Asile
Clinique
Au sujet de la vente aux malades par des personnes étrangères
à l'établissement de journaux et petits pains.
«
M. BEHENNE présente sur cette affaire le rapport suivant dont
il a donné lecture :
Messieurs,
chaque matin, trois ou quatre marchands du dehors sont autorisés
à pénétrer dans l'intérieur de l'asile
Clinique pour y vendre aux malades des journaux politiques ou
littéraires, des petits pains et des croissants, et aussi
certains objets tels que cartes postales, tablettes de chocolat,
savonnettes et flacons d'odeur....
Cet usage daterait de l'ouverture de l'établissement et
y aurait été introduit avec l'assentiment et même
sur le désir des médecins.
M. le Préfet de la Seine veut bien consulter la Commission
de surveillance sur l'opportunité du maintien ou de la
suppression d'une telle autorisation, qui paraît présenter
de sérieux inconvénients et être de nature
à soulever les protestations des familles des malades.
Non pas, Messieurs, qu'il s'agisse d'interdire la vente des journaux,
ni même de faire un choix entre eux, bien que certains insèrent
parfois des contes et nouvelles dont la morale ne constitue pas
précisément le mérite, des récits
et des crimes passionnels, des portraits de criminels, voire même
des comptes rendus de débats judiciaires, où l'on
voit les accusés se targuer de leurs forfaits et porter
d'audacieux défis à la société : toutes
choses bien faites assurément pour frapper l'imagination
des malades et produire dans leur esprit une surexcitation nuisible
à l'amélioration de leur état mental. Mais
c'est là l'affaire des médecins qui ont la responsabilité
du traitement, et, s'ils estiment que la distraction que la lecture
des journaux apporte à leurs malades, l'emporte sur le
danger du pernicieux enseignement et des excitations qu'ils y
peuvent parfois rencontrer, nous n'avons pas à aller à
l'encontre.
Toute autre est la question qui doit nous préoccuper; elle
se pose ainsi : « Peut-on admettre des étrangers,
mus par un intérêt mercantile, à pénétrer
dans l'intérieur d'un asile, où ils se trouveront
forcément en contact avec les malheureux qui y sont internés
? »
Je réponds sans hésitation : Non, car cela est contraire
à l'esprit de la loi; c'est une atteinte portée
aux légitimes susceptibilités des familles; il peut
en outre en résulter des abus fâcheux pour les malades
eux-mêmes.
Quand on discuta la loi de 1838, on s'attacha à garantir
les individus contre l'arbitraire et l'abus des séquestrations,
et on désigna à cet effet, dans l'article 4, des
personnes spéciales, chargées de contrôler
par des visites renouvelées l'action administrative et
celle des intérêts privés dans les établissements
d'aliénés.
Cette disposition si sage ne passa pourtant pas sans difficulté.
A la Chambre des pairs, on manifesta la crainte qu'elle n'eût
pour effet de divulguer une maladie que les familles ont intérêt
à tenir secrète, et peut-être même de
nuire à la guérison des malades; mais il a été
répondu qu'on ne saurait entourer la liberté individuelle
de trop de garanties et que, d'ailleurs, la faculté de
visiter les établissements ne devait être exercée
par les fonctionnaires auxquels elle était spécialement
confiée qu'avec une prudence qui écarterait tout
abus.
Malgré ces raisons, les mêmes objections se sont
reproduites à la Chambre des députés et ce
n'est pas sans répugnance qu'on a laissé subsister
les dispositions de l'article 4.
Ces préoccupations du législateur démontrent
bien qu'on ne peut, sans violer l'esprit de la loi, permettre
l'introduction, dans l'intérieur d'un asile, de marchands
du dehors qui, tout honorables qu'ils puissent être, ne
présentent pas des garanties morales de circonspection
et de discrétion suffisantes, qui peuvent aussi se faire
remplacer, dans leur trafic quotidien, par des commis ou employés
qui se renouvelleront, et dont le choix n'aura pas été
préalablement contrôlé et agréé
par la direction de l'établissement.
Les familles -on en comprend les raisons- cachent soigneusement
les tares physiques ou morales dont un des leurs peut être
atteint. Être ou avoir été interné
dans une maison d'aliénés est malheureusement considéré
comme une de ces tares -tare des plus affligeantes- et sa divulgation
jette une défaveur imméritée sur les autres
membres de la famille. N'est-il pas à craindre que ces
étrangers ne violent le secret douloureux qu'ils auront
ainsi surpris dans leurs pérégrinations à
travers l'asile ? et n'est-ce pas faire acte de bonne justice
que de vouloir prémunir les familles contre le danger de
semblables indiscrétions ?
Il est, enfin, un dernier abus qui se peut commettre. Quelle que
soit la surveillance exercée, ces marchands de journaux
et boulangers peuvent se faire des intermédiaires complaisants
entre les malades et le dehors, transmettre des correspondances,
apporter des boissons interdites, de l'alcool notamment.....,
et c'est l'intérêt des malades eux-mêmes, leur
santé, qui est ici directement en jeu.
Je sais bien que, dans son rapport au Préfet, M. le directeur
Guillot affirme qu'il a défendu à ces marchands
de pénétrer dans l'intérieur des quartiers,
d'éviter tout étalage de leur marchandise, et qu'il
déclare tenir la main à ce que cette consigne soit
observée.
Mais l'est-elle en fait, et même peut-elle l'être
?<
L'attention d'un surveillant ou d'une surveillante peut être
si facilement détournée ! M. Guillot ajoute
qu'il doit, dans cette affaire « considérer l'intérêt
et l'agrément des malades; que ceux-ci ont bien le droit
de faire venir du dehors les objets qu'ils ne trouveraient pas
chez le concierge qui tient la cantine ou qu'ils trouveraient
à meilleur compte ». Mais cela n'implique-t-il pas
un contact entre le marchand et le client ? Comment, s'il ne les
voit pas, celui-ci choisira-t-il les cartes postales dont le sujet
l'intéresse davantage., les flacons d'odeur dont il préfère
le parfum ? S'il veut payer des objets meilleur marché
que chez le concierge, ne devra-t-il pas s'enquérir des
prix, les discuter, etc. ?
Je veux bien admettre même que les marchands ne pénètrent
pas jusque dans l'intérieur des quartiers; la négociation
s'opérera alors sur le seuil de la porte entr'ouverte;
mais, même en ce cas, il y aura encore la communication
que la loi défend; des regards plongés dans le préau
en révéleront les occupants, et le secret de l'internement
sera encore violé.
Qu'on ne dise pas -c'est une objection qui m'a été
fait- qu'il n'y a pas plus de raison de soustraire les malades
à la vue et aux approches de ces marchands, plutôt
qu'à ceux des autres fournisseurs qui viennent apporter
leurs denrées dans l'établissement, des élèves
qui viennent suivre les conférences et cours de l'admission
ou de la clinique, des ouvriers occupés à des travaux
de leur art, de tous ceux, en un mot, qui sont, à un titre
quelconque, autorisés à circuler dans les diverses
parties de l'asile.....
Mais toute autre est la situation de ces derniers, et l'exception
dont ils bénéficient s'explique et se justifie par
leurs qualités, la nature de leur emploi, les nécessités
du service ou de l'enseignement qu'ils suivent, etc., et, en tout
cas, j'admettrais qu'ils dussent toujours se rendre directement
à l'endroit où ils ont affaire, ne pas s'en écarter
inutilement et, comme les autres, s'abstenir soigneusement de
pénétrer sans nécessité dans l'intérieur
des quartiers. »
Je crois donc, Messieurs, devoir vous proposer de décider
que les marchands de journaux et de petits pains dont il s'agit
ne seront plus autorisés à pénétrer
dans l'intérieur de l'asile Clinique pour y distribuer
leur marchandise aux malades.
M. Guillot est opposé à cette solution; il
se croit « lié par la bonne foi vis-à-vis
de commerçants depuis longtemps autorisés ».
Cela veut dire sans doute qu'il craindrait de porter préjudice
à des commerçants qui ont acheté leur fonds
à un prix établi en considération des bénéfices
que devait leur procurer la clientèle de l'asile et qu'ils
ne réaliseraient plus désormais. Mais, en faisant
ce calcul, ils auraient été bien imprudents. Une
tolérance n'a jamais constitué un droit; l'autorisation
dont ils jouissent est tout à fait précaire; jamais
l'asile n'a contracté envers eux aucun engagement ferme.
D'ailleurs, leurs intérêts pourraient ne pas être,
pour cela, absolument compromis ou lésés.
Les malades ne seront pas privés de leurs journaux, non
plus que de leurs petits pains; seulement, il paraît rationnel
que la vente en soit confiée au concierge de l'établissement,
déjà chargé du débit de tabac et de
la cantine; il en est ainsi dans tous les autres asiles. Qui donc
alors empêcherait une entente de s'établir entre
les marchands, qui déposeraient leur marchandise chez le
concierge, lequel se chargerait d'en opérer la distribution,
moyennant un certain partage des bénéfices ?
Mais
il ne nous appartient pas de fixer les détails d'un régime
nouveau à substituer à l'organisation actuelle qui
va vraisemblablement se trouver condamnée; c'est là
un point qui est étranger à l'objet même de
la consultation qui nous est demandée, et sur laquelle
je crois avoir suffisamment fait connaître mon opinion.
|
M.
le Président dit qu'il s'agit là d'une question délicate
puisque l'Administration nous demande aujourd'hui de revenir sur une
tradition consacrée par une tolérance déjà
ancienne : sans cela, il serait facile de décider que la distribution
de ces divers objets, journaux, petits pains....., sera faite, par exemple,
par le concierge de l'établissement qui est un employé
de l'asile, et soumis par suite à l'autorité du directeur.
Il convient de considérer cependant que le dommage subi par les
fournisseurs actuels se trouverait sensiblement atténué,
si, au lieu de leur interdire de façon absolue, désormais,
la vente directe de leur marchandise aux malades, on les autorisait
simplement à la remettre au concierge, qui se chargerait de la
distribution.
Quoiqu'il en soit, il s'agit là d'une question sur laquelle l'avis
des médecins peut être considéré comme prépondérant,
et de nature à éclairer la Commission.
M. Le docteur Dagonet dit que les médecins n'ont jamais
été saisis de plaintes contre les marchands; ceux-ci ne
pénètrent jamais dans les quartiers; ils se bornent à
vendre leurs marchandises à la porte de ces quartiers. En somme,
ces errements qui avaient pour objet d'établir une concurrence
louable, de manière à procurer au meilleur compte certains
objets aux malades, n'ont jamais motivé de réclamation
de la part des familles; les médecins ont agi, dans l'espèce,
comme toujours, en bons pères de famille, et ils n'auraient pas
toléré plus longtemps ces ventes si elles leur avaient
paru donner lieu à des abus ou entraîner des inconvénients.
M. Béhenne dit qu'il résulte des renseignements
qu'il a personnellement recueillis que le concierge se chargerait très
bien désormais de la vente de ces journaux et petits pains; il
prendrait, s'il en était besoin, un commis pour effectuer la
distribution.
M. le Directeur des Affaires Départementales comprend
très bien toute la valeur des observations présentées
par M. le Dr Dagonet. L'Administration n'était pas intervenue
jusqu'à ce jour parce qu'elle ignorait les faits; mais aujourd'hui
cette situation irrégulière lui est signalée; saisie
d'une plainte, elle ne peut plus ne pas la connaître, et, la connaissant,
peut-elle admettre qu'une telle tolérance se perpétue
? M. Magny ne le croit pas.
Il aperçoit sans doute toute la commodité de l'état
de choses actuel, ainsi que les abus qui pourraient résulter
d'une sorte de monopole accordé au concierge, mais le directeur
de l'établissement peut veiller sur son subordonné et
empêcher que des abus ne soient commis.
Quoiqu'il en soit, l'Administration se trouve placée en présence
du fait suivant : plusieurs personnes étrangères à
l'Administration pénètrent quotidiennement dans l'établissement
et se rendent à la porte des quartiers pour y vendre directement
aux malades journaux et petits pains.
N'y a-t-il pas là une situation contraire à l'esprit de
la loi, une situation dangereuse, car ne pourrait-il pas arriver qu'un
malade n'en vînt par ce moyen à se procurer non seulement
de l'alcool, mais une arme, dont il pourrait se servir contre lui-même,
et même encore contre ses gardiens, ou le médecin ? Si
de ce fait un incident grave se produisait, ne dirait-on pas que la
responsabilité de l'Administration est en cause, et que celle-ci
a fait preuve d'une coupable imprévoyance ?
C'est ainsi qu'à son avis doit se poser la question soumise à
l'appréciation de la Commission.
M. Béhenne ajoute, à titre d'indication, que, lorsqu'on
a procédé récemment à un nettoyage de conduits
à l'intérieur de l'asile, on a retrouvé des flacons
ayant contenu de l'alcool; il n'entend pas prétendre que ce sont
les marchands de journaux ou boulangers qui ont introduit ces boissons,
mais cette découverte est une preuve de la nécessité
qu'il y aurait à réagir contre les facilités trop
grandes de pénétration à l'intérieur d'un
asile d'aliénés.
M. Liébaut tient à avoir certaines précisions
sur les conditions de la vente aux malades des objets dont il s'agit.
M. le Directeur de l'asile fait connaître que deux vendeurs
de journaux et deux boulangers portent leur marchandise à la
porte de chaque quartier. Ils sonnent; le chef de quartier ouvre et
le malade désireux de se procurer, soit journal, soit petit pain,
s'approche du vendeur et fait son acquisition, sous la surveillance
du chef de quartier.
M. Liébaut. - Le malade est alors en relation directe
avec le marchand ?
M. Guillot répond affirmativement, mais ajoute que le
malade est surveillé par les agents du personnel.
M. Béhenne objecte que c'est peut-être vrai en théorie;
mais en fait ne pourrait-il pas arriver fréquemment que l'attention
du chef de quartier chargé de la surveillance de la vente fût
distraite par un incident imprévu venant à se produire,
au même moment, à l'intérieur du quartier ?
MM. Guillot et Dagonet affirment que la surveillance du
chef de quartier sur les objets vendus a toujours été
très rigoureuse.
M. Béhenne, rapporteur, demande en quoi les malades seraient
lésés si les objets étaient distribués par
le concierge ou son délégué.
M. le Président se demande, de son côté,
si le concierge va présenter plus de garanties que les vendeurs
actuels ? Ceux-ci ont tout intérêt à se conformer
à la consigne donnée; sinon, à la moindre infraction,
ils risquent de se voir retirer leur licence; mais, pour la même
faute, le concierge n'y perdra assurément pas son emploi. Après
une procédure longue, il sera déféré au
conseil de discipline et aura toutes les chances de n'encourir qu'une
peine légère.
M. le Rapporteur indique que, pour éviter que la vente
de certains objets par le concierge n'entraîne des abus, on pourrait
lui imposer un tarif.
M. le Président dit que cette solution peut apparaître
comme facile en principe, mais elle ne l'est pas en fait.
M. Guillot dit que le concierge actuel n'a pas protesté,
lors de sa nomination à Sainte-Anne, contre cette tolérance
accordée à certains vendeurs, et dont il se plaint aujourd'hui.
D'après les conventions, la boulangère ne devait vendre
que des petits pains, mais elle vend également des tablettes
de chocolat, car la vente de ces dernières denrées proposée
au concierge avait été refusée par lui.
M. Béhenne. - Il en vend pourtant actuellement.
M. le Président. - La question soumise à la Commission
paraît se réduire en définitive à une rivalité
entre le concierge et les commerçants du dehors.
M. Béhenne répond que l'Administration ne se place
pas à ce point de vue, et envisage la question d'une manière
plus générale.
M. Le Roux fait ressortir que la Commission s'est toujours placée
de son côté à un point de vue qu'il y a intérêt
à signaler : celui des facilités données aux malades,
de manière à leur rappeler le plus possible la liberté
de la vie de famille. Et, en somme, la police de personnes étrangères,
comme celle de ces marchands habitués depuis de longues années
à venir chaque jour à l'asile, n'est-elle pas aussi facile
à faire que celle d'agents du personnel ?
M. le Dr Voisin rappelle que, lorsqu'il était chef de
service à Bicêtre et à la Salpêtrière,
l'introduction de comestibles dans les quartiers fut toujours autorisée
et ne donna lieu à aucune difficulté, à la condition
que de l'alcool ne fût pas introduit, et que cette vente fût
effectuée par des personnes honorables et parfaitement connues
de l'Administration.
Mais il considère qu'il n'en est pas de même pour la vente
des journaux. Leur introduction apporte dans les quartiers une perturbation
indéniable.
Un très grand nombre de malades s'animent à la lecture
des journaux, et cette lecture peut être dangereuse pour certains
aliénés, agités ou délirants, et pour les
enfants.
M. le Rapporteur dit que l'observation soulevée par M.
le Dr Voisin est intéressante, mais qu'elle ne se rapporte pas
à la question même posée par l'Administration; il
a pris soin, d'ailleurs, d'indiquer dans son rapport que l'introduction
des journaux paraissait devoir être subordonnée à
l'agrément des médecins.
M. le Directeur des Affaires Départementales expose que
dans cette affaire il doit être fait abstraction de question de
personnes et que le problème soulevé doit être examiné
sous trois aspects différents :
1° Au point de vue de la légalité. - Il est
contraire à l'esprit de la loi et des règlements de laisser
ainsi des personnes étrangères à l'établissement
s'introduire dans l'asile.
2° Au point de vue de la sécurité. - La sécurité
n'est-elle pas compromise du fait de l'entrée quotidienne dans
les différents services de ces personnes qui peuvent procurer
aux malades des objets dont l'usage ou la consommation pourrait présenter
pour eux de sérieux dangers ? Sans doute le concierge peut vendre
des objets prohibés; mais la situation n'est pas la même;
car l'Administration est armée contre le concierge, et la perspective
de sa révocation peut rendre celui-ci plus circonspect.
3° Au point de vue de la responsabilité. - Plus il
sera permis à des personnes étrangères au service
de s'introduire à l'intérieur de l'établissement,
et plus l'Administration aura d'occasions d'engager sa responsabilité.
Il faut également tenir compte de l'intérêt des
familles qui pourraient s'élever contre le département,
coupable de n'avoir pas observé le secret professionnel vis-à-vis
des malades confiés à ses soins.
M. Guillot fait remarquer que le fait de l'entrée dans
l'asile de personnes étrangères est constant : à
tout moment les fonctionnaires logés à l'intérieur
de l'établissement reçoivent la visite d'amis, de fournisseurs.
M. Béhenne fait observer de son côté que
ces dernières personnes ne sont pas en contact direct avec les
malades, ainsi que les vendeurs : la situation est toute différente.
M. le Président fait connaître qu'il résulte
des observations échangées que la question se pose en
définitive de savoir si l'on ne doit pas revenir sur une tolérance
qui date d'une trentaine d'années. Il reste à se demander
si les malades ne vont pas avoir à souffrir des modifications
qui pourront être apportées à l'état actuel
des choses.
M. Lapaine, directeur de l'asile de Maison-Blanche, dit que dans
cet établissement les malades vont faire leurs achats chez le
concierge sous la surveillance d'infirmières.
M. Le Roux se demande si un tel va-et-vient à Sainte-Anne,
où l'avenue principale est beaucoup plus fréquentée
que dans les asiles suburbains, ne risquera pas d'avoir des inconvénients.
M. Liébaut doute que la Commission soit qualifiée
pour résoudre la question. C'est à l'Administration qu'il
appartient de provoquer et de prendre les mesures nécessaires.
L'Administration, saisie de faits qu'elle ignorait encore récemment,
vient nous dire : la pratique qui m'est signalée est irrégulière;
doit-elle persister ? Il serait difficile, me semble-t-il, à
la Commission d'avoir, la question étant ainsi posée,
une opinion contraire à celle qui est formulée par l'Administration.
M. Magny. - Sans doute il appartient à l'Administration
de prendre ses responsabilités; mais celle-ci croit utile de
consulter la Commission dont les indications lui sont toujours très
précieuses.
M. le Président. - En résumé, la Commission
a à se prononcer sur la question suivante : Doit-on laisser se
perpétuer la tolérance d'après laquelle des personnes
étrangères à l'établissement sont autorisées
à pénétrer chaque jour dans l'asile pour y vendre
des journaux et des petits pains, et n'y a-t-il pas lieu de décider
que cette vente devra incomber désormais au concierge de l'asile
?
M. le Rapporteur demande la division de la question :
Sur le premier point : la tolérance doit-elle se perpétuer
? La Commission est d'avis à l'unanimité que les autorisations
de vendre données jusqu'à ce jour aux personnes étrangères
à l'asile doivent être révoquées.
Sur le 2e point : y a-t-il lieu de confier cette vente au concierge
? La Commission est d'avis qu'il s'agit là d'une organisation
du service intérieur, en somme d'une affaire qui est entièrement
du ressort de l'Administration.
D'autre part, sur la proposition de M. Liébaut et à la
suite des observations présentées par M. le Dr Voisin,
et des réserves faites par M. le Rapporteur, la Commission émet
le vu que les médecins soient appelés à se
prononcer sur la question de l'introduction des journaux dans leurs
services, et à exercer à ce sujet une surveillance très
attentive.
Le droit de décision du médecin ne devra pas seulement
porter sur la nature des journaux dont la lecture pourra être
autorisée, mais encore sur la question plus générale
de savoir si même il n'y aurait pas intérêt à
interdire à certains malades la lecture de tout journal.
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