SGF, il est logique de penser qu’ils ont eu accès aux mêmes sources. La comparaison entre les nombres fournis pour l’année 1875 dans leur rapport et dans la publication de la SGF montre des écarts minimes. La différence entre les totaux d’ensemble s’explique principalement par l’absence totale d’effectif féminin dans les maisons de santé selon les inspecteurs généraux. Il s’agit vraisemblablement d’une erreur typographique ayant échappé à leur relecture.
Deux conclusions se dégagent de cette confrontation. D’abord, les données publiées par les trois inspecteurs généraux sont aussi fiables que celles de la SGF. D’autre part, l’absence de publication par la SGF ne signifie manifestement pas que les données n’existaient pas. Une recherche dans les archives est indiquée.
4 – Les années manquantes
De 1861 à 1874 inclus, aucune donnée n’est publiée pour l’ensemble des institutions d’assistance, dont font partie les asiles. Manquent ensuite les années 1894 à 1898 inclus, à l’exception de 1895, dont la qualité pose de sérieux problèmes (voir ci-dessous). Une récapitulation publiée en 1947 donne pour cette période des effectifs de malades soignés dans l’année (présents au 1er janvier + admis dans l’année), mais ces données ne sont pas cohérentes avec celles qui sont publiées à l’époque pour les années qui précèdent et qui suivent.
La Première guerre mondiale a pour effet une publication lacunaire de 1914 à 1919 inclus. Les données des années 1945, 1946 et 1947 sont beaucoup moins détaillées que de coutume. À partir de 1965, les résultats sont réduits au minimum. 1981 et 1983 n’ont droit à aucune donnée, avant l’interruption en 1986 (les publications ultérieures de l’Insee reproduisent simplement les nombres fournis par le SESI, service statistique du ministère).
5 – Les transferts et les réintégrations
De 1856 à 1944, les publications annuelles présentent, parmi les différentes catégories de personnes admises, celles qui ont été transférées venant d’un autre asile, et celles qui ont été réintégrées après évasion ou après sortie avant guérison. Jusqu’en 1860, ces catégories servent dans le calcul du « Total des admis », puis, de 1874 à 1944, dans celui du « Total des existants et des admis ». De même, les tableaux précisent les effectifs « sortis par évasion » et « sortis par transfèrement ». À partir de 1945, ces catégories particulières cessent d’être publiées et d’être intégrées dans des calculs intermédiaires. Dans les tableaux récapitulatifs publiés par l’Insee en 1961, 1966 et 1968, les (nombreuses) personnes transférées venant d’un autre asile, ou les personnes (peu nombreuses) réintégrées après évasion ou après sortie avant guérison sont soustraites du total des admis tel qu’il figure dans les publications annuelles. Un effectif égal est soustrait du total des sortis. Le raisonnement conduisant à ces opérations est le suivant : les personnes transférées d’un asile dans un autre ou réintégrées après une sortie temporaire peuvent modifier les effectifs à l’échelle d’un établissement, mais pas à l’échelle nationale, puisqu’une sortie d’un établissement est associé à une admission dans un autre et réciproquement. Ces mouvements n’ont donc pas à être comptés au niveau national. La question mérite attention car la proportion des transferts parmi les entrées évolue le plus souvent entre 15 % et 20 % et ne descend jamais au-dessous de 10 %.
Plusieurs problèmes persistent néanmoins. D’une part, les effectifs sortis par transfert sont en permanence supérieurs de plusieurs centaines aux effectifs admis venant d’un autre asile. Il semble donc y avoir des personnes sorties par transfert sans pour autant être admises dans un autre asile. L’argument en faveur de cette hypothèse est que la correction des effectifs admis et sortis opérée par l’Insee dans ses tableaux récapitulatifs consiste dans les deux cas à soustraire les effectifs admis par transfert (et non les effectifs sortis) ; cet effectif est donc considéré comme la mesure appropriée des mouvements entre établissements psychiatriques. Mais où donc ces personnes sont-elles transférées ? La meilleure hypothèse est qu’il s’agit des hospices, où ces personnes seraient devenues des « vieillards, infirmes et incurables ». Mais rien dans les publications de l’époque ou dans les travaux historiques ne vient conforter cette hypothèse, qui reste donc en suspens.
D’autre part, l’absence des transferts dans les publications à partir de 1945 prive d’une information intéressante par elle-même, car les effectifs concernés sont loin d’être négligeables et il aurait donc été pertinent d’en suivre l’évolution.
Une fois élucidée dans les tableaux récapitulatifs la nouvelle définition des entrées et des sorties (ainsi que le mode de calcul correspondant), il est possible d’identifier une erreur typographique portant sur un millier. Pour l’année 1941, les récapitulations donnent un effectif présent au 31 décembre de 94 030 ; de même, les données annuelles et la récapitulation publiée en 1956 citent elles aussi 94 030 personnes au 31 décembre. Or, ce résultat ne correspond pas aux autres données de la même année.
En appliquant la règle :
Restant au 31 décembre = présents au 1er janvier + admis – sortis – décédés
On trouve (109 958+24 018-17 369-23 577) = 93 030 et non 94 030. Pour comprendre l’écart entre ces résultats, il faut tenir compte du fait que les tableaux récapitulatifs sont corrigés des admissions par transferts et réintégrations. Pour l’année 1941, leur somme est de 4 989, à déduire des données annuelles d’entrés et de sortis pour obtenir celles de la récapitulation. On constate alors une erreur dans le nombre de sortis : les récapitulations comportent 1 000 sortis de trop, (17 369 au lieu de 16 369). Par conséquent, le 31 décembre, il manque les 1 000 personnes comptées à tort comme sorties (93 030 au lieu de 94 030). L’effectif de 94 030 est le bon. C’est l’erreur typographique aux conséquences les plus importantes dans l’ensemble des tableaux de la SGF et de l’Insee.
6 - Les entrées et les sorties au XIXe siècle
Il est tentant de corriger les entrées et les sorties au XIXe siècle comme dans les tableaux récapitulatifs de l’Insee, afin d’éliminer les doubles comptes dus aux transferts. Le principal obstacle vient de ce que les transferts ne sont présentés séparément dans les tableaux qu’à partir de 1856, ce qui laisse des données non corrigées de 1842 à 1855. Les transferts manquent également les années 1887 à 1891 (il n’y a aucune donnée utilisable de 1894 à 1898 inclus) ; la correction n’est alors possible que sous forme d’estimation.
Il n’est pas possible d’estimer les effectifs transférés entre 1842 à 1855. Il s’agit d’une longue période pour laquelle toute interpolation serait hasardeuse. Enfin, les valeurs de 1856 à 1860 inclus ne sont pas stables et peuvent difficilement servir de référence (respectivement 840, 1 057, 1 555, 995 et 1 410).
De 1883 à 1886 inclus, le nombre de personnes transférées est stable (respectivement 2 179, 2 039, 2 065 et 1 930). La moyenne est de 2 053, ce qui est compatible avec les valeurs de 1892 et 1893 (respectivement 2 295 et 2 051). En soustrayant 2 053 des effectifs entrés et sortis totaux, on obtient des effectifs corrigés. Voici ce que donne cette proposition :
7 – L’année 1895
Les données portant sur l’année 1895 semblent spécialement utiles, puisque les données sont très incomplètes en 1894 et de 1896 à 1898. Malheureusement, les résultats de 1895 ont inutilisables en raison d’un grave manque de cohérence. La publication donne des effectifs totaux d’existants au premier janvier, d’admis, de sortis et de décédés qui sont tous nettement inférieurs à ce qu’ils étaient auparavant. Nous verrons ci-dessous que ces effectifs imprimés diffèrent massivement de ce qu’ils devraient être. Le plus surprenant est l’effectif extraordinairement élevé de personnes « transférées d’un autre asile », spécialement en ce qui concerne les asiles départementaux. En 1893, ce groupe est de 893 personnes, de 945 en 1899, et de 1 592 en 1900. Or, à en croire la publication de la SGF, elles seraient de 8 057 en 1895. L’effectif des personnes « admises par suite de rechute » est lui aussi très différents des années voisines. En 1893, elles sont 2 082, 2 610 en 1899 et 2 670 en 1900. Comment comprendre qu’en 1895 leur dénombrement porte sur 5 262 personnes ? Enfin, il existe, comme en 1893, une colonne « Total des admis », dont les résultats imprimés diffèrent nettement des données calculées à partir des autres données du même tableau. Rien ne permet d’expliquer ces nombres aberrants. Aucune correction ne semble possible.
8 – Les données discordantes
Certaines données s’éloignent nettement des niveaux attendus compte tenu des valeurs des années voisines. Des variations aléatoires sont normales, mais jusqu’à un certain point. Par exemple, il y a, en 1879, 13 340 entrés et en 1881, 14 616. Entre ces deux valeurs, s’intercale en 1880 un effectif de 16 835 entrés, nettement plus élevé que ce qui aurait pu être attendu. Cette hausse momentanée est entièrement due à celle des « admis pour la première fois ». Le nombre de personnes sorties en 1880 est lui aussi nettement plus élevé que les années voisines : 10 119 comptés entre 6 692 et 7 504 respectivement en 1879 et 1881. Des écarts de moindre ampleur peuvent être constatés ailleurs, par exemple en 1902 et en 1927.
Ces quelques données discordantes n’ont d’importance que dans les cas où il est utile de disposer de valeurs précises pour une année donnée. Il suffit de les négliger lorsqu’on s’intéresse aux tendances sur la durée.
De 1928 à 1941, la répartition par sexe comporte des oscillations d’une année sur l’autre plus grandes que pendant les autres périodes, ce qui fait peser un doute sur la qualité des données et sur la signification de leur évolution.
9 – Les départements manquants
À plusieurs reprises, une note en bas de page des tableaux annuels nomme certains départements qui n’ont pas transmis leurs données. Les tableaux récapitulatifs publiés en 1956 et 1958 donnent chacun une liste de départements manquants. Ces listes ne concordent pas toujours entre elles. Malgré ces différences, les données publiées sont les mêmes. L’estimation des valeurs manquantes peut parfois être tentée à partir des données par département publiées l’année précédente. Toutefois, ces données ne portent que sur les présents au 31 décembre et jamais sur les admis, les sortis, ni les décédés. J’ai mentionné quelques-uns de ces effectifs sur l’onglet de l’année.
Les effectifs manquants les plus nombreux portent sur les deux départements d’Alsace ainsi que celui de Moselle. Ils sont notés manquants de 1920 à 1927. J’ai inclus dans les onglets correspondants les données disponibles pour ces trois départements en 1928, 1929 et 1930 afin de permettre une estimation pour les années 1920 à 1927. Cette estimation n’est pas de bonne qualité pour deux raisons : d’une part, la période est longue, et d’autre part, elle est marquée à l’échelle nationale par une hausse des effectifs présents ; il serait hasardeux de vouloir extrapoler à l’échelle de trois départements le taux de hausse observé à l’échelle nationale.
Le total des existants au 1er janvier dans ces trois départements est presque stable sur les trois années 1928, 1929 et 1930 (respectivement 3 716, 3 814 et 3 898, c’est-à-dire 1 628, 1 664, et 1 781 hommes et 2 088, 2 150, 2 117 femmes). L’effectif moyen sur les trois années est de 3 809. En ajoutant cet effectif moyen à l’effectif national publié, on obtient un résultat qui est sans doute un peu trop élevé, surtout au début de la période. Voici de que donne cette proposition de correction :
En 1937, 1938 et 1939, les trois mêmes départements ont été empêchés par la guerre de transmettre leurs données. J’ai inclus dans les onglets correspondants les données disponibles pour ces trois départements en 1934, 1935 et 1936, afin de permettre une estimation pour les années 1937-1939. L’estimation est meilleure que la précédente car la période concernée est plus courte.
Le total des existants au 1er janvier dans ces trois départements est stable sur les trois années envisagées (respectivement 4 216, 4 315, et 4 562, c’est-à-dire 1 916, 2 030 et 2 156 hommes, et 2 300, 2 285 et 2 406 femmes). L’effectif total moyen sur les trois années est de 4 364.
Ajouté à l’effectif publié, il fournit une estimation de l’effectif complet. Voici de que donne cette proposition de correction :
10 – Les variations du territoire
Aucune donnée portant sur l’assistance n’est publiée de 1861 à 1874 inclus. Lorsque ces données sont à nouveau disponibles en 1875, le champ géographique de l’enquête s’est notablement modifié. Nice et la Savoie ont été « rattachés » à la France en 1861. L’Alsace et la Moselle ont été annexées par l’Allemagne en 1870. Cette annexion durera jusqu’en 1918, et se reproduira de 1940 à 1944.
11 - Les années 1945 à 1948 dans les récapitulations publiées en 1958 et 1961
Pour les années 1945 à 1948, les tableaux annuels ne présentent que les effectifs présents au 31 décembre alors que les récapitulations de 1958 et de 1961 donnent les entrés, les sortis et les décédés. Les présents au 31 décembre (non mentionnés en 1961) concordent sauf pour 1947, où l’écart est modéré (600 personnes sur presque 70 000, soit moins de 1 %).
Cette confrontation plaide pour l’utilisation des récapitulations pour combler les manques des tableaux annuels.
12 – L’élargissement du champ de l’enquête en 1958
Les relevés de l’Insee indiquent que sont compris à partir de 1958 les services libres et les services spéciaux pour enfants, précédemment exclus de l’enquête. Les services libres ne reçoivent que des personnes qui ne sont pas internées. D’autres personnes qui ne sont pas non plus internées peuvent néanmoins figurer dans les autres services aux côtés de personnes internées. Le changement de champ n’apporte pas de modification visible sur l’évolution des effectifs existants au premier janvier.
Il n’en va pas de même pour les effectifs entrés dans l’année, qui témoignent à partir de 1958 d’une hausse importante qui se maintient jusqu’à l’interruption du recueil par l’Insee.
Une nette inflexion s’observe également parmi les sortis dans l’année.
La croissance des effectifs existants au premier janvier n’est pas affectée par l’élargissement du champ de l’enquête. La conjonction d’une accélération de la hausse des entrées et des sorties, sans changement parmi les existants au 1er janvier oriente vers l’ajout de nombreux séjours courts, inférieurs à un an. La modification n’est pas ponctuelle ; ce n’est pas comme si un simple palier supplémentaire avait été ajouté. L’accélération des effectifs admis se poursuit jusqu’à la fin de la période de recueil. La nouvelle population ajoutée à l’ancienne lui apporte sa dynamique propre. Cet exemple montre à nouveau à quel point il peut être trompeur de borner l’analyse aux seuls existants un jour donné (1er janvier ou 31 décembre).
13 – Les données de 1965 à 1986
De 1965 à 1986, les données publiées par l’Insee sont beaucoup plus succinctes. Elles ne comportent que les effectifs globaux (sans distinction selon le sexe) des existants au 1er janvier, des admis dans l’année, des sortis dans l’année et des décédés dans l’année.
Il y a une importante rupture inexpliquée mais simultanée dans l’effectif des entrés et des sortis dans l’année à partir de 1975. L’hypothèse la plus probable est celle d’un changement de définition. En effet, il y a deux logiques parallèles : du point de vue de la loi de 1838, une sortie en permission ou en sortie d’essai suivie d’un retour n’interrompt pas le séjour, alors que du point de vue comptable, le prix de journée cesse d’être perçu, exactement comme si le séjour était interrompu. Ainsi, il y aurait eu passage de la logique de la loi de 1838 à la logique comptable, ce qui expliquerait également l’absence d’effet sur le nombre de présents au 1er janvier. Si l’hypothèse est juste, le brusque saut constaté en 1975 correspondrait au nombre de sorties d’essai suivies de retour (73 249 entrées et 73 335 sorties supplémentaires, c’est-à-dire le même effectif, à une erreur négligeable près).
D’autre part, l’effectif calculé des restants au 31 décembre correspond à celui des présents au 1er janvier de l’année suivante, sauf au 31 décembre 1972 (111 086 et 112 176 le lendemain, ce qui peut être considéré comme négligeable) mais surtout au 31 décembre 1977 (121 092 et 106 720 le lendemain), au 31 décembre 1979 (114 101 et 99 794 le lendemain), au 31 décembre 1984 (83 652 et 80 190 le lendemain), et au 31 décembre 1985 (121 641 et 78 894 le lendemain) ce qui suggère fortement la présence d’erreurs dans les données de 1977, 1979, 1984 et 1985.
De plus, pour l’année 1977, les éditions successives de l’Annuaire statistique de l’Insee donnent des chiffres différents. Certains calculs sont faux. L'effectif publié en 1982 des soignés dans l'année est de 363 592, au lieu de 373 592 qui est le total des existants au 1er janvier et des admis. La même année de publication, l'effectif annoncé des restants au 31 décembre est de 117 613, au lieu de 128 438, qui est le résultat des calculs habituels. En l’absence d’explication, il est difficile de comprendre ce qui a pu se produire. Dans les deux cas, l’effectif des sortis est anormalement faible par comparaison avec 1976 et 1978 (voir le tableau ci-dessous).
14 – Les diagnostics
De 1835 à 1841, l’enquête porte sur les hôpitaux et non sur les asiles. Trois diagnostics sont publiés : idiots, épileptiques, et fous. Après cette enquête, il n’y a plus de diagnostic publié dans les hôpitaux.
Il n’y a pas de diagnostic dans les établissements psychiatriques jusqu’en 1853, quand paraissent de nombreuses informations, mais parmi celles-ci, les seuls diagnostics sont les idiots et les crétins (le crétinisme est un syndrome comportant en particulier un retard mental et causé par une carence en iode). Après une interruption, les données distinguent deux groupes à partir de 1856 : les fous d’une part, les idiots et les crétins d’autre part.
Toutes les données d’assistance cessent de paraître de 1861 à 1874. Quatre catégories sont distinguées dès la reprise en 1875. Cette fois, ce ne sont plus les personnes qui sont désignées, mais les maladies : folie simple et épileptique, folie paralytique (la folie paralytique, également appelée paralysie générale, est liée à une syphilis cérébrale, dont l’origine microbienne n’est pas encore connue), démence sénile et, toujours réunis, idiotie et crétinisme.
En 1888, une nouvelle catégorie est adjointe aux quatre précédentes : la folie alcoolique. Les effectifs comptés dans cette catégorie se traduisent surtout par une diminution dans la catégorie « folie simple », mais aussi dans une moindre mesure dans la catégorie « démence ». Les deux autres catégories (folie paralytique et idiotie) ne changent pas. La publication des diagnostics est suspendue de 1889 à 1891 inclus, mais reprise ensuite selon le schéma de 1888 jusqu’en 1913.
L’analyse des données par diagnostic sur cette période pose plusieurs problèmes. Il n’y a pas de données manquantes, c’est-à-dire des personnes n’ayant reçu aucun diagnostic. La correction des effectifs fonctionne bien pour les entrées mais beaucoup moins pour les sorties avec parfois des résultats impossibles (négatifs). Malgré cela, la cohérence globale est de bonne qualité la plupart du temps, c’est-à-dire que l’effectif calculé au 31 décembre n’est pas très différent de celui constaté le lendemain 1er janvier de l’année suivante. Il existe toutefois quelques années où la cohérence est mauvaise (écart supérieur à 5 %, exceptionnellement supérieur à 10 %). Enfin, à partir de 1908, alors qu’il n’y a aucun phénomène apparent dans les données d’ensemble, tout se passe comme s’il y avait un changement dans les modes de calcul des sorties par diagnostic, avec des données soudain en rupture avec celles des années précédentes, et des données aberrantes, principalement pour la folie alcoolique, la folie paralytique et les démences, dans une moindre mesure pour la folie simple et l’idiotie.
En 1914 est mise en place une liste de neuf diagnostics :
- Idiotie crétinisme
- Manie mélancolie
- Epilepsie
- Folie des dégénérés sans antécédent alcoolique
- Folie des dégénérés avec antécédent alcoolique
- Alcoolisme aigu ou chronique
- Paralysie générale
- Démence sénile
- Autres maladies mentales
Cette nomenclature reste en vigueur jusqu’en 1942 inclus, avec de légères modifications. On peut dire schématiquement que les deux catégories de « folie des dégénérés » désignent des troubles aigus par opposition aux troubles chroniques. C’est ce que détaille l’analyse historique conduite par Jean Garrabé [Jean Garrabé. Le délire : une approche historique. Partie I. L’Information Psychiatrique, 2024, 100(6), 435-444] : « Valentin Magnan (1835-1916) isole parmi "les psychoses ou folies proprement dites" la folie des dégénérés, groupe qui comporte les dégénérés supérieurs cible de la forme la plus spécifique des folies dégénératives : le délire d’emblée qui fera l’objet de la thèse en 1886 de Maurice Legrain (1860-1939). Pour Magnan, ce sont par contre, les sujets ne présentant pas de stigmates de dégénérescence qui sont exposés au délire chronique systématisé ou à la folie intermittente. » La catégorie « Manie mélancolie, délire de persécution », nettement plus nombreuse que la réunion des deux catégories de « folie des dégénérés », semble être encore profondément marquée par la définition ancienne de la manie, qui est une forme de folie durable. L’adjonction du délire de persécution en 1921 oriente nettement dans ce sens. La catégorie change complètement de signification en 1943 (voir ci-dessous).
Deux précisions sont ajoutées en 1921 : « Idiotie, crétinisme » devient « Idiotie, crétinisme, imbécilité », et « Manie mélancolie » devient « Manie, mélancolie, délire de persécution ». En 1925, « Démence sénile » devient « Démence sénile, organique, etc. ».
Une catégorie apparemment simple comme celle de « Démence sénile » est utilisée pour classer des troubles du jeune âge ou de l’adulte dès lors que leur origine organique semble avérée, comme le montre la répartition par âges des données à partir de 1920. En 1920, les personnes de moins de 65 ans ayant reçu un diagnostic de démence sénile représentent 40 % de l’effectif total de ce diagnostic parmi les présents au 31 décembre. C’est sans doute la raison pour laquelle l’intitulé devient « Démence sénile, organique, etc. » à partir de 1925.
En 1943, c’est une entreprise beaucoup plus ambitieuse qui se manifeste, avec pas moins de 35 catégories.
- Idiotie
- Imbécillité
- Débilité mentale
- Crétinisme
- Troubles du caractère
- Troubles de l'émotivité
- Perversions instinctives
- Psychonévroses, neurasthénie, psychasthénie
- Etat maniaque
- Etat mélancolique
- Psychose périodique
- Etats délirants aigus, bouffée délirante
- Etats délirants chroniques hallucinatoires
- Etats délirants chroniques interprétation
- Etats délirants chroniques revendication
- Etats délirants chroniques imagination
- Démences précoces, schizophrénie, confusions mentales chroniques
- Confusions mentales aiguës, primitives, délire aigu, encéphalites psychosiques
- Alcoolisme aigu
- Alcoolisme chronique
- Alcoolisme démentiel
- Autres intoxications
- Paralysie générale
- Syphilis cérébrale
- Troubles mentaux du tabès
- Démences organiques par artériosclérose
- Démences organiques par lésions circonscrites
- Démences séniles
- Psychoses pré-séniles ou d'involution
- Démences secondaires, vésaniques
- Epilepsie
- Psychopathie de l'encéphalopathie épidémique
- Etats psychopathiques atypiques
- Non aliéné
- Simulateur
Je ne mentionne pas les quelques évolutions rédactionnelles, qui ne modifient en rien la classification. Les 35 catégories restent néanmoins en vigueur jusqu’en 1959, après quoi plus aucun diagnostic n’est publié par l’Insee, le relais étant pris par l’Inserm après un court hiatus.
Au-delà de la subdivision des classes en catégories plus fines, cette nouvelle classification introduit des modifications de fond. Cette fois, manie, mélancolie et psychose périodique sont regroupées, alors que le délire de persécution trouve désormais une place dans l’un ou l’autre des états délirants chroniques. Autrement dit, manie et mélancolie cessent d’être des variétés de la folie au long cours, pour devenir très précisément des troubles de l’humeur. Les deux formes de « folie des dégénérés » disparaissent. Une toute nouvelle classe finement subdivisée est consacrée à la schizophrénie et aux délires. Ces évolutions conceptuelles sont faciles à dater dans les nomenclatures, mais beaucoup moins dans les pratiques. L’interprétation des diagnostics justifie donc beaucoup de prudence. Rien ne permet d’affirmer que les nomenclatures proposées ont été immédiatement comprises et utilisées de manière univoque dans l’ensemble du pays. Réciproquement, il est possible que certains praticiens aient anticipé le changement administratif.
15 – Les âges
Les premières données par âge sont publiées en 1853 : « âge au moment de l'admission des aliénés traités en 1853 » (traités = existants au 1er janvier + admis dans l’année), « âge dans le mois de la guérison des aliénés guéris en 1853 », et « âge dans le mois du décès des aliénés décédés en 1853 ». Les tranches d’âge sont décennales à partir de 20 ans, sans césure claire entre tranches, avec une séparation à 14 ans pour les plus jeunes. Pour les aliénés guéris ou décédés, la tranche supérieure commence à 60 ans et non 70.
- Au-dessous de 14 ans
- 14 à 20 ans
- 20 à 25 ans
- 25 à 30 ans
- 30 à 35 ans
- 35 à 40 ans
- 40 à 50 ans
- 50 à 60 ans
- 60 à 70 ans
- 70 ans et au-dessus
- Age inconnu
Il n’y a plus de donnée par âge avant la période 1914-1919, où est publiée la « répartition par âge des aliénés présents au 31 décembre dans 52 établissements ». Il s’agit de la Première guerre mondiale, et les données sont très lacunaires. Cette fois, la séparation entre groupes d’âge a lieu de dix ans en dix ans à partir de 15 ans jusqu’à 64 ans, sans ambiguïté entre groupes, et avec une tranche particulière de 65 à 69 ans et la dernière au-delà de 70 ans. Il n’y a plus de catégorie réservée pour les cas sans information.
- Moins de 15 ans
- De 15 à 19 ans
- De 20 à 24 ans
- De 25 à 34 ans
- De 35 à 44 ans
- De 45 à 54 ans
- De 55 à 64 ans
- De 65 à 69 ans
- 70 ans et plus
Le tableau conserve les mêmes tranches d’âge et s’enrichit beaucoup à partir de 1920 et jusqu’en 1942 inclus, sous le titre « Répartition par âge et par nature de folie des aliénés restant au 31 décembre et des aliénés décédés ». Toutefois, les données manquantes entre 1920 et 1942 créent d’importantes difficultés lorsqu’il s’agit d’interpréter les résultats : les lacunes ne produisent pas seulement une incertitude sur les valeurs année par année, elles rendent problématique l’étude de l’évolution dans le temps, en raison de leur variabilité.
La première difficulté dans l’étude de la répartition des existants par âge de 1920 à 1942 est l’importance des données manquantes. Pour calculer les données manquantes, je compare les effectifs totaux des existants par âge au 31 décembre avec les effectifs au 1er janvier de l’année suivante dans le tableau général des mouvements. De plus, je ne corrige pas ces dernières données des départements manquants d’Alsace Moselle, puisque cette correction est impossible pour la répartition par âges : maintenir cette correction, ce serait comparer des données ne couvrant pas le même champ. En 1920, il manque 12 % de l’effectif total. De 1921 à 1927, les données manquantes évoluent autour de 8 % ; elles sont un peu plus fréquentes chez les hommes que chez les femmes. Elles diminuent ensuite, mais de 1930 à 1933 inclus, il n’y a aucune donnée manquante. Les années suivantes, il manque entre 1 % et 5 % de données, ce qui reste dans une marge d’erreur acceptable. En 1942, ce taux monte à 12 %, ce qui peut aisément s’expliquer par les conditions de travail dégradées par la guerre.
Jusqu’en 1927 inclus, les données manquantes chez les existants par âge produisent une marge d’incertitude sur les valeurs année par année, et sur leur évolution dans le temps. De même, rien ne permet d’affirmer que les lacunes sont uniformément réparties selon les âges.
Il n’en va pas de même pour les décès par âge entre 1920 et 1942, car l’écart entre le total des différentes tranches d’âge par rapport au nombre de décès inscrits dans le tableau d’ensemble n’atteint 10 % qu’en 1920 et évolue les autres années entre 4 % et 6 %, avec huit années où l’écart est nul ou presque (1930-1933, 1937-1942). Ce ci rend légitime la standardisation des décès sur l’âge.
L’année 1943 voit arriver une statistique très ambitieuse, avec trois tableaux comprenant la répartition par âges : « Répartition par âge des aliénés restant au 31 décembre », la « Répartition par âge des aliénés décédés dans l'année », et la « Répartition par âge des aliénés admis dans l'année ». Ces trois tableaux ne sont publiés que pendant deux ans, 1943 et 1944. De nouvelles classes d’âge sont définies :
- Moins de 16 ans
- De 17 à 19 ans
- De 20 à 29 ans
- De 30 à 39 ans
- De 40 à 49 ans
- De 50 à 59 ans
- De 60 à 69 ans
- Plus de 70 ans
La même année, dans le tableau « Répartition par âge des aliénés admis dans l'année », les moins de 16 ans sont répartis en deux groupes :
- Moins de 8 ans
- De 8 à 16 ans
En 1944, cette subdivision avant 16 ans est également utilisée pour la « Répartition par âge des aliénés décédés dans l'année ».
En 1945 et 1946, on revient à la répartition définie en 1943, sans donnée par sexe, contrairement au titre du seul tableau publié, la « Répartition par âge, sexe et nature de maladie des psychopathes en traitement au 31 décembre ».
De 1947 à 1958, les données par sexe figurent à nouveau. Il y a un seul tableau, la « Répartition par âge, sexe et nature de maladie des psychopathes en traitement au 31 décembre ». Le découpage des tranches d’âge avant 20 ans est modifié :
- Moins de 10 ans
- De 10 à 19 ans
Après 1958, l’Insee ne publie plus de donnée par âge.
B - Comparaison Insee-Inserm 1961-1978
Pendant la période 1961-1978 nous disposons à la fois de données de l’Insee et de l’Inserm.
Dans son premier rapport, pour l’activité de l’année 1961 [Sadoun R. Statistiques médicales des établissements psychiatriques. Année 1961. Bulletin de l'Institut National d'Hygiène. 1964, Tome 19, n°4, p. 587], Sadoun écrit : « Les données statistiques publiées ici concernent l'activité des services d'adultes des établissements psychiatriques français en 1961. Ce sont les premières données élaborées à partir des nouveaux états statistiques SP 5 et SP 5/S, mis en service en 1962 par la Section de Psychiatrie de l'Institut national d'hygiène. Comme on le sait, cet organisme assume depuis cette date en matière de statistique psychiatrique les responsabilités incombant précédemment à l'Institut national de la statistique et des études économiques. Ce nouveau système d'états a remplacé l'état MS 5 et le tableau VI précédemment utilisés. Depuis le 1er janvier 1962, le document de base de la statistique psychiatrique hospitalière est représenté par l'état SP 5/S qui rassemble annuellement les données de chaque service hospitalier. Le caractère médical de cet état est souligné par le fait qu'il est établi au niveau du service et sous la responsabilité du médecin-chef de service. En ce qui concerne les services d'adultes, les états SP 5/S fournissent pour l'année considérée trois ordres de données: la répartition par sexe, âge et catégorie diagnostique des malades existants au 31 décembre, le mouvement des entrées et des sorties ou décès de l'année par sexe, catégorie diagnostique et type d'admission ou de sortie, la répartition par sexe et par âge des différents types d'admissions, de sorties et des décès de l'année. Les établissements psychiatriques dont les services sont tenus d'établir annuellement un état SP 5/S sont les établissements psychiatriques publics: hôpitaux psychiatriques départementaux ou autonomes, établissement national de Saint-Maurice, quartiers psychiatriques d'hôpital général ou d'hospice, établissements psychiatriques faisant fonction d'établissements public, colonies familiales et centres de rééducation pour alcooliques. »
Cette description signale plusieurs innovations. D’abord ce n’est plus le secrétariat de direction qui effectue pour l’ensemble de l’établissement la synthèse des rapports annuels des médecins-chefs, avant de transmettre ce document à l’échelon régional du Service des statistiques, qui l’adresse ensuite aux bureaux nationaux. C’est chaque médecin-chef qui adresse directement son rapport à l’Inserm. Cette suppression de deux échelons intermédiaires est favorable à la qualité et à l’exhaustivité du recueil. Nicole Quémada était en contact téléphonique régulier avec les secrétaires des médecins-chefs, qu’elle a rapidement connues par leur nom, et avec qui elle pouvait lever les doutes ou les ambiguïtés survenant lors de la préparation des rapports annuels. Ensuite, les trames fournies pour les rapports ne sont plus exactement les mêmes. Enfin, il existe entre l’Inserm et l’Insee deux différences dans le champ des enquêtes. Leur portée est relativement modérée sans qu’il soit possible de la mesurer précisément. Ainsi, les données de l’Inserm n’incluent pas les services pour enfants, qui figurent à l’Insee. En revanche, l’Inserm mentionne l’inclusion des centres de rééducation pour alcooliques, qui vont au-delà des services relevant de la loi du 30 juin 1838 (champ de l’Insee) ; la loi sur les alcooliques dangereux date du 15 avril 1954.
La confrontation des résultats entre les deux enquêtes ne montre pas les mêmes caractères selon les années. Aucun des écarts n’est négligeable. En 1961, l’Inserm et l’Insee donnent exactement le même nombre d’entrées, mais il y a davantage de sorties à l’Insee, ce qui ferait attendre un effectif plus faible au 31 décembre. Or c’est l’inverse : l’Insee donne un plus grand nombre de personnes présentes en fin d’année. L’année 1961 est celle de la mise en place du nouveau recueil organisé par l’Inserm. On peut supposer que des incertitudes ont été liées à la nouveauté, puis dissipées les années suivantes. De 1963 à 1968 inclus, l’Insee et l’Inserm publient des effectifs identiques de personnes décédées et de présents au 31 décembre, alors que le nombre des admis et des sortis diffère. L’ampleur des écarts n’est pas la même pour les entrés et les sortis, et varie d’une année à l’autre. À partir de 1969, l’effectif des présents au 31 décembre donné par l’Inserm est en permanence inférieur à celui de l’Insee, à l’exception de l’année 1972 où les deux sont égaux. De plus, à partir de 1972, cet effectif baisse plus fortement selon l’Inserm que selon l’Insee. À partir de 1969, sauf encore pour l’année 1972, le nombre de personnes décédées n’est pas le même dans les deux enquêtes. Ce nombre est plus élevé dans les données de l’Inserm, sauf en 1970 où il est plus faible. D’une manière générale, aucune hypothèse explicative ne s’impose pour rendre compte de l’ensemble des phénomènes observés, en dehors de la différence de champ des enquêtes, qui ne peut pas suffire à elle seule.
Enfin, la soudaine augmentation parallèle des entrés et des sortis observée à l’Insee à partir de 1975 (voir ci-dessus) n’existe pas à l’Inserm.
En conclusion, et compte tenu des incertitudes à propos de l’année 1961 à l’Inserm, il semble préférable de retenir à partir de 1963 les données de l’Inserm et d’écarter celles de l’Insee. En effet, les résultats de l’Insee posent de nombreux problèmes : le décrochage des effectifs admis et sortis en 1975, les erreurs probables en 1972, 1979, 1984 et 1985, et les erreurs certaines en 1977.
C - Inserm
1 – Les erreurs typographiques
Il existe des erreurs typographiques occasionnelles et de faible conséquence. Elles sont très rares. Elles ont été détectées et corrigées comme décrit précédemment. Je n’ai trouvé qu’une seule erreur notable : dans le tableau « Répartition par sexe et par type d'existant des malades existants au 31/12/1976 », l’effectif imprimé des femmes présentes est de 44 319, alors qu’il devrait être de 43 319.
Dans le tableau pour l’année 1968, « répartition par sexe, âge et catégorie diagnostique des admissions de 1968 », presque tous les totaux en colonnes pour les femmes sont faux, alors que les données par diagnostic et les totaux en ligne sont justes. Il s’agit d’erreurs localisées, aisément corrigées.
2 – Personnes admises ou admissions ?
« Les données concernant le mouvement des hospitalisations peuvent être considérées à la rigueur comme des données sur le mouvement des malades, mais, du fait des rechutes et récidives au cours d’une même année, le nombre de malades que représente ce mouvement est notablement inférieur à celui des hospitalisations. Un système de fiches individuelles permettrait d’établir des statistiques de malades. » [Sadoun R. Statistiques médicales des établissements psychiatriques. Année 1961. Bulletin de l'Institut National d'Hygiène. 1964, Tome 19, n°4, p. 626]
Certains résultats dénombrent des personnes en fonction d’évènements qui ne se répètent pas : existant au 31 décembre, entré pour la première fois, et décédé. D’autres portent sur des évènements qui peuvent se répéter : admissions et sorties. Le nombre des personnes concernées par des ces évènements répétés prend de l’ampleur après la Deuxième guerre. Plus précisément, leurs effectifs étaient faibles auparavant : dans les publications de la SGF, la mention « admis pour cause de rechute » ne signifiait pas qu’une même personne avait présenté plusieurs mouvements la même année. Dans ce dernier cas, la catégorie pertinente était : « Réintégrés après évasion ou sortis avant guérison », aux effectifs réduits. Après la Deuxième guerre, les admissions à nouveau la même année deviennent courantes et de plus en plus fréquentes. Cette modification des pratiques accompagne le raccourcissement des durées d’hospitalisation.
3 – Cohérence des données
La cohérence des données est étudiée selon une méthode analogue à celle mise en œuvre ci-dessus à propos des statistiques de la SGF. L’Inserm ne publie pas les effectifs présents au 1er janvier. Il est facile de les reconstituer à partir du nombre d’existants au 31 décembre de la même année selon la formule :
Présents au 1/1 = Existants au 31/12 + Sortis + Décédés - Entrés
La vérification consiste alors à comparer les effectifs publiés au 31/12 avec ceux calculés à la date du lendemain, le 1/1 de l’année suivante. Or, les nombres calculés (1/1) sont presque toujours inférieurs à ceux de la veille (31/12), sauf en 1969, 1972 et 1975 où ils sont supérieurs. Ces écarts sont toujours au-dessous de 2 % de l’effectif des existants au 31 décembre, sauf en 1974 (3 %). Le problème de la cohérence des données présente donc une ampleur très modérée, analogue à celle constatée à la SGF et à l’Insee. Il s’agit de la marge d’erreur à laquelle on peut s’attendre dans une enquête exhaustive de cette ampleur.
4 – Les entrées et sorties par transfert
Il est intéressant de poser la question par principe. Elle n’a pas du tout la même ampleur que dans les données de la SGF, car la part des entrées et des sorties par transfert évolue entre 1 % et 2 % du total de chaque type de mouvement. L’éventuelle correction des erreurs aurait un effet pratique très limité.
Les consignes de l’Inserm à propos des entrées par transfert sont détaillées : « Admission par transfert. Doit être comptée comme une admission par transfert, toute entrée d'un malade transféré d'un établissement psychiatrique public ou privé, d'un service d'hôpital général spécialisé en neuro-psychiatrie ou d'une maison de santé privée spécialisée. Toutefois, lorsque le passage dans un service hospitalier spécialisé en neuro-psychiatrie ou dans une maison de santé privée spécialisée ne peut raisonnablement être considéré comme un séjour, ce passage ne sera pas considéré comme une hospitalisation et l'entrée ne sera pas comptée comme admission par transfert. Cette remarque s'applique également, bien entendu, aux entrées précédées d'un passage dans un service dit d'admission . » [Sadoun R. Statistiques médicales des établissements psychiatriques. Année 1961. Bulletin de l'Institut National d'Hygiène. 1964, Tome 19, n°4, p. 607]
Cette définition est modifiée à partir des données portant sur l’année 1968 : « Doit être comptée comme un transfert, toute admission d'un malade venant d'un milieu psychiatrique défini comme ci-dessus. Toutefois, lorsque le passage dans le milieu psychiatrique d'où vient le malade est d'une durée inférieure à 5 jours, ce passage ne sera pas considéré comme un séjour et l'admission ne sera pas enregistrée comme une admission par transfert. Cette remarque s'applique également, bien entendu, aux entrées précédées d'un passage dans un service dit d'admission . » [Sadoun R., Quémada N. Les nouveaux états statistiques utilisés en psychiatrie. Bulletin de l'Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale. 1969, Tome 24, n°2, p. 203]
Cette modification a pour but de lever l’imprécision sur le sens de l’expression « ne peut raisonnablement être considéré comme un séjour ». Plutôt que de laisser chacun apprécier ce qui est ou non raisonnable, les consignes fixent un seuil de 5 jours. Toutefois, la consigne ne donne pas la manière d’enregistrer la présence d’une personne si cette présence n’est pas un séjour, ce qui laisse subsister une incertitude. D’autre part, les professionnels qui remplissent les formulaires (les « états ») à l’intention de l’Inserm peuvent se trouver devant une difficulté pratique si les définitions administratives diffèrent de celles de l’Inserm. Respecter les consignes de l’Inserm implique alors de reprendre les dossiers, ce qui prend du temps. La possibilité existe alors de suivre les consignes administratives et de négliger celles de l’Inserm.
Les consignes à propos des sorties par transfert ne créent pas de telles difficultés : « Transfert dans un autre établissement. Doit être comptée comme transfert dans un autre établissement, toute sortie d'un service effectuée en vue du transfert dans un autre établissement psychiatrique public ou privé, un service d'hôpital général spécialisé en neuro-psychiatrie ou une maison de santé privée spécialisée . » [Sadoun R. Statistiques médicales des établissements psychiatriques. Année 1961. Bulletin de l'Institut National d'Hygiène. 1964, Tome 19, n°4, p. 614]
En théorie, les effectifs entrés et sortis par transferts devraient être égaux. Ce n’est pas le cas. Ce décalage ne fait l’objet d’aucun commentaire. Le nombre d’entrées par transfert est particulièrement élevé en 1961 et 1963. Il baisse nettement en 1964, puis plus lentement et de manière presque continue jusqu’en 1976 avant une hausse isolée en 1978. En revanche, l’effectif des personnes sorties par transfert semble évoluer autour d’une moyenne de 2 400. Jusqu’en 1970, il y nettement plus d’entrées que de sortie par transfert. En 1973, 1975 et 1976, c’est l’inverse : davantage de sorties que d’entrées, mais en nombre faible. Les écarts entre entrées et sorties diminuent en 1970, puis, de 1971 à 1976, à l’exception de l’année 1973, ils peuvent être considérés comme négligeables, de sorte qu’il semble y avoir une tendance à l’harmonisation du recueil.
5 – Les diagnostics
De 1961 à 1967, l’Inserm utilise une nomenclature diagnostique en 15 catégories (réduite à 14 par la réunion des catégories 6 et 7) :
- 01 Psychose maniaque dépressive. Manies. Mélancolies
- 02 Etats confusionnels aigus ou subaigus
- 03 Syndromes délirants aigus. Bouffées délirantes
- 04 Schizophrénies chroniques. Démence précoce
- 05 Délire chroniques systématisés
- 06-07 Psychoses alcooliques. Alcoolisme chronique
- 08 Paralysie générale
- 09 Troubles mentaux de l'épilepsie. Epilepsies
- 10 Etats démentiels de la sénilité et démences séniles
- 11 Troubles mentaux symptomatiques d'une affection cérébrale ou générale autre que citée
- 12 Névroses. Etats névrotiques. Affections psychosomatiques
- 13 Etats de déséquilibre mental. Personnalités psychopathiques. Perversions. Toxicomanies (en dehors de l'alcoolisme)
- 14 Etats d'arriération. Oligophrénies
- 15 Etats non classables dans les catégories précédentes
Pour les données de 1968 à 1978, l’Inserm met en pratique une nomenclature qui reste en 15 catégories même si elle est tirée de la « Classification française des troubles mentaux » en 20 diagnostics :
- 01 Psychose maniaque dépressive. Manies. Mélancolies
- 02 Schizophrénies chroniques
- 03 Délires chroniques
- 04 Psychoses délirantes aigues et états confusionnels
- 05-12 Psychoses alcooliques et alcoolisme en dehors de psychoses alcooliques
- 06 Troubles mentaux de l'épilepsie
- 07 Etats d'affaiblissement de la sénilité et démences préséniles
- 08-09 Troubles mentaux symptomatiques d'une affection cérébrale autre et troubles mentaux symptomatiques d'une affection générale autre
- 10 Névroses et états névrotiques
- 11 Personnalités et caractères pathologiques. Perversions. Toxicomanies (en dehors de l'alcoolisme)
- 13 Etats dépressifs non psychotiques
- 14-15 Troubles psychosomatiques. Troubles somatiques vraisemblablement psychogènes. Troubles isolés non classables ailleurs
- 16-17 Niveau limite. Débilité mentale
- 18-19 Arriération mentale moyenne. Arriération mentale profonde
- 20 Etats non classables dans les catégories précédentes
L’introduction de nouvelles catégories n’a pas seulement pour effet d’apporter une plus grande précision à l’intérieur d’une catégorie globale préexistante, comme c’est par exemple le cas pour le retard mental, désormais divisé en deux selon la gravité. Il y a également des dérivations entre catégories. Ainsi, le nombre d’entrées et de sorties de personnes ayant reçu un diagnostic de « 01 Psychose maniaque dépressive. Manies. Mélancolies » diminue nettement en 1958 ; l’effectif des existants baisse lui aussi, dans une moindre mesure. Cette évolution s’explique par l’introduction de nouvelles catégories, principalement « 13 Etats dépressifs non psychotiques », mais aussi à la marge « 14-15 Troubles psychosomatiques. Troubles somatiques vraisemblablement psychogènes. Troubles isolés non classables ailleurs ». Ces nouvelles catégories font beaucoup augmenter l’ensemble des névroses, aux dépends de la catégorie 01. Ce brusque changement peut s’interpréter rétrospectivement en disant que le diagnostic 01 a été un diagnostic par défaut, faute de mieux, et que l’apparition de la nouvelle catégorie 13 a répondu à une insatisfaction en apportant aux psychiatres une classe qui leur semblait convenir davantage. Cet épisode montre à nouveau les nécessaires précautions à prendre avant d’examiner un diagnostic (isolément ou bien en rapport avec d’autres diagnostics), comme cela a pu être le cas de la schizophrénie.
Dans le graphique ci-dessus, PMD est une abréviation pour la catégorie 01, et Névrose recouvre jusqu’en 1957 inclus la catégorie 12, puis, à partir de 1958, la somme des catégories 10, 13, et 14-15. La baisse des effectifs de PMD en 1958 se reporte sur la hausse des effectifs de névrose.
On remarque aussi en 1968 la disparition de la classe « 08 Paralysie générale » qui est incluse dans une catégorie plus large « 08-09 Troubles mentaux symptomatiques d'une affection cérébrale autre et troubles mentaux symptomatiques d'une affection générale autre ».
6 – Les âges
Dès 1961 et jusqu’à 1967, l’Inserm met en place de nombreux tableaux basés sur les âges (et les sexes) : existants au 31 décembre, entrés dans l’année, sorties et décès. Un tableau plus détaillé fournit la répartition par âge et par sexe des présents au 31 décembre pour les principaux diagnostics. Les tranches d’âge sont les suivantes :
- Moins de 15 ans
- 15 à 24 ans
- 25 à 34 ans
- 35 à 44 ans
- 45 à 54 ans
- 55 à 64 ans
- 65 à 74 ans
- 75 ans et plus
À partir de 1968 et jusqu’en 1978, ces tableaux deviennent plus détaillés : ils sont tous par sexe, âge et diagnostics, sans se limiter parmi ces derniers aux principaux. Un nouveau tableau apparaît : les premières admissions, décrites selon les mêmes critères. La tranche d’âge de 15 à 24 ans est séparée en deux parties :
- 15 à 19 ans
- 20 à 24 ans
De même, les âges au-delà de 75 ans sont plus précis :
- 75 à 84 ans
- 85 ans et plus
L’enquête nationale sur les personnes présentes en hospitalisation à temps plein dans les services sectorisés de psychiatrie générale (pour adultes) le 16 mars 1993, puis celle effectuée selon la même méthode le 16 mars 1998, utilisent les mêmes tranches d’âge dans leur répartition des effectifs (celle de 1998 n’a qu’un seul groupe au-delà de 75 ans).
D –Ministère
Les statistiques de la SGF puis de l’Insee, comme celles de l’Inserm sont marquées par une continuité de projet. Leurs évolutions visent seulement à améliorer la qualité des résultats, à l’intérieur d’un cadre qui n’est pas remis en question. Ce n’est pas le cas des statistiques publiées par le ministère, où coexistent des projets construits selon des logiques distinctes. Les trois principaux sont les suivants : la « statistique hospitalière en psychiatrie », la statistique H80 devenue ensuite Statistique d’activité des établissements (SAE) et les rapports de secteur. Les enquêtes différentes ne se succèdent pas ; elles sont publiées en parallèle. Le champ et les variables étudiées sont peu ou pas expliqués et varient selon les enquêtes. Dans une même enquête, la présentation des résultats change d’une année à l’autre, comme lorsque les résultats sont formulées en effectifs, puis en pourcentages et enfin en moyennes nationales. Tantôt les catégories sont regroupées et tantôt elles sont finement subdivisées. Les résultats ne sont pas toujours cohérents entre publications d’une même enquête, y compris lorsque des tableaux récapitulatifs sont censés reproduire des données déjà publiées. Au total, l’imprécision des informations méthodologiques, les changements dans l’organisation des résultats et la fréquente absence de cohérence, empêchent l’utilisation de ces publications pour y trouver des complémentarités et pour construire des séries.
Mon relevé n’est pas complet : il y manque certaines publications de la série H80-SAE.
1 – 1964
La très courte introduction de l’article [Edouard Vigneau. Enquête sur l’équipement psychiatrique au 31 décembre 1964. Statistiques sociales. Supplément B3. Octobre 1968, p 5-12] précise seulement qu’il s’agit d’une enquête réalisée par la sous-direction de l’action médico-sociale du ministère de la Santé publique et de la Population, c’est-à-dire distincte de celles effectués en parallèle par l’Insee et par l’Inserm. La présentation des résultats distingue par sexe et par groupe d’âge (homme, femme, enfant) les présents au 31 décembre dans chaque grande catégorie d’établissement :
- Hôpitaux psychiatriques publics (nationaux, autonomes et départementaux),
- Hôpitaux psychiatriques privés faisant fonction de publics,
- Quartiers d’hospice.
C’est dire que les services de psychiatrie des hôpitaux généraux publics ne sont pas comptés, à la différence de l’Insee et de l’Inserm. Un tableau distinct donne l’effectif total des personnes présentes au 31 décembre dans ces services, soit 2 653. Au sein de chacune des trois catégories principales, les malades issus du département où est situé l'établissement sont séparés des autres. Dans ce premier groupe, un classement est opéré selon des critères hétérogènes, diagnostiques pour certains, administratifs pour d’autres :
- Malades banaux adultes,
- Alcooliques relevant d'une section de rééducation,
- Déments séniles,
- Arriérés profonds adultes,
- Enfants arriérés profonds,
- Enfants malades banaux relevant d'un service de neuro-psychiatrie infantile,
- Malades difficiles.
Ces catégories ne sont pas reprises pour les malades étrangers au département où est situé l'établissement, qui sont pour leur part classés selon leur nationalité, française ou étrangère.
Les données du ministère pour 1964 apportent sans doute un peu de lumière sur les écarts entre sources cette année-là, en apportant des précisions sur la différence entre les champs couverts dans les trois enquêtes (tableau ci-dessous).
D’après le ministère, les effectifs concernés au 31 décembre pour les enfants et pour les alcooliques en centre de rééducation sont respectivement 5 995 et 5 986. Ces nombres ne fournissent que des ordres de grandeur dans la comparaison Insee – Inserm, puisque les services de psychiatrie des hôpitaux généraux ne sont pas inclus dans le dénombrement, mais ils pourraient expliquer la similitude de leurs résultats de fin d’année. Pour rendre pleinement compte des différences entre les deux premières enquêtes, il faut compléter cette hypothèse en supposant que les personnes admises et sorties des centres de rééducation pour alcooliques sont nettement plus nombreuses que celles des services pour enfants. C’est en effet possible : les personnes alcooliques sont parmi celles qui restent le moins longtemps hospitalisées.
Si l’enquête du ministère en 1964 apporte un éclairage à propos de la différence des champs, il n’en va pas de même pour les diagnostics (ou ce qui en tient lieu). Certes, les effectifs de personnes présentes au 31 décembre et ayant reçu un diagnostic de démence sénile sont proches, 11 235 au ministère et 10 690 à l’Inserm (les diagnostics ne sont pas publiés à l’Insee), mais ce n’est pas du tout le cas pour les adultes ayant reçu un diagnostic d’arriération profonde, qui sont 12 423 au ministère et 21 196 à l’Inserm. Les services des hôpitaux généraux ne peuvent en aucun cas expliquer ce dernier écart.
2 – 1965 - 1984
Cette période est principalement caractérisée par la répartition des données en fonction de la catégorie d’établissement proche du découpage pratiqué au XIXe siècle
- Centres hospitaliers spécialisés,
- Etablissements privés faisant fonction de publics,
- Services de psychiatrie des hôpitaux généraux.
Cependant, certaines années se dispensent de ces précisions.
L’enquête du ministère à propos des années 1965, 1970 [SNA. Les modes de placement des malades mentaux. Années 1965 et 1970. Santé – Sécurité sociale. Bulletin de statistiques. N°2, 1972. Mars-Avril, p. 137-145] et 1971 [SNA. Mouvement de la population hospitalisée dans les établissements psychiatriques publics, au cours de l’année 1971. Santé – Sécurité sociale. Bulletin de statistiques. N°6, 1974. Novembre-Décembre, p. 5-15] (les résultats des deux premières sont publiés ensemble) délaisse la répartition par catégorie d’établissement qui formait la base de celle de 1964 et qui reviendra en honneur les années suivantes. Le principal intérêt de ces enquêtes est de donner la répartition détaillée des mouvements selon le mode de placement (libre, volontaire, ou d’office), par sexe et selon deux tranches d’âge (adulte, enfant de moins de 18 ans).
1- Entrées par transfert
2- Entrées directes (non compris les entrées par transfert et les rentrées)
- En placement d'office
- En placement volontaire
- En placement libre
3- Rentrées
4- Décès
5- Evasions
a- suivies de réintégration
b- non suivies de réintégration
6- Sorties par transfert
7- Sorties (autres que par transfert)
a- Sous la forme de sortie définitive, non précédée d'une sortie d'essai, de malades placés en :
- Placement d'office
- Placement volontaire
- Placement libre
b- Sous la forme de sortie d'essai de malades placés en:
- Placement d'office
- Placement volontaire
- Placement libre
c- Nombre de sorties d'essai transformées en sorties définitives
- Placement d'office
- Placement volontaire
Le classement par diagnostic ne figure plus dans ces tableaux.
L’introduction à l’article présentant les résultats pour l’année 1975 énonce que « L’utilisation par les administrations hospitalières de modèles différents des états IV (état du personnel médical, paramédical et soignant et composition de l’hôpital par service) et V (mouvement de la population pour l’année considérée) ainsi qu’un retour au Département des statistiques très étalé dans le temps, entraînaient un retard important dans la production des résultats. C’est pourquoi, afin d’améliorer l’exploitation de l’enquête, le Département des statistiques du ministère de la Santé et de la Sécurité sociale a établi, en accord avec la sous-direction des Actions de soins et de rééducation (direction générale de la Santé) de nouveaux questionnaires "modèles 1975" pour les états IV et V mis en place par la circulaire du 15 mars 1976. » [Douxami D., Juret A., Mouquet M-C., Rouse M. Statistique annuelle des établissements psychiatriques publics et privés faisant fonction de publics. Santé Sécurité Sociale. Statistiques et Commentaires. N°6, Tome A - 1977, Novembre Décembre, p. 75]. Cette formulation laisse supposer que jusqu’alors, les « modèles différents » de questionnaires étaient des versions variées, peut-être des versions périmées restées en usage. La nouveauté par rapport aux années précédentes est, en plus des classements déjà en place, le retour de celui par catégorie d’établissements (Centres hospitaliers spécialisés, Etablissements privés faisant fonction de publics, Services de psychiatrie des hôpitaux généraux). Le plus gênant dans ces résultats est la discordance entre tableaux censés reproduire exactement les mêmes résultats à propos des formes d’entrées.
Pour les années 1976, 1977, 1979 et 1980, les tableaux ne donnent plus d’effectif mais indiquent des répartitions en pourcentages. Il est parfois possible de reconstituer approximativement les effectifs lorsque le total est publié, mais ce n’est pas toujours le cas.
Les données de 1981 et 1982 sont fragmentaires et certaines sont présentées sous forme de répartition en pourcentage.
En 1982, l’enquête H80 [Douxami D. Les hôpitaux publics H80 - Exercice 1982. SESI. Documents statistiques. N°7 Avril 1985] permet de distinguer les différents types de services des hôpitaux généraux recevant des malades mentaux. Pour chaque type, sont publiés le nombre de lits, le nombre d’entrées normales (« Ce sont les entrées de malades venant de l'extérieur de l'entité juridique (elles sont parfois appelées entrées directes »), le nombre d’entrées totales (« Somme du nombre d'entrées normales et du nombre d'entrées par mutation; il existe des mutations entre unités fonctionnelles, entre services, entre établissements (appelées parfois transferts) et entre disciplines. Ce sont ces dernières qui sont prises en compte dans l'analyse du mouvement de la population hospitalisée. »), le nombre de journées et de décès.
- Psychiatrie indifférenciée
- Psychiatrie adultes mixte
- Psychiatrie adultes hommes
- Psychiatrie adultes femmes
- Pédo-psychiatrie
- Géronto-psychiatrie
- Psychiatrie pour arriérés profonds adultes
- Psychiatrie pour arriérés profonds enfants
- Psychiatrie pour arriérés profonds indifférenciée
- Toxicomanie et désintoxication indifférenciées
- Toxicomanie et désintoxication indifférenciées
- Désintoxication (y.c. alcoologie)
En 1984 [Belliard E., Bourgeolet R., Munshi C. La psychiatrie hospitalière en 1984. SESI. Informations Rapides. N°72, 5 juin 1986], le document reprend la présentation en trois catégories d’établissement spécialisés, et donne les effectifs par mode de placement et par sexe, mais ne fournit pas d’information sur les sorties, ni sur les décès, à la différence des publications antérieures.
De même, la présentation de l’évolution en 1975, 1980, 1982 et 1984 [Belliard E. Vingt ans de psychiatrie hospitalière publique. Solidarité Santé. Etudes statistiques. N°3, 1987, p. 65-77] ne dit rien des sorties ni des décès.
3 – À partir de 1985
Je dispose des résultats pour 1985 [Statistique annuelle des établissements d'hospitalisation privés. EHP 85. SESI. Informations rapides n°89, 15 avril 1987] et 1986 [Statistique annuelle des établissements d'hospitalisation privés. EHP 86. SESI. Informations rapides n°120, 10 juin 1988] des enquêtes EHP portent sur les établissements d’hospitalisation privés. Elles utilisent un classement par mode de financement :
- Prix de journée préfectoral
- Prix de journée CRAM (Caisse régionale d’assurance maladie)
- Prix de journée préfectoral et CRAM
- Tarif d'autorité
En 1985, la Caisse nationale d’assurance maladie publie une enquête portant à la fois sur les établissements ou services psychiatriques et sur les hôpitaux généraux. J’en ai reproduit plusieurs résultats bien qu’il ne s’agisse pas d’une publication du ministère, car c’est la seule source permettant de placer en regard les deux types de soins.
À partir de l’activité de 1985, sont publiés régulièrement des rapports basés sur un nouveau découpage administratif, celui des secteurs. Le principe de la sectorisation est affirmé dans la circulaire du 15 mars 1960, mais la mise en place effective date de l’arrêté et des deux circulaires de mars 1972. Pendant quelques années, ces publications ont lieu en parallèle avec d’autres qui conservent l’ancien modèle. Pour la psychiatrie générale, les rapports de secteur concernent les années 1985, 1987, 1989, 1991, 1993, 1995, 1997 et 2000. Pour la psychiatrie infanto-juvénile, ils sont publiés pour l’activité des années 1986, 1991, 1993, 1995, 1997 et 2000. Conformément à la définition du travail de secteur, les résultats sont donnés par type de soin (à temps complet, à temps partiel, en ambulatoire). L’effectif des patients soignés prend une nouvelle définition. Au lieu de la somme des présents à l’hôpital un jour donné (1er janvier ou 31 décembre) et des admis dans l’année, c’est maintenant l’effectif des personnes ayant rencontré un soignant au moins une fois dans l’année. On parle de file active. Les résultats sont donnés le plus souvent sous forme de moyennes par secteur. Lorsqu’il y a des effectifs, ils ne sont pas identiques d’un tableau à l’autre dans une même publication (les patients hospitalisés le 15 décembre 1985 sont 75 400 ou bien 72 648).
La statistique hospitalière pour 1985 [Belliard E., Gouy R., Munshi C. La psychiatrie hospitalière en 1985. SESI. Informations Rapides. N°97, 1er juillet 1987] conserve le cadre des années précédentes mais se complexifie car, au sein de chacune des trois grandes catégories d’établissements sont distingués plusieurs modalités d’hospitalisation :
- Lits de court séjour dont:
Médecine
Chirurgie
Gynéco, maternité, obstétrique
- Lits de moyen séjour dont:
Post cure pour malades mentaux
Lits de long séjour
- Lits de lutte contre les maladies mentales
Psy Adultes
Psy infanto-juvénile
Géronto-psychiatrie
Lutte contre les toxicomanies
Lutte contre l'alcoolisme
Les résultats portent sur le nombre de lits, le nombre de journées d’hospitalisation, les entrées et les décès, et pas sur les effectifs présents un jour donné. Ces informations montrent que dans les établissements psychiatriques, les services qui ne sont pas labellisés « lutte contre les maladies mentales » reçoivent moins de 3 % des entrées. L’activité de ces petits services installés au sein des établissements psychiatriques n’est pas décrite dans le document. Pour l’essentiel, ils reçoivent temporairement des personnes venant des services de psychiatrie du même établissement et destinées à y retourner après la fin de leurs soins médicaux ou chirurgicaux.
Les données hospitalières pour 1986 [Belliard E., Viguier M. La psychiatrie hospitalière publique en 1986. SESI. Informations Rapides. N° 124, 20 juillet 1988] sont présentées comme celles de 1985, en ajoutant les effectifs présents au 1er janvier. Cette dernière donnée permet de calculer la part des personnes dans les services qui ne sont pas labellisés « lutte contre les maladies mentales » : elle est inférieure à 1 %. Les données attribuées à la psychiatrie infanto-juvénile ne correspondent pas du tout à celles du rapport de secteur. Selon ce dernier, la file active (somme de l’effectif des présents au 1er janvier et des personnes admises au moins une fois dans l’année, quel que soit leur nombre de séjours) des jeunes pris en charge à temps plein dans l’année est de 6 540, alors que selon les données hospitalières, rien que pour les admissions « normales » (et donc sans compter les présents en début d’année), l’effectif serait de 9 213.
L’année 1988 est particulièrement riche de données, avec notamment un rapport sur les malades hospitalisés en psychiatrie le 15 janvier, par type d’établissement, mode d’hospitalisation, sexe, âge, et mode de placement. La question de la cohérence des données entre publications se pose à nouveau pour l’année 1988 : Documents Statistiques n°117 donne 71 745 personnes présentes à temps plein au 1er janvier et Informations Rapides n°135 donne 74 746 personnes le 15 janvier.
Le rapport intitulé « La psychiatrie hospitalière en … » paraît une dernière fois pour l’activité de 1989, mais des données purement hospitalières continuent à paraître dans la statistique H80, qui devient la Statistique d’activité des établissements (SAE) à partir de l’activité de 1994. Ces publications ne se limitent pas à la psychiatrie et couvrent l’ensemble de l’hospitalisation.
Les années ultérieures comportent souvent plusieurs enquêtes construites selon des logiques différentes, dont la confrontation et la complémentarité soulèvent des problèmes complexes d’interprétation que je n’aborde pas ici.
On peut aussi calculer grâce au nombre de journées un nombre moyen de personnes adultes présentes un jour donné (nombre annuel de journées / 365). Ces données sont exclusivement celles fournies dans les rapports de secteur, choisis parce qu’ils sont tous construits selon la même méthode, et aussi parce que le champ de l’enquête est le plus proche de celui de l’Inserm. Le calcul basé sur les journées est le plus fiable : après avoir longtemps servi de base au financement, leur compte continue à être tenu attentivement par les services financiers (tableau ci-dessous). On ne peut pas soustraire ces effectifs de la file active totale (quand elle est publiée) afin d’obtenir un nombre de patients admis dans l’année, car il survient alors des problèmes majeurs de cohérence entre données.
Toutefois, il existe un écart inexpliqué entre l’effectif moyen ainsi calculé pour 1993 (47 282) et celui constaté par l’Inserm le 16 mars de la même année (50 538). L’explication la plus probable est que l’enquête de l’Inserm inclut certaines formes non sectorisées d’hospitalisation psychiatrique. On a vu plus haut que c’est le cas par exemple des centres de rééducation pour alcooliques.
E – Conclusion d’ensemble
1 - Examen de la base SGF - Insee
Les erreurs typographiques sont rares et de peu de conséquence. L’ensemble est à la fois riche et cohérent, même si plusieurs années sont manquantes cependant que certaines ne proposent que des données peu nombreuses. Aucune publication de la SGF ne porte sur l’assistance pendant les années 1861-1874. Les données de l’année 1880 pour les entrées et les sorties ne sont pas cohérentes avec les années voisines. Celles de 1895 sont inutilisables en raison de leur grave manque de cohérence. Les résultats détaillés pour les années 1945 à 1948, absents des tableaux annuels, sont présents dans les récapitulations publiées en 1958 et 1961.
Le champ géographique de l’enquête n’est pas immuable. Nice et la Savoie sont « rattachés » à la France en 1861. L’Alsace et la Moselle sont annexées par l’Allemagne en 1870 ; cette annexion durera jusqu’en 1918, et se reproduira de 1940 à 1944. Il n’est pas rare que certains départements manquent ; ils sont alors nommés dans une note adjointe aux tableaux. La lacune la plus importante touche l’Alsace (Haut-Rhin et Bas-Rhin) et la Moselle, de 1920 à 1927 puis en 1937, 1938 et 1939.
Le champ administratif de l’enquête s’élargit en 1958 avec l’adjonction des services libres et des services spéciaux pour enfants.
La définition des entrées et des sorties pose problème dans la mesure où elle inclut les transferts entre établissements psychiatriques jusqu’en 1860, puis de 1874 à 1944 (à partir de 1945, les transferts ne sont plus comptés par l’Insee). Or, les personnes transférées d’un asile dans un autre ou réintégrées après une sortie temporaire modifient certes les effectifs à l’échelle d’un établissement, mais pas à l’échelle nationale, et n’ont donc pas à être comptées à ce dernier niveau (pour chaque transfert, une sortie est suivie d’une entrée ; les deux s’annulent). La question mérite attention car la proportion des transferts parmi les entrées évolue le plus souvent entre 15 % et 20 % et ne descend jamais au-dessous de 10 %. Les transferts ne figurent isolément dans les tableaux qu’à partir de 1856. Ils manquent également pour les années 1887 à 1891 (il n’y a aucune donnée utilisable de 1894 à 1898 inclus). Dans les tableaux récapitulatifs publiés en 1961, 1966 et 1968, les (nombreuses) personnes transférées venant d’un autre asile, ou les personnes (peu nombreuses) réintégrées après évasion ou après sortie avant guérison sont soustraites du total des admis tel qu’il figure dans les publications annuelles. Un effectif égal est soustrait du total des sortis. D’autre part, l’effectif des personnes entrées par transfert est toujours inférieur à celui des personnes sorties par transfert, ce qui reste inexpliqué.
Au fil des années, on observe quelques données aberrantes, c’est-à-dire notablement différentes des valeurs correspondantes des années voisines.
Enfin, de 1965 à 1986, les données publiées sont succinctes. D’autre part il y a une importante hausse inexpliquée mais simultanée dans l’effectif des entrés et des sortis dans l’année à partir de 1975 ; la raison la plus probable est celle d’un changement de définition. Enfin, on observe plusieurs discordances entre résultats d’une année sur l’autre, et l’année 1977 présente des erreurs dont certaines font l’objet de corrections (sans explication) dans les publications successives.
Après 1986, les données publiées dans les annuaires de l’Insee ont pour source le service de statistiques du ministère (SESI).
En ce qui concerne les diagnostics, c’était faire preuve d’un grand optimisme que d’espérer de la part de médecins une pratique homogène de classement, et spécialement dans une liste de 35 catégories (1943-1959), d’autant plus que plusieurs diagnostics sont proches les uns des autres, difficiles à différencier cliniquement. D’autres sont d’un tel degré de précision qu’en pratique les effectifs nationaux sont très faibles, et de signification problématique.
Il existe de 1920 à 1958 des données par âge pour les présents au 31 décembre. Le découpage en tranches d’âge est modifié en 1943 : les bornes ne sont plus 25-35-45…, mais 20-30-40…ce qui complique la constitution de séries. Les âges des aliénés décédés sont disponibles en 1853, puis de 1920 à 1944. En 1943 et 1944 sont donnés les âges des personnes admises.
2 – Mise en forme de la base SGF - Insee
L’interprétation des données nécessite de prendre en considération les changements de champ géographique. Aucune correction n’est ici appropriée. Ce n’est pas le cas si l’on souhaite rétablir les départements manquants faisant partie du territoire national, spécialement l’Alsace Moselle. De même, des corrections sont justifiées pour éliminer les doubles comptes créés par l’inclusion des transferts entre établissements psychiatriques parmi les entrées et les sorties. Dans les deux cas (départements manquants et doubles comptes) j’ai indiqué les redressements envisageables et leurs limites.
Le rapport des inspecteurs généraux des asiles fournit des données fiables de 1865 à 1874.
La précision des catégories diagnostiques n’est qu’apparente. Des regroupements facilitent leur interprétation.
Jusqu’en 1927 inclus, les données manquantes par âge au 31 décembre créent une marge d’incertitude dans leur étude. De 1928 à 1941, la répartition par sexe comporte des oscillations d’une année sur l’autre plus grandes que pendant les autres périodes, ce qui fait peser un doute sur la qualité des données et sur la signification de leur évolution.
L’interprétation des données nécessite de prendre en considération les changements de champ géographique. Aucune correction n’est ici appropriée. Ce n’est pas le cas si l’on souhaite rétablir les départements manquants faisant partie du territoire national, spécialement l’Alsace Moselle. De même, des corrections sont justifiées pour éliminer les doubles comptes créés par l’inclusion des transferts entre établissements psychiatriques parmi les entrées et les sorties. Dans les deux cas (départements manquants et doubles comptes) j’ai indiqué les redressements envisageables et leurs limites.
Le rapport des inspecteurs généraux des asiles fournit des données fiables de 1865 à 1874.
La précision des catégories diagnostiques n’est qu’apparente. Des regroupements facilitent leur interprétation.
Jusqu’en 1927 inclus, les données manquantes par âge au 31 décembre créent une marge d’incertitude dans leur étude. De 1928 à 1941, la répartition par sexe comporte des oscillations d’une année sur l’autre plus grandes que pendant les autres périodes, ce qui fait peser un doute sur la qualité des données et sur la signification de leur évolution.
3 – Examen de la base Inserm
Pendant la période couverte par l’Inserm, il n’y a pas de modification géographique ou administrative du champ couvert par l’enquête.
Pour interpréter les nombres d’entrées et de sorties, il convient d’avoir à l’esprit qu’après la Deuxième guerre, les hospitalisations à nouveau la même année deviennent de plus en plus fréquentes alors qu’elles étaient rares auparavant. Cette évolution accompagne l’important raccourcissement de toutes les durées de séjour. Les données portant sur des effectifs plutôt que sur des mouvements sont les personnes existantes au 31 décembre, admises pour la première fois et décédées (évènements non répétables).
Les définitions des transferts (entrées et sorties) sont détaillées dans les instructions formulées à l’intention des médecins chefs. En théorie, les effectifs entrés et sortis par transferts devraient être égaux. Ce n’est pas le cas. Il est intéressant de poser la question par principe. Elle n’a pas du tout la même ampleur que dans les données de la SGF, car la part des entrées et des sorties par transfert à l’Inserm évolue entre 1 % et 2 % du total de chaque type de mouvement. L’éventuelle correction des erreurs aurait un effet pratique très limité.
De très nombreuses données par âge sont disponibles. Elles sont cohérentes sur l’ensemble de la période couverte.
4 – Mise en forme de la base Inserm
Les données de la SGF puis celles de l’Insee peuvent être placées avant celles de l’Inserm pour former des séries. Toutefois, il convient de garder à l’esprit la différence des champs couverts (tableau ci-dessous). Les données de 1961 à l’Inserm sont notablement différentes de celles qui lui succèdent à partir de 1963, c’est pourquoi il est préférable de conserver les résultats de l’Insee jusqu’en 1962 inclus.
Les effectifs au 1er janvier sont analogues dans les deux enquêtes, car le nombre de personnes présentes dans les Centres de rééducation pour alcooliques est très proche de celui dans les Services pour enfants, de sorte que les manques se compensent. Il n’en va pas de même pour les personnes entrées et sorties, sans doute parce qu’elles sont en plus grand nombre dans les Centres de rééducation pour alcooliques, où les séjours sont plus courts que dans les services pour enfants.
Comme pour les statistiques de la SGF et de l’Insee, des regroupements de catégories diagnostiques peuvent simplifier leur interprétation. Dans la nomenclature en vigueur de 1961 à 1967, les catégories 2, 3, 4 et 5 peuvent fusionner dans un ensemble consacré aux schizophrénies et aux troubles délirants. Le même raisonnement peut s’appliquer aux catégories 2, 3 et 4 de la classification appliquée de 1968 à 1978. Dans cette même classification, le regroupement de 16-17 et de 18-19 facilite les comparaisons avec les données antérieures.
5 – Examen des bases du ministère
Le ministère réalise et publie trois sortes d’enquêtes : la « statistique hospitalière en psychiatrie », la statistique H80 devenue ensuite SAE et les rapports de secteur. Selon les enquêtes, et dans une même enquête d’une année à l’autre, la présentation des résultats varie. Ces enquêtes ne se succèdent pas ; elles sont publiées en parallèle. Leurs résultats ne sont pas toujours cohérents entre eux. Mon relevé n’est pas complet : il y manque certaines publications de la série H80-SAE.
L’enquête du ministère à propos des années 1965, 1970 et 1971 donne la répartition détaillée des mouvements selon le mode de placement (libre, volontaire, ou d’office), par sexe et par tranche d’âge (adulte, enfant de moins de 18 ans).
En 1985, la Caisse nationale d’assurance maladie publie une enquête portant à la fois sur les établissements ou services psychiatriques et sur les hôpitaux généraux. J’en ai reproduit plusieurs résultats bien qu’il ne s’agisse pas d’une publication du ministère, car c’est la seule source permettant de placer en regard les deux types de soins.
À partir de l’activité de 1985, sont publiés régulièrement des rapports basés sur un nouveau découpage administratif, celui des secteurs. Pour la première fois, la psychiatrie infanto-juvénile fait l’objet de publications spécifiques pour l’activité des années 1986, 1991, 1993, 1995, 1997 et 2000. Pour la psychiatrie générale, ils concernent les années 1985, 1987, 1989, 1991, 1993, 1995, 1997 et 2000.
L’année 1988 est particulièrement riche de données, avec notamment un rapport sur les malades hospitalisés en psychiatrie le 15 janvier, par type d’établissement, mode d’hospitalisation, sexe, âge, et mode de placement. Mais, comme beaucoup d’autres, ces résultats posent un problème de cohérence entre publications : Documents Statistiques n°117 donne 71 745 personnes présentes à temps plein au 1er janvier et Informations Rapides n°135 donne 74 746 personnes le 15 janvier.
Quand ils sont fournis, les effectifs présents au 31 décembre ou au 1er janvier sont souvent en discordance avec ceux des rapports de secteur et avec ceux de l’Inserm. Aucune explication n’est donnée à ces décalages.
6 – Mise en forme des bases du ministère
Le principal intérêt de ces enquêtes réside dans des informations ponctuelles absentes des autres publications.
À défaut d’autres données publiées, il est possible d’utiliser de 1985 à 2000 le nombre annuel de journées pour estimer des effectifs présents un jour donné, sachant qu’il s’agit alors strictement de l’hospitalisation sectorisée : ce champ est un peu plus restreint que celui de l’Inserm.
Docteur François Chapireau
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