L'asile d'aliénés de Villejuif


L'asile d'aliénés, rebaptisé en 1937 hôpital psychiatrique de Villejuif et longtemps connu sous les initiales d'HPV, fut renommé « Centre hospitalier Paul Guiraud », avant de devenir en 1992 « Paul Guiraud Villejuif » ou PGV, et plus récemment « Groupe Hospitalier Paul Guiraud » ou GHPV.

Le GHPV a signalé sur son site Internet l'ouverture de son site de Clamart en juin 2012, puis celle de l'Unité Hospitalière Spécialement Aménagée [pour les personnes détenues] ou UHSA, le 25 avril 2013.


Le texte présenté ci-dessous est un petit discours prononcé par le docteur Briand à l'occasion d'une visite de la Commission de Surveillance des Asiles d'aliénés de la Seine, où il évoque les temps héroïques de l'installation des premières aliénées en avril 1884.

Les premières démarches pour le choix de l'emplacement du quatrième asile d'aliénés du département de la Seine avaient eu lieu en 1880, à la suite de la délibération du Conseil général du 6 décembre 1879 approuvant l'avant-projet. Le 30 novembre 1880, le Conseil général adopte le projet de construction, et les opérations d'achat des terrains, soit à l'amiable, soit par expropriation, sont terminées à la fin de l'année suivante. Les travaux commencèrent le 28 juin 1882.

Marcel Briand (1853-1927) fut le premier médecin en chef de la division des femmes (2e section) de l'asile, avant de succéder en 1912 à son maître Valentin Magnan comme médecin en chef du service des Admissions de Sainte-Anne, poste qu'il occupera jusqu'à sa retraite en 1922.

Entre temps, il aura dirigé, comme médecin principal, le service psychiatrique du Val-de-Grâce pendant la Grande Guerre.


Marcel Briand et l'ouverture de l'Asile de Villejuif en 1884

Les temps héroïques

coll. M. CaireCommission de Surveillance des Asiles publics d'aliénés du département de la Seine

Séance du 6 avril 1909

M. le Dr Briand

« Messieurs,

Il y a, depuis quelques minutes, un quart de siècle, exactement le 6 avril 1884, à 1 heure de l'après-midi, une caravane composée de 24 émigrants, y compris celui qui a l'honneur de rappeler ce fait, quittait l'asile Sainte-Anne et venait prendre possession de l'établissement qui reçoit aujourd'hui votre visite.

Trouver l'asile ne fut point difficile, mais aborder le local qui nous était destiné fut plus malaisé.

La pluie, qui tombait à torrents depuis plusieurs jours, avait transformé le chantier en village lacustre.

Des passerelles durent être improvisées qui nous permirent de pénétrer dans la place.

L'asile-hospice, c'est ainsi qu'il se dénommait alors, était composé du premier quartier, des murs du second et de quelques baraquements en planches pour l'installation provisoire des services généraux et de trous destinés aux fondations des autres bâtiments.

Le lendemain, 24 malades, triées sur le volet, parmi les plus insociables, me furent envoyées de Ville-Evrard.

Le quartier que nous avons « ouvert » l'était à tous les vents ; ni portes ni fenêtres n'avaient de serrures. Quelques clous et cordages abandonnés par les ouvriers nous permirent de nous clore tant bien que mal.

La maison mère, Sainte-Anne, avait fort heureusement fourni un matériel complet de cuisine, vaisselle et literie, à l'exclusion des lits proprements dits.

Grâce à l'activité du personnel, tout le monde trouvait son repas servi à l'heure réglementaire, et aussi un matelas à terre pour essayer d'y dormir.

La première nuit fut inénarrable ; il fallut coucher les malades les plus agitées dans les chambres des infirmières, et celles-ci, campées dans le dortoir, eurent, je vous prie de le croire, fort à faire pour mettre la paix dans cet enfer.

M. le Dr Dupain, aujourd'hui mon collègue et qui fut mon premier interne, pourrait vous dire ce qu'était cette installation et vous raconter maints épisodes des plus drolatiques.

Quoiqu'il en fût, l'asile de Villejuif était fondé ! L'enfant était né viable, et le 1er janvier 1885, rompant le lien qui le rattachait à la maison mère, il volait de ses propres ailes. Vous avez pu constater qu'il n'a cessé de prospérer depuis.

Il ne reste dans les asiles de la Seine que cinq survivants de ces temps héroïques, M. le Dr Dupain, médecin à Vaucluse, Mlle Villette, surveillante en chef de mon service, M. et Mme Bréha, le premier employé à la pharmacie, la seconde à la buanderie, et moi-même.

coll. M. Caire

Le hasard vous ayant amenés à nous faire aujourd'hui votre visite annuelle, j'ai pensé que celle-ci, coïncidant avec le 25e anniversaire de la fondation de l'établissement, vous voudriez bien me permettre de rappeler une date qui m'est chère et de célébrer avec vous les « noces d'argent » de l'asile de Villejuif. »


En cette année 1909, l'asile de Villejuif est dirigé par Edgar Monteil. Les collègues de Briand sont :

- Florentin Pactet, médecin de la division des hommes (1ère section)

- Edouard Toulouse, médecin de la division des femmes (1ère section)

- Auguste Marie, médecin de la division des hommes (2e section)

- Henri Colin, médecin du service des aliénés difficiles, qui n'ouvrira que l'année suivante.

On y dénombre fin mars 1.486 malades présents, dont 690 hommes et 796 femmes.

Michel Caire, 2010-2014
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