Salomon LWOFF
Krementchoug (Russie) 5 janvier 1859 / Saint-Maur (Val-de-Marne) 9 août 1939
Aliéniste, médecin en chef des asiles d'aliénés,
père du Prix Nobel André Lwoff.
Salomon Lwoff est né à Krementchoug, en Russie, département de Poltava (aujourd'hui
en Ukraine, dans la "région de Poltava").
Dopinion libérale,Salomon est mêlé à des troubles
à l'école de médecine lors de sa première année
d'études, et quitte son pays natal -non sans avoir dû y faire son
service militaire- pour s'installer en France.
Reçu au concours de l'internat des asiles de
la Seine en 1886, il est interne de 1887 à 1890, successivement à Vaucluse (service du docteur Victor Bigot), à Villejuif (docteur Marcel Briand), et aux Admissions
de Sainte-Anne dans le service de Valentin
Magnan.
Sa thèse de doctorat en médecine, soutenue à Paris en 1890, porte comme titre : Etude sur les troubles intellectuels liés aux lésions circonscrites du cerveau (symptômes et diagnostic avec la paralysie générale).
Naturalisé fin 1891, il passe le concours de l'adjuvat, prend en octobre de l'année suivante le poste de médecin adjoint à l'asile d'Auxerre et passe en août 1894 à Prémontré (docteur Eugène Pilleyre).
Là, il vit une période difficile : soupçonné
d'anarchisme, il est placé sous surveillance par la Préfecture
et la Direction de la Sûreté générale, et même
filé par la police lors de ses déplacements à Paris.
Ses origines russes, la confusion dans l'esprit du temps entre libéralisme
et nihilisme, à une époque troublée -de 1892 à 1894,
quatre anarchistes auteurs dattentats sont guillotinés : François Koënigstein dit Ravachol,
Auguste Vaillant, Emile Henry et Jeronimo Caserio, lassassin du Président Sadi
Carnot- y sont sans doute pour quelque chose
Mais l'affaire avait débuté à Auxerre, suite à
un conflit avec son médecin-chef directeur de l'asile, le docteur Pierre-Félix Lapointe, auquel Lwoff reprochait
de maltraiter les aliénés -punis
de leur indocilité par des douches en jet sur la tête-, de faire
des économies sur le chauffage et les aliments, et en se débarrassant
des infirmiers les plus anciens et les mieux rétribués. Lwoff
était soupçonné davoir inspiré des articles
attaquant ladministration de lasile parus dans Le Nouvelliste
de lYonne, organe bonapartiste.
Sa probité et ses mérites reconnus, il est chargé en juin 1900
de la création et de lorganisation de la colonie familiale dAinay-le-Château
et quatre ans plus tard de linstallation du nouvel asile du département
de la Seine, à Moisselles.
Début 1905, il remplace Henri Taguet à la 1ère section
de l'asile de Maison-Blanche. Il y vivra quinze ans, « logé, chauffé,
éclairé » avec sa femme et ses trois enfants. En ce temps-là,
Joseph
Capgras est médecin de la 2ème section, Paul
Sérieux de la 3ème.
Début septembre 1914, l'asile de Maison-Blanche est entièrement évacué (voir sur ce site : Un asile pendant la Grande Guerre). Salomon Lwoff accompagne 450 aliénées à l'asile de Saint-Robert (Isère). Le médecin en chef Paul Castin étant lui-même mobilisé, Lwoff y assurera quelques temps le service de 1.600 malades environ, avec le docteur Payre, médecin suppléant de l'asile.
Il sera ensuite affecté à l'asile de Ville-Evrard en avril 1915 au service des militaires blessés ou malades, et réintègre l'asile de Maison-Blanche lorsqu'il sera rendu par l'autorité militaire au département de la Seine et que pourront y revenir les aliénées.
En janvier 1920, Lwoff mute à l'asile de Villejuif, où il dirige la 2ème section de la division des hommes,
et prend sa retraite en février 1924.
Lwoff a publié de nombreux articles notamment dans les Annales médico-psychologiques,
et des analyses de travaux allemands et russes dans les Archives de Neurologie.
Ses contributions dans le domaine thérapeutique portent sur les effets
de lHyoscine, du Véronal, ainsi que sur lhypnotisme et la
clinothérapie, méthode d'alitement continu introduite en France
par son maître Magnan, dont il est adepte : associée à la
balnéothérapie, elle a permis la désaffection du quartier
cellulaire de son service de Maison-Blanche.
L'épouse du docteur Lwoff, Maria Jakovlevna Simonovitch (1844-1955), comme lui d'origine russe, était peintre
et sculpteur de talent. Son portrait, uvre de son cousin le peintre impressionniste
russe Valentin Serov, est exposé au Musée d'Orsay (Paris).
Leur deuxième fils, André, né à Ainay-le-Château en 1902, médecin
et biologiste, nommé chef de laboratoire à l'Institut Pasteur en 1929 -où l'ami de son père, Elie Metchnikoff, avait été chef de service-, résistant dans les réseaux Cohors-Asturies (dirigé successivement par les philosophes Jean Cavaillès et Jean Gosset auquel sa fille Danielle a consacré un beau livre : Sur les traces de Jean Gosset 1912-1944) et Shelburn, (avec entre bien d'autres le docteur Yves Porc'her). André Lwoff reçut en 1965 le prix Nobel avec Jacques
Monod et François Jacob pour leurs travaux sur la régulation génétique
de la synthèse d'enzymes et de virus.
Michel Caire, 2008-2012 |